SuisseBerne veut collecter des statistiques sur le négoce des matières premières
La guerre en Ukraine et les sanctions qui ont suivi ont mis le doigt sur la difficulté d’estimer le poids réel de l’activité, certains affirmant que 80% du pétrole russe serait négocié en Suisse.
Le gouvernement suisse veut mettre en place des outils statistiques concernant le négoce des matières premières sur son sol, annonce-t-il, mercredi, afin de mieux comprendre ce secteur aux contours flous, malgré son poids important dans l’économie nationale.
Environ 900 entreprises
«La Suisse est une place majeure de négoce de matières premières», explique le Conseil fédéral dans un communiqué, qui constate que cette branche «ne figure cependant pas comme une activité à part entière dans les statistiques officielles, que ce soit en Suisse ou à l’international».
Une des difficultés au début de la guerre en Ukraine, lorsque chaque pays se posait la question des possibles répercussions économiques avec la mise en place des premières sanctions contre la Russie, avait été d’évaluer le poids du négoce des matières premières. De nombreuses estimations avaient circulé dans la presse, certaines affirmant que 80% du pétrole russe serait négocié en Suisse. Contactée par l’AFP, l’Association suisse du négoce de matières premières et du transport maritime avait toutefois indiqué qu’elle ne pouvait pas confirmer ce chiffre, expliquant que la part du pétrole russe négociée dans le pays était alors en cours d’évaluation.
La Suisse compte environ 900 entreprises spécialisées dans le négoce des matières premières qui emploient plus de 10’000 personnes, quantifie le gouvernement suisse. Mais «aucune classification spécifique regroupant les activités des entreprises spécialisées dans le négoce des matières premières n’a été établie à ce jour», souligne-t-il dans le communiqué. «Nous ne disposons donc que d’estimations approximatives concernant la contribution du secteur à l’économie dans son ensemble», reconnait-il.
Pétrole, charbon, cuivre…
Parmi les entreprises les plus connues établies en Suisse figurent notamment Glencore, Trafigura, Gunvor ou Mercuria mais s’y ajoutent de nombreuses entreprises basées le plus souvent à Genève, ainsi que dans le canton de Zoug, connu pour sa fiscalité avantageuse pour les entreprises. Actives aussi bien dans le négoce du pétrole que du cuivre, du charbon ou des matières premières agricoles, certaines ont un pied en Suisse mais aussi dans d’autres pays. Glencore, une des très rares à publier des comptes détaillés dans la mesure où elle est cotée en Bourse, est par exemple basée à Baar, dans le canton de Zoug, mais a sa cotation principale à la Bourse de Londres, et est constituée en société à Jersey.
En 2018, le Conseil fédéral avait déjà jugé nécessaire de recueillir des informations statistiques sur ce secteur et lancé des travaux qui ont permis à l’office fédéral de la statistique de publier en 2021, de premières données concernant le nombre d’entreprises et d’employés dans ce secteur. Mais il souhaite désormais affiner les relevés statistiques officiels, «afin de pouvoir mieux estimer l’importance de la branche au niveau national et international», précise-t-il, dans le communiqué. Les entreprises de négoce des matières premières sont régulièrement dans le viseur des ONG, telles que Public Eye, qui leur reprochent leur opacité.