US OpenMonstrueux, Alcaraz met un terme au rêve américain de Tiafoe
L’Espagnol, qui s’est imposé en cinq sets au bout d’un nouveau morceau de bravoure, affrontera dimanche en finale Casper Ruud, avec la place de No 1 mondial en jeu.
- par
- Simon Meier New York
Le 138e US Open de l’histoire n’était pas loin de reverser dans le paranormal le plus absolu, vendredi soir dans un stade Arthur-Ashe en fusion. Comme deux jours plus tôt lors de son morceau d’anthologie contre Jannik Sinner, Carlos Alcaraz l’a emporté en cinq sets (6-7 (6), 6-3, 6-1, 6-7 (5), 6-3) face à Frances Tiafoe, dont le rêve américain s’est ainsi arrêté là. Quant à l’Espagnol de 19 ans, il disputera dimanche sa première finale de Grand Chelem contre le Norvégien Casper Ruud avec, pompon sur le gâteau, la place de No 1 pour enjeu supplémentaire. S’il parachève sa première œuvre majeure, il deviendra par la même occasion le plus jeune roi de l’histoire du tennis.
Pour tout dire et sans qu’il n’y ait là rien contre le Viking, ce couronnement serait archi mérité. Parce que «Carlito presque Ier» a à nouveau dû sortir le très grand jeu pour éconduire son adversaire. Littéralement imbattable dans l’exercice du tie-break durant ce tournoi (il en était à six sur six avant ce match), Frances Tiafoe a «logiquement» remporté la première manche, puisque aucun des deux joueurs n’a égaré son service et qu’il fallut avoir recours au jeu décisif. Il se l’est adjugé (8-6), non sans que l’Espagnol eut sauvé trois balles de set consécutives à 6-3.
Fatigué, lui?
«Ce n’est pas le moment d’être fatigué», avait très judicieusement déclaré Alcaraz juste avant son entrée sur le court, au micro de Patrick McEnroe qui lui demandait comment il avait récupéré de son match lunaire (5 h 15) contre Jannik Sinner. Fatigué, il ne l’était pas trop. Impressionné non plus, ni abattu par la perte de cette première manche.
Il était plutôt énervé, le gaillard, et la suite allait le démontrer. L’Espagnol a réussi le premier break de la partie après 1 h 32 (4-2), puis obtenu deux balles de set à 5-2. Mais l’Américain a servi le plomb pour s’en sortir et s’est, au jeu suivant, offert une balle de débreak au prix d’un monstrueux passing de revers en bout de course. Le jeunot allait-il vaciller? Pas tellement, non, puisqu’il a aligné quinze des seize points suivants pour empocher la manche (6-3) et prendre deux services d’avance dans la troisième (3-0), finalement expédiée en une grosse vingtaine de minutes (6-3).
Quand il a breaké d’entrée dans la quatrième manche pour mener 2-0, après avoir aligné un lob diabolique, une sublime contre-amortie et un point qu’on renonce à décrire tellement il était fou, les carottes - et Frances Tiafoe - paraissaient cuites. Dans les cordes, l’Américain multipliait les signes d’impuissance en direction de son clan et ce dernier, s’il s’était agi de boxe, aurait jeté l’éponge. Il aurait eu tort.
Bon Jovi à la rescousse
Admiratifs du récital de l’Espagnol mais sensible au calvaire vécu par leur compatriote qui a fait face à une balle de 3-0 contre lui sur service adverse, les quelque 23 000 spectateurs ont appuyé sur le bouton «encore plus de bruit». Enhardi, le fantôme de Tiafoe a refait surface, marqué son jeu de service, et puis Jon Bon Jovi est apparu à l’écran du stade. Bronca féroce et métallique. Débreak, re-break, re-débreak et jeu Tiafoe - vous suivez? Ça fait 3-3. À 5-4 Alcaraz, l’Américain sauve une balle de match au bout d’un échange de dingos. Direction un nouveau tie-break, dont on devine aisément l’issue - huit sur huit pour Tiafoe (7-5), cinquième set à suivre.
Dans tout esprit environ humain, il y aurait eu de quoi semer un gros doute, voire l’ombre d’un désespoir. Car Alcaraz était désormais en position de perdre un match qu’il avait pour ainsi dire déjà gagné. Mais l’Espagnol est différent. Au lieu de céder à la panique, il a remis, avec hargne et méthode, quelques bûchettes dans le brasier. Break d’entrée pour mener 2-0. Manifestement increvable, Tiafoe a refait son retard (2-2).
C’était le chant du cygne. Incapable de tenir son service, de résister encore à l’ouragan permanent, l’Américain a fini par s’incliner 6-3 dans le set ultime, après 4 h 19 de jeu. L’accolade fut longue, chaleureuse, aussi belle que l’empoignade. Et à la fin, c’est Alcaraz qui gagne. S’il veut aller au bout, soulever son premier trophée majeur et grimper sur le trône qui lui tend les bras, le prodige Murcie devra enfoncer le clou dimanche contre Casper Ruud, qui a lui aussi l’opportunité de devenir No 1 mondial. Mais pour ça, il faudra réaliser l’impossible.