PrésidentielleEn Colombie, la campagne électorale dégénère en coups bas
La campagne électorale, avant le deuxième tour de l’élection présidentielle prévu dans une semaine en Colombie, s’envenime et tous les coups semblent permis.
À une grosse semaine du second tour de la présidentielle en Colombie, la campagne électorale entre les deux candidats, toujours au coude-à-coude, tourne au pugilat et aux coups bas.
Arrivé en tête du premier tour (40%) le 29 mai, l’opposant et sénateur Gustavo Petro, qui ambitionne de devenir le premier président de gauche de l’histoire du pays, affronte l’indépendant et inclassable hommes d’affaires Rodolfo Hernandez (28%), qualifié surprise sur un discours essentiellement anti-corruption.
Chacun a depuis lors engrangé divers ralliements et soutiens, continuant sans répit à battre campagne, sans oublier l’inévitable mise en scène sur les réseaux sociaux. Visiblement soucieux de montrer sa proximité avec les Colombiens ordinaires, Gustavo Petro est dernièrement sur tous les fronts: à la mine, dans la cuisine d’une mère de famille, au volant d’un taxi, sur un terrain de foot…
Accusations de «corruption»
Le candidat de gauche de 62 ans a également présenté son CV (sans mentionner son passé de guérillero d’extrême gauche) à ses concitoyens. «À vous de décider si vous me donnez un travail ou pas, le travail est celui de président de la Colombie», a-t-il plaidé sur Twitter.
En face, Rodolfo Hernandez continue sur les thèmes qui lui ont réussi jusqu’à présent: sus aux «voleurs» et à la «bureaucratie», le tout en formules simples, sourire aux lèvres et bière à la main. Le discours s’est cependant élargi aux femmes, à l’éducation, à l’économie entre autres, avec par ailleurs l’entrée en scène de sa mère de 97 ans, de son épouse, de même que de sa colistière pour la vice-présidence Marelen Castillo, une universitaire métisse aux «origines» afro-colombiennes.
Déjà très dure avant le premier tour entre droite et gauche, la campagne a nettement tourné à l’aigre dernièrement entre les deux qualifiés s’accusant réciproquement de «corruption». Les hostilités ont débuté avec les incriminations relayées par le camp Petro sur le supposé «machisme» de son rival, puis ses démêlés judiciaires dans une affaire de corruption alors qu’il était maire dans le nord du pays. De la simple «désinformation», a rétorqué l’intéressé.
«Petrovidéos»
Dernier épisode jeudi, avec la divulgation par un hebdomadaire notoirement anti-Petro d’enregistrements pirates de réunions de campagne du même Petro, qui mettent d’évidence le candidat de gauche sur la défensive. Ces «Petrovidéos», comme elles ont déjà été surnommées, révèlent la teneur de discussions stratégiques du premier cercle du candidat de gauche.
Un sénateur et proche collaborateur y parle de «faire exploser» et de «décrédibiliser» les rivaux centristes de Petro, un autre parle de «générer du contenu» sur les réseaux en «attaquant» le candidat de droite. Ces enregistrements ont été immédiatement exploités par les adversaires de Gustavo Petro.
«Prêt à tout»
Depuis Miami, aux États-Unis, où il est en campagne, Rodolfo Hernandez a annoncé l’annulation de toutes ses apparitions publiques jusqu’au scrutin, disant craindre pour «sa vie». «J’ai la certitude que ma vie est en danger. On peut s’attendre à tout, jusqu’au pire, de ce groupe politique qui se comporte comme une bande criminelle» et «est prêt à tout pour arriver au pouvoir», a fustigé Rodolfo Hernandez.
Un conseiller de Petro a dénoncé dans «ces fuites d’audios et de vidéos de conversations privées des attaques directes contre la démocratie», évoquant des déclarations «décontextualisées». Sur Twitter, le candidat de gauche, qui lui-même ne s’exprime à aucun moment dans ces enregistrements pirates, a exigé leur diffusion en «totalité» afin que les Colombiens «puissent juger de mes actes les plus intimes en politique».
Il a invité son rival «à venir débattre en sécurité à la télévision» pour «donner au peuple le débat qu’il mérite». Mutique depuis sa déroute au premier tour, la droite conservatrice, qui avait immédiatement appelé à voter pour Rodolfo Hernandez, a dénoncé «l’immoralité» de Petro qui «ne mérite pas d’être président».