GéographieLa petite-fille du commandant Cousteau va mesurer l’Amazone
Pour savoir si le fleuve sud-américain est plus long ou non que le Nil, une expédition internationale va y naviguer sur tout son cours durant six mois.
Quel est le plus long fleuve du monde? Le Nil ou l’Amazone? Une expédition internationale tentera de répondre à cette question vieille de plusieurs décennies en parcourant en canoé les plus de 6000 km du fleuve sud-américain.
À bord de trois embarcations à pédales et énergie solaire, l’expédition «Fleuve Amazone: de la glace à la mer» prévoit de partir en avril prochain des Andes péruviennes pour rejoindre six mois plus tard l’océan Atlantique, après avoir traversé la Colombie et le Brésil.
«L’objectif principal est de cartographier le fleuve et de documenter sa biodiversité» à des fins scientifiques, explique à l’AFP l’explorateur brésilien Yuri Sanada, coordinateur du projet, évoquant également la réalisation d’un documentaire.
Jusqu’à présent, seule une douzaine de personnes se sont aventurées en kayak d’un bout à l’autre de l’Amazone, mais personne ne l’a jamais fait avec de tels objectifs, souligne celui qui dirige aussi la société de production audiovisuelle Aventuras Produções avec sa femme Vera Sanada.
Un différend sur sa source
Au cœur de la plus grande forêt tropicale du monde, l’Amazone est depuis longtemps reconnu comme le plus puissant fleuve du monde avec un débit bien supérieur à celui du Nil, du Yangtsé et du Mississippi réunis. Mais il existe un différend vieux de plusieurs décennies sur la question de savoir lequel entre le Nil et le fleuve sud-américain est le plus long, en raison notamment de l’absence de consensus sur l’endroit où commence et où se termine l’Amazone.
Le Guinness des records attribue la première place au Nil. Mais «la question de savoir lequel est le plus long est plus une question de définition que de simple mesure», ajoute le site dans une note. Selon l’Encyclopaedia Britannica, le fleuve sud-américain est long d’environ 6400 km, depuis sa source attribuée à la rivière Apurimac dans le sud du Pérou, contre 6650 km pour le Nil.
Deux départs distincts
Cependant, en 2014, le neuroscientifique et explorateur américain James Contos a développé une théorie, selon laquelle l’Amazone pourrait remonter aux sources d’un autre fleuve, le Mantaro, situé plus au nord. Si l’expédition prend en compte ce point et une «embouchure plus au sud» du delta, cela pourrait «se traduire par une plus grande longueur de l’Amazone», dit-il à l’AFP.
L’expédition parcourra de manière concomitante les deux cours d’eau: un groupe, mené par James Contos, descendra le Mantaro en rafting, tandis qu’un autre parcourra les rives de l’Apurimac à cheval, en compagnie de l’exploratrice française Céline Cousteau, petite-fille du légendaire océanographe Jacques-Yves Cousteau.
À la jonction des deux voies d’eau, Yuri Sanada et deux autres explorateurs entameront la plus longue étape du voyage, à bord de canoës individuels en bio résine dotés de capteurs afin de réaliser «des mesures beaucoup plus précises», explique le Brésilien.
L’expédition, qui bénéficie du soutien d’organisations internationales comme The Explorers Club ou la bibliothèque numérique de Harvard, sera accompagnée sur certains tronçons d’un bateau de soutien, qui servira de base pour des travaux audiovisuels et scientifiques.
Gare aux trafiquants!
Anacondas, caïmans, jaguars… aucun des animaux présents sur le parcours n’effraie Yuri Sanada. «Ce qui me fait le plus peur, ce sont les trafiquants et les mineurs illégaux», avoue-t-il, expliquant que les canoés seront dotés de cabines à l’épreuve des balles. Par ailleurs, l’expédition négocie avec les autorités la possibilité d’une escorte armée sur les tronçons les plus dangereux.
En cas de succès, l’expérience pourrait être reproduite sur le Nil, assure Yuri Sanada, conscient cependant que la controverse ne sera peut-être jamais résolue. L’intérêt suscité par cette «course» permet d’attirer l’attention sur les richesses naturelles du Brésil et sur la préservation de la planète, plaide-t-il. «L’Amazonie se situe (en partie) au Brésil, mais les conséquences de sa destruction et le devoir de la préserver appartiennent à tout le monde», affirme le coordinateur du projet.