Banditisme corseUne magistrate française mise en examen et écrouée
Fait rarissime, une magistrate française a été mise en examen puis écrouée samedi dans une enquête sur ses liens suspects avec un membre du banditisme corse.
La magistrate, Hélène Gerhards, en poste à la Cour d’appel d’Agen (Sud-Ouest de la France), a été mise en examen dans la nuit de vendredi à samedi, notamment pour détournement de fonds publics, trafic d’influence ou encore association de malfaiteurs, pour des faits qui auraient été commis entre 2008 et 2022, en particulier lors de son passage en Corse, de 2010 à 2016, en tant que juge d’instruction.
Le total des fonds détournés «pourrait être évalué à plus de 120’000 euros (environ 117’000 francs, ndlr)», selon le procureur de Nice. Les deux juges d’instruction ont retenu 11 infractions parmi les 20 présentes dans l’information judiciaire.
«Services réciproques»
Cela correspond aux réquisitions prises par Damien Martinelli, procureur de la République de Nice, qui a précisé dans un communiqué que le juge des libertés et de la détention a ensuite été saisi par les juges d’instruction et a «ordonné» son placement en détention provisoire.
«À la lumière d’interceptions téléphoniques», il est apparu que cette magistrate, qui avait été placée en garde à vue mercredi, «paraissait dans une relation de proximité avec un individu très défavorablement connu des services de police, au sujet notamment de travaux dans une villa dont elle était occupante, située sur la rive sud d’Ajaccio», avait indiqué le procureur vendredi matin dans un précédent communiqué.
Selon des sources proches du dossier, l’individu en question est Johann Carta, mis en examen et écroué dans plusieurs enquêtes, notamment en décembre 2023 dans un dossier d’«escroquerie, extorsion de fonds et blanchiment d’argent en bande organisée» géré par la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Marseille.
«En contacts réguliers également avec d’autres personnes connues des services de police (...), la magistrate semblait entretenir une grande proximité faite notamment de services réciproques», ajoutait le procureur.
«Règlement de comptes»
Lors de ses auditions en garde à vue, la magistrate a «contesté d’abord toute infraction et tout manquement à ses obligations professionnelles», avant de finalement reconnaître «une consultation illicite de données au profit d’un individu défavorablement connu», avait précisé le procureur.
Jeudi, les avocats de cette magistrate, s’étaient interrogés, dans un communiqué transmis à l’AFP, «sur un éventuel règlement de comptes au sein de la magistrature»: selon eux, leur cliente serait «victime d’une opération de destruction dans laquelle l’autorité judiciaire se permet tous les coups».
Ce n’est pas la première magistrate ayant travaillé en Corse inquiétée par la justice: en octobre 2022, une juge bastiaise, Danielle Sbragia, avait été mise en examen pour «prise illégale d’intérêt».