Rapport «Public Eye»La Suisse est la plaque tournante du charbon mondial
Les banques helvétiques ont financé à hauteur de 3 milliards de francs des sociétés basées en Suisse et actives dans le charbon, selon Public Eye, qui demande à Berne de sortir de ce «business climaticide».
Alors que la COP27 sur le climat s’ouvre en Égypte, un rapport de Public Eye publié lundi révèle que 40% du commerce mondial du charbon, la source d’énergie la plus polluante au monde, est négocié depuis la Suisse.
Selon l’association qui œuvre pour un monde plus juste via l’amélioration des relations entre la Suisse et les pays en développement, notre pays accueille depuis le début des années 2000 de grands groupes miniers et a donné naissance à un «écosystème de la suie» entre Zoug, Genève et Lugano. Il y a chez nous quelque 245 sociétés actives dans le charbon, dont une majorité à Genève.
Les sociétés minières qui y ont installé leur siège ou une branche commerciale extraient ensemble plus de 536 millions de tonnes de charbon par an. Ce qui représente, tout compris, près de 5,4 milliards de tonnes de CO₂ rejetées dans l’atmosphère. «C’est plus que les émissions des États-Unis», dénonce Public Eye.
En outre, ces sociétés sont financées en grande partie par des banques suisses. Nos banques auraient prêté des montants de 3,15 milliards de dollars à l’industrie suisse du charbon, affirme l’association qui cite des données du cabinet néerlandais Profundo.
Credit Suisse, aurait à lui seul, fourni plus de la moitié de ces fonds, à des entreprises comme Glencore ou encore à des extracteurs russes. UBS, mais aussi des banques cantonales, comme celles de Zurich, Genève et Vaud auraient aussi versé de l’argent dans le secteur.
Face à la pression environnementaliste, de nouvelles stratégies ont été mises en place, critique Public Eye. «Les critères d’exclusion définis par les banques sont taillés de telle sorte que les grands groupes passent à travers les mailles des promesses climatiques», dénonce-t-elle. Le financement se ferait en outre discrètement, via des lignes de crédit non contraignantes ou «underwritings», un instrument permettant de ne pas faire figurer le charbon au bilan comptable, assure l’association. Elle affirme ainsi qu’entre 2016 et 2022, le secteur suisse du charbon a obtenu des banques un total de 72,9 milliards de dollars au niveau international.
Public Eye demande à Berne d’agir. «Par sa position dominante dans le secteur du charbon, la Suisse dispose d’un levier de politique climatique et d’une responsabilité pour la sécurité énergétique mondiale», écrit-elle en rappelant que notre pays s’était engagé en 2021 à la COP26 de Glasgow en faveur d’une sortie totale du charbon. Dans une pétition, l’association demande au Conseil fédéral et au Parlement de prendre des mesures «pour un abandon complet de ce business climaticide d’ici à 2030».