Football – L’illisible FC Bâle

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FootballL’illisible FC Bâle

La saison des Rhénans manque de clarté dans le jeu. Mais certaines individualités lui permettent d’avoir des certitudes avant d’affronter l’Olympique de Marseille en Conference League. Analyse.

Valentin Schnorhk
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Valentin Schnorhk

Le FC Bâle peut-il le faire? À force d’avoir construit une bonne partie de son histoire sur des exploits en Coupe d’Europe, le club rhénan suscite la curiosité. Surtout avant d’affronter l’Olympique de Marseille en Conference League cette semaine. Pas facile de prédire l’issue de cette confrontation. Parce que ce FCB n’est pas facile à suivre. Sa saison de Super League n’est pas glorieuse, mais il a souvent su aborder correctement ses matches européens.

Guillermo Abascal n’a pas révolutionné son équipe, depuis qu’il a remplacé Patrick Rahmen.

Guillermo Abascal n’a pas révolutionné son équipe, depuis qu’il a remplacé Patrick Rahmen.

Marc Schumacher/freshfocus

Profiler la formation rotblau n’a rien d’aisé. Et le remplacement de Patrick Rahmen par Guillermo Abascal ne change pas vraiment la donne. Parce que l’identité des Bâlois n’est pas claire: peu de principes-clé et une capacité à s’en remettre aux individualités qui fait dévier toute interprétation. Tentative de décryptage de l’illisible FC Bâle.


Que disent les chiffres?

Parfois, les statistiques aident à comprendre ce qui n’est pas visible sur le terrain. Débroussailler ce FC Bâle à l’aide de la data peut être tentant. Histoire de dégager des tendances, à défaut de récurrences. Problème: le FCB est une équipe qui peut avoir 40% de possession dimanche à Lugano, mais 66% quelques jours plus tôt contre Saint-Gall. Parfois, il presse, parfois pas du tout: 18 passes accordées à l’adversaire par action défensive (le PPDA) au Cornaredo, seulement 5,65 contre les Brodeurs jeudi.

Pas vraiment clair. En fait, les chiffres représentent une bonne manière de relever les incohérences de la formation bâloise. Et notamment au niveau des Expected Goals. Avec, d’un côté, une réelle efficacité offensive et, de l’autre, beaucoup de réussite défensive. Bâle valorise ses tirs au maximum: chaque situation de frappe a en moyenne 14,6% de chances de se terminer en but. Il s’agit du meilleur score de Super League. Pourtant, il ne frappe pas énormément (13 fois par match, bien loin des 17 tentatives d’YB par exemple). Mais de par sa recherche de la position juste, il peut marquer beaucoup, et donc exister offensivement. Et puis, il s’en tire particulièrement bien défensivement: il n’a encaissé que 31 buts, alors que le modèle des xG en prédisait 45. L’explication tient notamment en Heinz Lindner.

Reste à savoir si le départ d’Arthur Cabral a changé la donne. Dans le jeu, peu de variations. En revanche, dans le dernier tiers, ce n’est plus tout à fait pareil. Il est devenu difficile pour le FCB de trouver une cible dans la surface adverse: contre 22,5 ballons touchés dans les seize mètres avant la trêve, les Rhénans ne tournent plus qu’à 15,6. Et, comme le montre le graphique ci-dessus, la qualité des essais a diminué.


Le score détermine l’approche

Quoi qu’il en soit, Bâle apprend à vivre sans son ex-meilleur buteur. Et dans l’idée, rien n’a fondamentalement changé lorsqu’il s’agit de faire avancer le ballon. De par son statut de «gros», le club bâlois débarque le plus souvent avec l’ambition d’avoir le ballon. L’adversaire tend à le lui laisser. Du moins en début de match. Comment l’utilise-t-il? C’est là que le bât blesse. Notamment parce que les équipes alignées manquent de continuité, notamment derrière et au milieu: à Bâle, le onze de base change beaucoup.

Reste qu’il y a bien sûr une intention de ressortir depuis l’arrière. Mais après? La tendance la plus claire est la volonté de créer des supériorités. Lorsque deux adversaires pressent, Bâle sollicite trois joueurs, voire plus. Les latéraux (Katterbach à gauche, Lang ou Lopez à droite) peuvent ainsi se positionner assez bas au départ des actions. Lorsqu’elles se développent, au moins un des deux monte, l’autre pouvant continuer à accompagner la construction, avant d’éliminer la première ligne. L’un des milieux (notamment Palacios, lorsqu’il est aligné, ou Frei, quand il n’évolue pas en défense) est aussi concerné par la création de cette supériorité numérique.

Un surnombre qui, au final, a pour principal effet de déserter l’intérieur du jeu. Bâle est une équipe qui arrive à s’exprimer surtout par les côtés, qu’il utilise pour contourner le bloc adverse. Les diagonales de Fabian Frei ou Pajtim Kasami, deux éléments particulièrement efficaces dans le jeu long, sont un atout pour isoler Liam Millar ou Dan Ndoye, par exemple. Deux individualités sur les ailes qui constituent une bonne réponse à la faiblesse du jeu intérieur.

En ce qui concerne le comportement défensif, il manque aussi de clarté. Si le système de départ en 4-1-4-1 est régulier, Abascal s’est déjà souvent adapté en cours de match, en passant dans un 4-4-2 qui permet d’alterner efficacement un bloc médian, voire haut, et une approche plus attentiste. À Lugano dimanche, s’il a commencé avec le seul Chalov en pointe, avec une approche assez agressive, Bâle a reculé rapidement. Sans doute sous l’effet du score. En menant rapidement 1-0 à l’extérieur, les Rhénans ont laissé faire les Tessinois, en abandonnant également le ballon. Alors que, trois jours plus tôt, contre Saint-Gall à domicile, ils ont cherché à être plus haut. Il faut dire qu’ils étaient menés de deux buts après une vingtaine de minutes. À croire que seul le tableau d’affichage détermine vraiment l’approche du FCB.


Les individualités, recours le plus fiable

Dresser le portrait du FC Bâle, c’est donc raconter une équipe qui n’a pas une ligne à laquelle vraiment se tenir, se raccrocher qu’importe le moment. Ses certitudes sont en fait ailleurs, et il vaut mieux qu’elles ne flanchent pas. Il s’agit en effet des individualités. Et avec le départ de Cabral, Bâle en a perdu une belle. Mais il a d’autres arguments qui font encore des différences. À commencer par Heinz Lindner.

Le portier autrichien est le meilleur du championnat à son poste. Il contribue à éviter les déconvenues et à laisser ses coéquipiers dans le match. Même si elles ont eu tendance à baisser depuis la reprise, les statistiques avancées lui sont d’ailleurs très favorables: il «sauve» 0,25 but par match. Sur sa ligne, personne ne fait mieux en Super League. Et dans ce Bâle-là, c’est tout ce qui est attendu d’un gardien.

Sur le versant offensif, c’est le recours aux ailiers Ndoye et Millar qui rend viable le projet de jeu. Tant le Vaudois que le Canadien font partie des meilleurs dribbleurs du pays: à force de tenter, ils font des différences. Et permettent d’arriver un peu plus facilement dans la surface adverse. Le reste est ensuite une affaire de choix. Ainsi que d’attaquants. Dans ce domaine, Fedor Chalov, malgré des perspectives intéressantes, n’est pas encore Arthur Cabral.

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