Conseil nationalL’abolition du droit de timbre est enterrée, la gauche lutte
Le National a décidé jeudi d’abandonner le projet controversé de supprimer tous les droits de timbre. La gauche n’a pas l’intention de retirer son référendum.
- par
- Christine Talos
Le National a décidé jeudi à la quasi-unanimité d’abandonner le projet d’abolition des droits de timbre, des droits qui rapportent 2 milliards de francs par an à la Confédération. Mais si les députés ont décidé de l’enterrer, c’est parce que le gros du projet a déjà été adopté mardi par le Parlement via la réforme de l'impôt anticipé. La gauche, qui a lancé un référendum (et qui vient d’aboutir), n’a donc pas l’intention d’abandonner le combat.
Pour rappel, le projet, déposé en 2009 par le PLR déjà, entendait supprimer progressivement tous les droits de timbre. Ceux-ci correspondent à des impôts prélevés par la Confédération et frappent certaines transactions financières. Le projet était divisé en trois parties. Une première étape concernait le droit de timbre sur le capital propre, qui entraînerait des pertes de 250 millions de francs. Elle a été adoptée par le Parlement en juin dernier. C’est contre ce volet-là que la gauche a lancé un référendum qui vient d’aboutir.
Un autre volet visait la suppression du droit de timbre de négociation sur les autres titres étrangers ainsi que celui sur les primes d’assurance de chose et de patrimoine. Abandonné en août, il aurait dû engendrer des pertes de 1,78 milliard de francs par an. Restait le dernier volet, qui prévoyait l’abolition du droit de timbre de négociation sur les titres suisses et les obligations étrangères. Celui-ci, qui aurait dû engendrer des pertes de 219 millions, vient donc lui aussi d’être abandonné.
Objectifs remplis pour le PLR
«Comme une grande partie de la modification du droit de timbre a été incluse dans la révision de la loi sur l’impôt anticipé, nous estimons que nous avons atteint les objectifs que nous voulions atteindre en 2009», a expliqué Christian Lüscher (PLR/GE).
Pour la droite, le droit de timbre représente un sérieux désavantage concurrentiel pour la place économique suisse, «car il est unique au monde et représente une relique du passé», a rappelé Céline Amaudruz (UDC/GE) au nom de la commission. Selon elle, il freine non seulement le secteur financier, mais aussi l’ensemble de l’économie suisse. «Sa suppression améliorerait l’attractivité de la place économique helvétique et renforcerait ainsi sa compétitivité internationale».
«C’est le moment de dire stop»
Mais cette abolition est un cadeau irresponsable pour les plus riches, estime la gauche. Et il tombe mal, selon Samuel Bendahan (PS/VD). «C’est pour éviter que la facture ne soit trop lourde que nous sommes ici pour défendre la minorité, qui dit: cela suffit maintenant. Projet 1, 2, 3, impôt anticipé et droits industriels: cela suffit! Nous avons à penser au bien commun. Lorsque nous sortirons de la crise liée au coronavirus, les moyens seront absolument nécessaires. C’est le moment de dire stop!», a-t-il lancé.
Franziska Ryser (Verts/ZH) a critiqué la machinerie de la réduction des impôts en faveur de l’industrie des assurances et des finances. Ces cadeaux «détruisent le service public». «Une augmentation des impôts plane sur les citoyens», a-t-elle lancé.
Une chose est sûre: la gauche a la ferme intention de faire voter les Suisses à ce sujet grâce à son référendum. Il reste d’autres projets en cours, comme la réforme de l’impôt anticipé ou la suppression de la valeur locative, qui font perdre des millions à la Confédération, explique Samuel Bendahan. Ces pertes risquent de retomber sur les contribuables. «Il faut donc lutter contre cette tactique du salami», estime-t-il. «D’ici que le peuple se prononce sur le droit de timbre, il y a en a pour quasiment 5 ans», confie le Vaudois. «On peut dire ainsi que la gauche évitera des pertes pour la Confédération à hauteur de 10 milliards de francs.»