CyclismeRichard Chassot: «Le Tour de Romandie c’est un miracle permanent»
Le patron du Tour de Romandie a vécu «une belle semaine» mais se fait un peu de souci pour boucler le budget de l’épreuve. La prochaine édition s’élancera de Payerne.
- par
- Christian Maillard Genève
C’est l’heure du bilan, du moment où on se pose des bonnes questions; l’instant des regrets ou pas, de relever ce qui a bien marché ou pas, de peser le pour ou le contre avec forcément un avenir en traitillé. Patron du Tour de Romandie depuis 17 ans, Richard Chassot est revenu quelques jours en arrière pour se relancer du Bouveret à Genève, en passant par Morteau, La Chaux-de-Fonds, le Sentier, Châtel-Saint-Denis et Thyon 2000: que de beaux souvenirs pour lui, avec «un succès populaire fantastique au-delà de nos frontières», «l’avènement des jeunes champions (Cerny, Vernon, Hayther et Ayuso) et au final la victoire d’un coureur expérimenté avec Adam Yates.»
Richard Chassot, pour vous aujourd’hui, le verre est à moitié plein ou à moitié vide: c’est quoi votre bilan?
À moitié plein, bien sûr! On a vécu une belle semaine. On attendait une course ouverte, on l’a eue. On cherchait à découvrir des talents, on les a vus, avec notamment des espoirs suisses qui se sont montrés, dont l’équipe Tudor qui a mis en avant son professionnalisme. Et finalement c’est un coureur expérimenté qui a fait la différence dans l’épreuve de montagne. Il n’y a pas de miracle: pour remporter le Tour de Romandie, il faut des grands champions capables de répondre présent le jour J. Donc oui, le verre à moitié plein et bien rempli!
À travers plusieurs interviews, on vous a senti un peu inquiet par rapport à l’avenir du Tour de Romandie: est-il en danger?
Cela fait 17 ans que je suis inquiet mais là j’avoue que c’est en effet un peu plus compliqué. Ce n’est pas différent du monde dans lequel on vit dans l’économie avec des charges qui augmentent pour tout le monde, y compris nos sponsors évidemment. Il y a eu la pandémie, l’après Covid, la guerre en Ukraine, les montées de l’énergie, un urbanisme de plus en plus important, un trafic qui explose et un espace public de plus en plus difficile à maîtriser. J’ai des équipes qui sont là avec moi depuis 17 ans dont certains qui prennent constamment des risques sur la route pour sécuriser des cyclistes.
Et vous avez besoin de plus en plus de monde…
En effet, ce n’est pas dix de plus mais cinquante personnes qu’il faut ensuite loger et motoriser. Il y a donc beaucoup de choses au même carrefour et en même temps dans une configuration économique qui n’est pas très bonne. Donc aujourd’hui, je l’avoue, on a des soucis pour boucler le budget. Par expérience et par passion, on arrivait toujours à nous en sortir avec 4,2 millions mais quand tout augmente en même temps on constate que cela ne suffit plus et qu’il faudrait 300 000 francs de plus. Je ne peux pas faire des miracles, j’ai besoin d’argent maintenant pour que le Tour de Romandie continue de rester à ce niveau-là. Même s’il y a parfois des petits couacs comme une erreur d’aiguillage on a chaque jour 600 postes à sécuriser avec 170 motards. Pour réussir cet exploit, le TdR c’est un miracle permanent. Pour info, quand le Tour de France vient en Suisse, il y a 1500 personnes, pas 170!
Et quand il y a le Tour de France en Suisse, il n’y a plus de travaux sur les routes, non?
Exact. Je comprends qu’il y ait des travaux mais pourquoi sommes-nous considérés par les autorités comme une manifestation normale alors que le Tour de France ou le Giro sont des événements exceptionnels? Quand nos voisins débarquent en Suisse, on va enlever un rond-point et refaire le bitume et nous alors que nous avons exactement le même nombre de coureurs, on laisse des panneaux sur les tronçons de travaux qu’il faut slalomer. Je ne demande pas la lune mais si on a une considération excellente au point de vue de l’image touristique et de nos sponsors, que dire de la route. Notre vrai travail est de faire passer 170 pros sur les routes à 70 km/h et j’ai besoin des mêmes conditions que le Tour et le Giro.
Il y aura malgré tout une prochaine édition le 23 avril 2024 avec un prologue à Payerne et après, où ira le peloton? Après? On va déjà boucler le Tour de Romandie féminin qui aura lieu du 15 au 17 septembre. Mais pour répondre à votre question nous avons signé des contrats avec, dans l’ordre alphabétique, des villes de Fribourg, Leysin, Oron-la-Ville, Saillon, Salvan/Les Marécottes et Vernier.
Cela signifie qu’il y aura deux étapes de montagne?
Oui, tout à fait, même si cette fois-ci l’ascension sera un peu moins relevée en Valais mais tout de même bien punchy. Leysin sera difficile mais moins longue que Thyon. Il faudra attaquer deux fois pour faire la différence.
Il n’y a pas de sprint prévu sur les quais du Mont-Blanc à Genève, mais une étape à Vernier. En pleine semaine?
Pas forcément! On travaille beaucoup avec Genève et sa gendarmerie. On est très heureux de notre collaboration avec eux et c’est la raison pour laquelle on ose de nouvelles choses comme de nous rendre à Vernier. On l’a vu avec le Tour féminin en septembre, avec un départ de Vernier pour Nyon, avec l’aéroport international il est difficile d’avoir un direct TV et survoler l’épreuve. Les lois sont claires mais on va trouver des solutions parce que la Ville de Vernier nous donne la possibilité de créer des parcours en ville et en campagne genevoise. Ce sera nouveau.