CinémaLes acteurs de Hollywood entrent officiellement en grève
Dès vendredi matin, Hollywood devrait se retrouver paralysé par la grève annoncée des acteurs.
Le puissant syndicat des acteurs américains a annoncé, jeudi, son entrée officielle en grève à partir de minuit (9 heures, heure suisse vendredi), décision qui devrait complètement paralyser Hollywood, où la production de films et de séries tourne déjà au ralenti à cause du mouvement social des scénaristes.
«Le conseil national du SAG-AFTRA a voté à l’unanimité un ordre de grève contre les studios et les diffuseurs», a annoncé Duncan Crabtree-Ireland, directeur exécutif national de ce syndicat qui représente 160’000 acteurs et autres professionnels du petit et du grand écran.
Après les scénaristes
Les acteurs rejoignent ainsi les scénaristes, déjà en grève depuis début mai. Les deux corps de métiers réclament une revalorisation de leurs rémunérations, en berne à l’ère du streaming. Ils souhaitent également obtenir des garanties concernant l’usage de l’intelligence artificielle (IA), pour l’empêcher de générer des scripts, ou de cloner leur voix et leur image.
Ce double mouvement social réunissant les visages et les plumes de l’industrie cinématographique est une première à Hollywood depuis 1960. L’entrée en grève des acteurs est un coup dur pour les patrons des studios et plateformes de streaming.
Plus de tournages
Depuis mai, les seules productions qui ont décidé de tourner le font sur la base de scripts déjà terminés au printemps, sans pouvoir les modifier. C’est notamment le cas du préquel du «Seigneur des Anneaux», financé par Amazon, «Les Anneaux de Pouvoir». Sans comédiens, les tournages ne vont tout simplement plus être possibles.
Seuls quelques talk-shows et émissions de téléréalité vont pouvoir se poursuivre. Les acteurs ont aussi le pouvoir de geler la promotion des blockbusters attendus en salle cet été, comme «Oppenheimer» ou «Gran Turismo». Et, sans leur présence sur les tapis rouges, l’industrie risque de devoir reporter la cérémonie des Emmy Awards, équivalent des Oscars télévisuels, prévue le 18 septembre.
Tapis rouges vidés
Lors de la première du film à Londres jeudi, l’actrice Emily Blunt a expliqué à la presse que le casting quittera «ensemble» le tapis rouge en signe «d’unité», si la grève est formellement approuvée. «Nous devrons le faire. Nous verrons ce qui se passera», a-t-elle déclaré, en réaffirmant son espoir d’un «accord équitable» avec studios et plateformes. La première américaine du film, prévue lundi à New York, risque d’être réduite au minimum.
L’absence de comédiens sur les tapis rouges laisserait un grand vide en Californie. Comic-Con, la grand-messe des geeks et amateurs de bande dessinée américains, devrait ainsi se dérouler sans vedettes à partir du 20 juillet à San Diego. Avant la grève, Disney a expliqué que le lancement de son nouveau film, «Le Manoir hanté», serait réduit à un «événement privé» pour les fans lors du week-end en cas de mouvement social.
Une grève quasi historique
En effet, nul ne sait combien de temps le mouvement pourrait durer. Les acteurs n’ont pas fait grève depuis 1980. La dernière grève des scénaristes, qui remonte à 2007-2008, avait duré cent jours et coûté 2 milliards de dollars au secteur.
Une double grève confirmerait la crise existentielle qui frappe actuellement Hollywood. Fin juin, des centaines d’acteurs célèbres, parmi lesquels Meryl Streep, Jennifer Lawrence et Ben Stiller, ont signé une lettre estimant que leur industrie était à un «point d’inflexion sans précédent». Depuis une dizaine d’années, l’avènement du streaming a bouleversé les rémunérations «résiduelles» des acteurs et scénaristes, découlant de chaque rediffusion d’un film ou d’une série.
Intéressants avec la télévision car calculés en fonction du tarif des publicités, ces émoluments sont bien moindres avec les plateformes de streaming, qui ne communiquent pas leurs chiffres d’audience et paient un forfait, indépendamment du succès. Sans ces revenus essentiels pour absorber les périodes d’inactivité entre deux productions, les nombreux travailleurs qui n’ont pas le statut d’acteur ou auteur star dénoncent une précarisation de leur métier.