TennisNovak Djokovic est-il meilleur que Federer et Nadal?
Statistiquement, le Serbe est le meilleur de l’histoire. Suffisant pour en faire le «GOAT»?
- par
- Daniel Visentini
Sans fin, le débat fuse comme une balle de tennis, partout où il rebondit: de Djokovic, Federer et Nadal, qui est le meilleur joueur de tous les temps, «The Greatest Of All Time», le «GOAT» selon la formule consacrée? Les chiffres sont têtus. Depuis sa victoire à Melbourne dimanche, ils replacent Novak Djokovic au sommet de la hiérarchie, à considérer les succès et les records (voir ci-dessous). Sur ce plan-là, il n’y a plus de débat, en tout cas pas jusqu’à Roland-Garros en attendant de voir si Nadal peut encore repousser ses limites.
Pour le reste, Djokovic est en tête partout. «Il est le meilleur joueur de tennis à avoir tenu une raquette dans l’histoire», a résumé Stefanos Tsitsipas, juste après avoir été battu en trois sets à Melbourne. Débat clos pour le Grec.
On peut comprendre. Et si on ne peut pas trafiquer le passé, le tordre à l’envi avec des «si», il faut bien reconnaître que si le Covid n’était pas passé par là, Djokovic serait peut-être déjà seul en tête dans les victoires en Grand Chelem, le Serbe ayant été expulsé d’Australie l’année dernière et interdit d’US Open aussi alors qu’il dominait outrageusement le circuit.
S’il ne s’était pas obstiné dans sa posture antivax, où en serait-il déjà aujourd’hui, sans même parler de la disqualification injuste dont il a été victime à Flushing Meadows en 2020? Il faut être honnête. Sur le plan des résultats, il y a trois monstres qui ont hissé le tennis à des altitudes irrespirables pour le reste des joueurs pendant longtemps et aujourd’hui encore, mais il y a en a un qui est plus monstrueux encore que les deux autres et, sur ce terrain-là de la performance pure, c’est bien Novak Djokovic. Qui aura réussi l’impensable exploit de devenir No 1 mondial la première fois en 2011, quand personne n’aurait misé un centime sur ce séisme, pendant que Federer et Nadal étaient à leur plus haut niveau et semblaient littéralement intouchables ou presque, en tout cas indétrônables des deux premières places.
En revanche, s’il est un domaine où Djokovic demeurera toujours derrière le Suisse et l’Espagnol. c’est celui de la popularité auprès du public. Ici, il n’y a pas photo. Federer est pour toujours au zénith et il le reste même depuis qu’il s’est retiré de la compétition: il suscite une admiration sans bornes. Nadal arrive derrière, avec une belle bienveillance des supporters à son égard. Et Djokovic, héros de la Serbie, est le vilain petit canard, celui qu’un grand nombre déteste. Sa personnalité clivante, certaines de ses attitudes en match, certaines de ses sorties ésotériques, voire des suspicions sur certaines pratiques: tout cela ne plaît pas. Ou alors, peut-être ce désamour est-il la conséquence du crime de lèse-majesté: avoir fait trop souvent le dépit de Roger Federer?
Federer inégalable
Demeure la question de fond: qui laissera le plus grand héritage. C’est peut-être là que les trois monstres partagent le trône. Chacun étant le GOAT dans son domaine. Djokovic pour ses performances. Nadal pour sa résilience, sa combativité, exemple d’acharnement pour des générations. Et Federer.
Pour avoir révolutionné le tennis. Sans Nadal et Djokovic, la virtuosité de l’éternel génie du tennis aurait été le même miel, une même fascination pour la fluidité de ses dessins aurait enveloppé chacun de ses succès, dans une élégance et une facilité qui jamais n’ont trahi les heures de travail pour atteindre cette perfection de mouvement. Mais sans Federer, Nadal et Djokovic auraient-ils vraiment été ce qu’ils sont devenus? On peut en douter. Ce doute, c’est l’héritage de Roger Federer. Inégalable.