Formule 1 - La saison 2022 commence maintenant

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Formule 1La saison 2022 commence maintenant

Vendredi après-midi, sur le circuit de Bahreïn, les premiers essais officiels vont rassembler les vingt pilotes de la saison 2022. Qui sera le plus rapide?

Luc Domenjoz Sakhir
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Luc Domenjoz Sakhir

Beaucoup de neuf

Le règlement technique de Formule 1, cette saison, a connu sa plus importante révolution depuis 1983 et la suppression de l’effet de sol. À l’époque, les «ailes d’avion» inversées, placées sous les voitures pour les faire coller à la piste, ont été interdites et remplacées par des fonds plats pour ralentir les monoplaces.

Le retour de l’effet de sol devrait permettre aux voitures de se suivre plus facilement, donc de se doubler davantage, ce qui devrait entraîner des courses plus disputées. Reste à voir si cela va fonctionner comme espéré.

Les voitures, cette année, seront aussi plus résistantes aux accidents, donc plus lourdes de 46 kilos pour atteindre 798 kilos à vide et sans pilote - soit presque une tonne au moment des départs.

Les pneus ont aussi connu leur révolution avec l’arrivée des jantes de 18 pouces, créant des roues plus «esthétiques», mais des pneus plus fins, qui joueront donc moins le rôle de suspension que les pilotes appréciaient jusqu’ici. Ces pneus seront aussi plus difficiles à porter à la bonne température, d’autant que les couvertures chauffantes utilisées par les écuries seront limitées à 70 degrés (au lieu de 100 jusqu’ici).

De très nombreux changements qui pourraient bousculer l’ordre établi ces dernières saisons: au cours des essais de la semaine dernière, sur ce même circuit de Bahreïn, les Ferrari se sont montrées les plus rapides, devant les Red Bull, alors que les Mercedes étaient apparemment hors du coup…

2022 à guichets fermés!

Après l’extraordinaire saison 2021 que nous avons vécue, la Formule 1 n’a jamais été aussi populaire. Pour la première fois de son histoire, TOUS les Grands Prix de la saison 2022 affichent déjà complet avant même le premier Grand Prix. Si vous voulez assister à une course sur place, pensez à réserver pour 2023 ou 2024…!

Selon Stefano Domenicali, le patron de Liberty Media - la société qui détient les droits commerciaux de la discipline -, cet engouement est la preuve que le lien de confiance entre la F1 et les fans n’a pas été rompu après la controverse du dernier tour du dernier Grand Prix, à Abu Dhabi - où une décision controversée du directeur de course a offert la victoire et le titre à Max Verstappen.

«La confiance est toujours là, mais j’aimerais que le rapport établi par la Fédération suite à l’affaire d’Abu Dhabi soit rendu public», explique l’Italien. «Nous avons une réunion samedi au cours de laquelle ce rapport nous sera présenté. Le directeur de la course a déjà été changé (ce week-end, c’est l’Allemand Niels Wittich), mais je pense que chacun doit pouvoir consulter les conclusions du rapport. Ce qui a été fait ne peut plus être changé. Mais nous devons nous assurer que de telles situations ne se reproduisent plus.»

Hulkenberg face à une montagne

La saison commence mal pour Sebastian Vettel: alors que le quadruple champion du monde était rentré dans sa ferme de Thurgovie après les essais privés de Bahreïn, samedi dernier, il a effectué un test PCR hier (une procédure non obligatoire pour se rendre à Bahreïn, mais une routine pour l’écurie Aston Martin).

Ce test a révélé qu’il était asymptomatique, mais positif au Covid-19. Du coup, l’écurie a dû préparer en catastrophe la venue de son pilote de réserve, Nico Hülkenberg, censé arriver à Bahreïn dans la nuit de jeudi à vendredi.

Le week-end ne s’annonce par facile pour l’Allemand. Loin d’être un débutant (il a disputé 179 Grands Prix entre 2010 et 2020), il a déjà effectué trois remplacements «Covid» en 2020 (deux fois pour Sergio Perez à Silverstone, et une fois pour Lance Stroll au Nürburgring). Mais il n’a encore jamais roulé avec les nouvelles voitures, leur nouvelle aérodynamique et leurs nouveaux pneus 18 pouces. Bonne chance!

Hamilton et Russell s’entendent à merveille

Ça n’était pas joué d’avance: après cinq années tranquilles à être épaulé par Valtteri Bottas, Lewis Hamilton va devoir travailler cette saison avec George Russell, ouvertement décrit par son écurie comme celui qui succèdera au septuple champion du monde lorsqu’il prendra sa retraite.

Jusqu’ici, le nouveau duo Mercedes fonctionne bien, à en croire Lewis Hamilton: «George s’est intégré très facilement dans notre équipe. On avait déjà souvent travaillé ensemble quand il était pilote de réserve, en 2019. Pendant les réunions, il s’asseyait derrière moi et regardait tout ce que je faisais. Là, il est à côté plutôt que derrière! Ça s’est fait en douceur, et on communique sans problème sur nos réglages. Tout fonctionne bien.»

Pour l’instant, «l’ancien» ne tarit pas d’éloges sur le «nouveau»: «George a un talent naturel incroyable, poursuit Lewis Hamilton. Il est travailleur, sincère et concentré. L’ambiance est très agréable dans l’équipe, on travaille tous à fond.»

Une belle harmonie qui risque de ne durer que jusqu’à leur première chicane…

Ferrari conteste les rétroviseurs des Mercedes

Alors que les monoplaces 2022 ont totalement changé depuis l’an dernier, c’est sur un détail apparemment sans importance que la Scuderia Ferrari a décidé de contester la légitimité de la Mercedes W13: les supports de ses rétroviseurs, composés de six petites barres verticales qui relient le miroir à la carrosserie.

«Selon le règlement, il est clair que le support des rétroviseurs ne doit avoir qu’une fonction mécanique», explique Mattia Binotto, le patron de la Scuderia Ferrari. «Et il nous semble que certaines des solutions vues sur d’autres monoplaces ont une réelle fonction aérodynamique, ce qui est contraire à ce qui avait été décidé. En 2018, nous avions monté nos rétros sur le halo (le triangle qui protège la tête des pilotes, ndlr), et quoique cette solution respectait le règlement, nous avons dû la démonter après quelques courses à la demande des commissaires techniques. Je ne remets pas en question la légalité de la solution de Mercedes, mais uniquement son but.»

Ferrari aimerait que les rétroviseurs des Mercedes soient discutés aujourd’hui vendredi, avec les représentants de la Fédération Internationale de l’Automobile (la FIA), pour éviter de devoir déposer une réclamation à l’issue de la course - seul moyen pour une écurie de contester les voitures d’autres équipes.

Le «marsouinage» apparait au vocabulaire

Voilà un problème que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître: l’effet de sol a été inventé par le patron d’écurie britannique Colin Chapman en 1976.

Il a lancé le concept avec la Lotus 78, finalement apparue en course début 1977 - une voiture tellement supérieure qu’elle a failli remporter le championnat dès ses débuts, avant que la Lotus 79 ne permette à Mario Andretti de devenir champion du monde l’année suivante, en 1978.

Début 1980, toutes les équipes avaient copié le concept de l’effet de sol, et devaient se battre tant bien que mal contre l’effet de «pompage» des monoplaces: l’effet de succion vers le sol créé par le fond des voitures était tellement puissant en ligne droite que les voitures «descendaient» sur leurs suspensions, avant de remonter brutalement et de recommencer le mouvement.

Plus aucun ingénieur ayant travaillé à l’époque n’étant encore en fonction de nos jours, tout le monde avait joyeusement oublié le phénomène. D’autant que celui-ci n’apparaît pas dans les simulateurs utilisés par les écuries, ni dans les souffleries - il est même impossible à reproduire en simulateur, tant il s’agit d’une singularité aérodynamique liée au roulage sur la piste.

Lorsque les monoplaces 2022 ont donc été posées pour la première fois sur le circuit de Barcelone, mi-février, le problème est apparu comme le nez d’une F1 au milieu de sa carrosserie. En ligne droite, les monoplaces ne cessaient de se secouer de haut en bas.

Pour certains, l’effet était simplement désagréable «on se croirait dans un avion pendant des turbulences», commentait Charles Leclerc chez Ferrari. Mais pour d’autres, c’était un désastre: «Ça entraîne de très violentes secousses», confie Esteban Ocon, chez Alpine. «C’est comme si on se cognait la tête sur la table, ça fait mal et ça trouble la vision. C’est à tel point que je n’arrive plus à voir les zones de freinage à la fin des lignes droites.»

Un problème que tous les ingénieurs se sont immédiatement attelé à réduire, voir supprimer. Avec un succès jusqu’ici mitigé.

Comme le terme utilisé dans les années ’80 (le «pompage») a été jugé «disgracieux», on parle désormais de «marsouinage» pour évoquer ces machines qui ne cessent de plonger vers avant de se relever en ligne droite. À chacun son vocabulaire…

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