Football: Au FC Sion, les joueurs ont enfin compris qu’il leur fallait travailler (dur)  

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FootballAu FC Sion, les joueurs ont enfin compris qu’il leur fallait travailler (dur)

Avec 7 points en 3 matches, le club valaisan surfe sur une dynamique positive. En instaurant une nouvelle méthode, David Bettoni a aussi imposé une discipline plus exigeante qui commence à porter ses fruits. 

Nicolas Jacquier
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Nicolas Jacquier

Chaque entraîneur s’efforce de transmettre ce qu’il est, dans l’idée d’associer un groupe à un projet. Cela est valable aussi bien en Espagne ou en France, qu’au FC Sion ou à Trifouillis-les-Oies. Pour connaître le degré d’adhésion d’une équipe à son nouveau guide, les premiers jours s’avèrent souvent décisifs. La greffe peut ne jamais prendre. C’est probablement ce qui s’est passé avec Fabio Celestini, dont la méthode autant que le discours trop lettré n’a jamais rencontré son auditoire.

Et voilà qu’a débarqué à la Porte d’Octodure David Bettoni, surtout connu pour avoir été l’adjoint de Zinédine Zidane au Real Madrid et, à ce titre, soulevé trois Coupes d’Europe des champions dans l’ombre du coach des Merengues. Depuis son arrivée en Valais, le successeur du Vaudois a très vite marqué son territoire. «Les gars en sont tous amoureux, ils n’ont jamais connu ça», nous glissait un proche du FC Sion avant le déplacement au bord de la Limmat.

Au FC Sion, David Bettoni, ici lors de son premier entraînement à Riddes, a instauré un nouveau climat de travail. Et de nouvelles exigences…

Au FC Sion, David Bettoni, ici lors de son premier entraînement à Riddes, a instauré un nouveau climat de travail. Et de nouvelles exigences…

Pascal Muller/freshfocus

Mine de rien, et sans avoir l’air d’y toucher, Bettoni, en alternant confiance, respect et douce fermeté, a surtout réussi à instaurer une nouvelle méthode de travail dans un groupe qui traînait ostensiblement les pieds, car rechignant à se faire violence jusque-là. On le sent très proche de ses joueurs, faisant corps avec eux. Avec 7 points pris en 3 matches (soit la meilleure série de la saison), les résultats sont en train de lui donner raison. Cela ne signifie pas pour autant que Sion est hors de danger après son succès dominical 3-1 face à GC, tant s’en faut, mais démontre déjà que ceux qui le représentent en défendant ses couleurs ont dorénavant compris le message. Or un groupe qui suit son guide parce qu’il croit en lui, c’est déjà un bon bout de chemin effectué. Et autant d’ennuis en moins, en principe.

Les trois enseignements

Quand Mario Balotelli fait la moue, ce qui est souvent arrivé, Sion a pu ressentir le désagréable sentiment d’évoluer à dix. Mais dès lors que son capitaine de route se décide à jouer, c’est une tout autre chanson. On a vu tout ce qu’un «Ballot» concerné et plus affûté – sans doute les effets de la cure de remise en forme que lui a imposée son président – pouvait (lui) offrir.

Au Letzigrund, Mario Balotelli, félicité ici par Kevin Bua, a montré le chemin à suivre aux Valaisans.

Au Letzigrund, Mario Balotelli, félicité ici par Kevin Bua, a montré le chemin à suivre aux Valaisans.

Marc Schumacher/freshfocus

Chaque but du No 45 coûte, malgré tout, toujours très cher mais quand la classe s’exprime en une fraction de seconde comme ce fut le cas dimanche au Letzigrund, cela atténue déjà l’investissement de départ. Un Super Mario à Tourbillon, voilà qui pimenterait d’autant la fin de saison!

Nombreux sont ceux qui l’affirment: la vie quotidienne a changé à Riddes. Nouveaux entraînements, nouvelle discipline – y en avait-il seulement une avant? –, nouvelles exigences, nouvelle direction d’acteurs avec une hiérarchie bousculée et des éléments relancés, parfois sortis des oubliettes à l’instar de Bua. Témoin de cette métamorphose aussi bienvenue que spectaculaire, Reto Ziegler confirme que le contexte, plus épanouissant parce que moins pesant, n’est plus le même. «À l’entraînement, confiait le défenseur peu après le coup de sifflet final, on revoit des sourires. Il y a de moins en moins de joueurs qui baissent la tête. On a retrouvé le plaisir d’aller au boulot. On sent une énergie positive.» Avant de lâcher cet aveu révélateur de l’apport de son nouvel entraîneur: «Sion ressemble à nouveau à une équipe.» Pas question de s’emballer au demeurant: tout demeure infiniment fragile.

En Valais, le technicien français peut-il s’imposer comme le nouveau Peter Zeidler? Personne n’a oublié les envolées conquérantes du FC Sion estampillé Zeidler à l’automne 2016. Dans un registre pour le moment très différent, le Français apporte une même grinta décomplexée. Il a aussi redistribué les cartes, quitte à écarter quelques présumés cadres pour lancer des jeunes. Après une flopée d’entraîneurs ne lui ayant rien apporté, et si Sion tenait enfin là une «bonne pioche»? Comme Zeidler avant lui, Bettoni a déjà expérimenté les joies du vélo dans la plaine du Rhône.

La lutte finale

Autant le titre, promis à YB, est joué depuis longtemps, autant la lutte pour échapper à la place de barragiste (10e) pourrait s’avérer indécise jusqu’à l’ultime journée. On a d’abord faussement pensé que cette bataille allait se circonscrire en un duel fratricide entre Winterthour et Sion. Mais tandis que les Lions de la Schützenwiese ne lâchent rien comme en témoignent les trois points qu’ils sont allés chercher à Saint-Gall – s’imposer là-bas demeure un exploit –, Grasshopper et surtout Zurich sont loin d’être tirés d’affaire. Au moment où les derniers de classe se rebiffent et que l’on assiste à un resserrement du classement par le bas, on pourrait même encore impliquer Bâle et Saint-Gall dans une lutte finale qui, à ce rythme, pourrait bientôt concerner tout le monde sauf le champion!

Le meilleur (à Sion)

Au Letzigrund, Giovanni Sio peut jubiler, il vient d’inscrire son huitième but de la saison, quelques secondes après le retour des vestiaires

Au Letzigrund, Giovanni Sio peut jubiler, il vient d’inscrire son huitième but de la saison, quelques secondes après le retour des vestiaires

Marc Schumacher/freshfocus

Si un homme devait incarner la (tardive) prise de conscience valaisanne, ce serait Giovanni Sio. Le bonhomme ne fait certes pas tout juste mais on peut compter sur son flair à sentir les bons coups et surtout à les transformer. Mine de rien, alors qu’il a longtemps été cantonné au rôle ingrat de joker, Sio a signé à Zurich sa huitième réussite de l’exercice. À 34 ans, l’attaquant ne se contente pas de jouer les utilités et de courir le cacheton. Quand il ne s’investit pas lui-même, il conseille, replace, encourage. Normal qu’à sa sortie, Balotelli lui ait transmis le brassard de capitaine, brassard cédé un peu plus tard à Ziegler lors du remplacement du No 13.

Le moins bon (à GC)

L’arbitre, M. Kanagasingam, montre le rouge et la direction des vestiaires à Shabani, dont le geste, pénalisant les siens, a constitué l’un des tournants du match.

L’arbitre, M. Kanagasingam, montre le rouge et la direction des vestiaires à Shabani, dont le geste, pénalisant les siens, a constitué l’un des tournants du match.

Marc Schumacher/freshfocus

Non seulement Meritan Shabani a manqué une énorme occasion de convertir en but ce qu’était alors la très nette domination zurichoise mais en regagnant prématurément, penaud et tête basse les vestiaires, le milieu de terrain allemand a commis l’irréparable en condamnant GC à évoluer en infériorité pendant près d’une heure. Ce ne sont pas les Valaisans qui allaient se plaindre d’un carton rouge (39e) pas loin d’être providentiel. «L’expulsion nous a bien arrangés», convenait d’ailleurs assez justement Ludovic Pollet. Entre Bettoni, installé dans la tribune de presse en raison de sa suspension, et le banc valaisan, le téléphone a chauffé.

La décla’

«L’être humain est ainsi fait. C’est quand tout devient facile qu’il faudrait être plus rigoureux.»

Ludovic Pollet, évoquant l’incompréhensible relâchement du FC Sion alors que celui-ci menait 2-0 tout en évoluant à 11 contre 10.

Le retour

Celui, en l’occurrence hautement symbolique, de Yassin Fortune, 24 ans et pas mal de galères derrière lui. Disparu des écrans radars après ses prêts successifs à Angers et à Cholet, le talentueux attaquant français n’appartenait plus au cadre de la première équipe du FC Sion (où son casier avait même été vidé). Alors qu’il se retrouvait sans contrat, il a fallu l’arrivée d’abord puis l’intervention du nouveau coach pour relancer un jeune homme pour lequel Arsenal n’avait pas hésité à sortir plusieurs millions de francs à l’époque. Au Letzigrund, Fortune n’a disputé qu’une poignée de secondes mais on pouvait voir dans sa tardive entrée en jeu la valeur d’une renaissance. Sa dernière apparition sous le maillot valaisan remontait au 5 juillet 2020.

Une question pour penser à l’avenir

Ziegler suspendu pour le rendez-vous du Cornaredo de dimanche, Bettoni relancera-t-il Saintini dans l’axe contre Lugano ou choisira-t-il plutôt de remettre Cavaré au centre de sa défense, ce qui pourrait profiter à Lavanchy?

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