DrameLes taxis sous le choc après l’accident mortel de Bienne
La cliente écrasée, samedi soir, par le taxi qu’elle venait de quitter se déplaçait avec des béquilles, quand elle est tombée devant le véhicule.
![Vincent Donzé](https://media.lematin.ch/4/image/2023/10/25/751d7ea0-c3b6-4a27-8383-dcc473c55bb5.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=crop&w=400&h=400&rect=0%2C0%2C2048%2C1536&fp-x=0.5&fp-y=0.5&crop=focalpoint&s=5391b0d5c1ef3f2e4412468145cfbd47)
Comment la cliente d’un taxi biennois a-t-elle pu se faire écraser par la voiture qu’elle venait de quitter, samedi soir à 18 h 15? «Oh mon Dieu, quelle horreur! C’est quasi impossible en marche avant: on voit les ombres dans le faisceau des phares», dit un chauffeur.
Dans une ville où Uber ne travaille pas, la conductrice a déposé sa cliente habituelle devant chez elle, dans une boucle à sens unique. Pour tenter de comprendre cet accident, lematin.ch a pris un taxi pour la rue Gottfried-Reimann, dans le quartier de Mâche, dimanche à la même heure. Et là, dans cette zone résidentielle composée de blocs locatifs, tout indique que de nuit, le taxi a démarré en marche avant après avoir déposé sa cliente.
Sens unique
Pour regagner son appartement du rez-de-chaussée en passant par un chemin goudronné, au pied d’un candélabre, Maria est passée non pas derrière, mais devant la voiture, lorsqu’elle est tombée pour une raison que la police ne connaît pas. «Le sol n’était ni gelé ni même givré», dit une voisine.
Après des jours de brouillard, Bienne a vécu samedi une journée ensoleillée. Si elle n’a pas glissé, la femme handicapée s’est peut-être encoublée en s’éloignant. Mais une question taraudait hier le chauffeur qui nous emmenait sur place: sa passagère ayant subitement disparu de son champ de vision après sa descente du taxi, pourquoi la conductrice ne s’en est-elle pas étonnée?
Autre chose
«Distraite, elle devait faire autre chose en même temps», suggère notre taxi. Un autre est perplexe: «Les personnes à mobilité réduite, on les accompagne souvent jusque devant leur porte», dit-il.
Samedi soir, les secouristes dépêchés à la rue Gottfried-Reimann n’ont pu que constater le décès de la femme coincée sous l’avant du taxi. En état de choc, des voisins ne gardent qu’un souvenir diffus de l’accident. Même la couleur du taxi leur a échappé, après être restés pourtant une bonne heure sur place.
À la station de taxis de la gare, la plupart des chauffeurs n’étaient pas informés, hier soir. À l’annonce du drame, tous étaient abasourdis: «C’est affreux pour le chauffeur», disait l’un. «Juste avant Noël, c’est une catastrophe», disait l’autre. «Des personnes qui peinent à marcher, on en transporte beaucoup», confiait un troisième. Selon ses voisines, la victime de samedi n’avait de loin pas 60 ans.
Chair de poule
«J’en ai la chair de poule. Je ne suis pas prêt à ça», souffle le taxi qui nous conduit. «C’est là! Il était certainement en train de manœuvrer», lance-t-il en voyant un marquage blanc sur le bitume. Notre chauffeur veut croire à la version de la marche arrière: «Elle est peut-être tombée à l’arrière du véhicule. Ce n’est pas possible que le taxi avance…».
Sur son balcon, une riveraine glace notre chauffeur: «Le taxi avançait! La conductrice n’a pas remarqué que sa cliente était tombée par terre». Comment expliquer cette marche avant? «Peut-être a-t-elle inscrit sa course sur son livre de courses avant de démarrer machinalement», suggère notre taxi.
«C’est tellement violent! Sa responsabilité n’est pas établie, mais après ça, tu es meurtri, tu ne peux plus continuer. Quelle horreur», conclut notre taxi sur le chemin de la gare. Ce matin, dans la corporation, il y aura beaucoup d’interrogations, mais surtout beaucoup de tristesse et de pensées pour une collègue «super gentille».