Hermanos Gutiérrez: «Tourner aux Etats-Unis était une expérience folle»

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InterviewHermanos Gutiérrez: «Tourner aux Etats-Unis était une expérience folle»

Les deux frères Alejandro et Stephan, qui sont nés et ont grandi en Suisse, vivent leur rêve américain depuis un an avec leurs sonorités western. Rencontre au Montreux Jazz Festival.

Laurent Flückiger
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Laurent Flückiger

En septembre prochain, deux frères de Zurich pourraient décrocher une prestigieuse récompense musicale américaine grâce à leurs morceaux évoquant la nature sauvage des déserts de l’Ouest. C’est Alejandro et Stephan, soit les Hermanos Gutiérrez, qui vivent ce truc de dingue. Ils sont nés d’une mère équatorienne et d’un père suisse. Leur dernier disque, «El Bueno Y El Malo», sorti en automne dernier, est nommé par l’Americana Music Association dans la catégorie «Album de l’année 2023».

Samedi, les frangins ont joué au Lab avant Tamino dans un silence religieux et un public conquis qui fermait probablement les yeux pour imaginer les panoramas qu’inspirent leurs morceaux. En fin d’après-midi, nous avons retrouvé l’aîné Stephan et Alejandro, de huit ans son cadet, en backstage pour parler de cette nomination, de leurs concerts aux États-Unis et de moustaches.

Quelle a été votre réaction quand vous avez su que votre album était nommé à une prestigieuse récompense américaine?

Alejandro Nous avons été très surpris car, pour être honnêtes, nous n’avions jamais entendu parler de cette récompense. Mais c’est assez populaire. Et elle vient de Nashville. C’était donc un grand honneur pour nous d’être nommés à cet endroit.

Ces derniers mois, vous avez fait plusieurs dates aux États-Unis. C’est un rêve qui se réalisait?

Stephan: Oui, c’est un rêve qui se réalisait. Nous avons fait une grande tournée américaine en novembre dernier, de presque quatre semaines, et c’était une expérience folle. Nous avons fait la connaissance de beaucoup de gens sympas. Ils nous ont montré tellement respect, nous ont offert tellement de soutien et d’amour. C’était comme notre deuxième maison. Nous venons de rentrer la semaine dernière de deux semaines supplémentaires passées aux États-Unis. Nous avons beaucoup aimé la côte est, New York, Miami et le Canada. Et c’était impressionnant de voir la connexion qu’il y a avec les gens et ce que notre musique leur fait à l’étranger.

En général, vous jouiez devant combien de personnes?

A.: Entre 800 et 1200. C’est à New York qu’il y avait le plus de monde. On a aussi fait un double concert à Montréal, un premier à 18 h et un second à 21 h. Et les deux ont affiché complet. C’était dingue! On a aussi joué au Mexique, c’était cool. Adrian Quesada des Black Pumas était avec nous. Nous nous sommes également produits au Festival de jazz de Monterey, l’année dernière. Dan Auerbach des Black Keys était avec nous. C’était une expérience unique.

Dan Auerbach, moitié des Black Keys, a d’ailleurs produit votre dernier album. Comment l’avez-vous convaincu?

S.: C’est lui qui nous a convaincus. Non, je plaisante! Cela s’est fait de manager à manager. Et Dan a regardé l’une de nos vidéos pendant dix ou quinze secondes seulement, puis il a fermé son ordinateur et a dit: «Passons-leur un coup de fil.» Nous avons eu un appel d’une heure et quart avec lui, et il était clair que nous voulions travailler ensemble. C’était le gars parfait pour nous. Il a tellement de respect pour notre musique. Il n’a jamais voulu changer quoi que ce soit: il a voulu que notre musique atteigne un autre niveau. Sans lui, nous ne serions pas forcément là où nous sommes aujourd’hui.

Ce n’est pas la première fois que vous jouez à Montreux. Quelle est votre histoire avec ce festival?

S.: Nous sommes nés et avons grandi en Suisse, et se produire au Montreux Jazz a toujours été un but en soi. C’est un beau festival, on s’y sent comme en vacances. Il y a quatorze ans, nous sommes allés pour la première fois à Montreux. C’était pour le concert d’Oscar D’León. On était au premier rang, et je lui ai serré la main. Aujourd’hui, sur le trajet pour venir ici, nous parlions de ça. Maintenant c’est nous qui y jouons, c’est un honneur, après y être déjà venus il y a deux ans sur la scène du lac.

«Notre grand-père nous a beaucoup inspirés en nous disant que si nous voulions faire de la musique, nous devrions le faire avec des sentiments»

Alejandro et Stephan Guttiérez

Qui vous a initiés à la musique?

S.: C’est venu de nos voyages en Équateur durant l’enfance. Là-bas, on y entend de la musique tout le temps, dans la voiture, dans les rues, c’est tellement bruyant. C’est pourquoi, dès notre enfance, nous avons toujours été liés à la musique. J’ai commencé à jouer de la guitare à 10 ou 11 ans. Mais que de l’harmonie classique. À l’adolescence, on a commencé à écouter plus de choses.

A.: J’ai commencé à jouer de la guitare parce qu’il en jouait. Alejandro est parti pendant un an en Équateur, et c’était une façon de recréer l’atmosphère qu’il y avait à la maison. Dans mon cas, c’est donc un mélange entre voyager avec notre mère et entendre mon frère jouer de la guitare, une guitare qui était celle de notre père. C’est comme si ça venait de la famille, à travers les deux parties.

S.: Notre grand-père était un grand amateur de boléros. Son artiste préféré était Julio Jaramillo. Je me souviens qu’il nous a mis la chanson «Nuestro juramento» et qu’il s’est mis à pleurer parce qu’il était tellement ému par les paroles et le début de la mélodie. C’est la première fois que j’ai vu que la musique peut vraiment vous toucher si vous ne vous contentez pas de l’écouter. On peut aussi la ressentir. Notre grand-père nous a beaucoup inspirés en nous disant que si nous voulions faire de la musique, nous devrions le faire avec des sentiments.

Vous avez de belles moustaches, des chapeaux, des chemises de cow-boy. Vous aimez cultiver un certain style?

A.: Bien sûr. Je pense que les visuels et l’image de marque sont importants, c’est ainsi que l’on peut entrer en contact avec un certain public. Nous sommes très attachés à ce genre de choses.

S.: C’est drôle, dans une interview il y a deux mois, quelqu’un nous a demandés qui était notre styliste. On n’en a pas, c’est juste la façon dont nous aimons nous habiller. Nous avons le même style et les mêmes goûts. Parfois, on se demande l’un à l’autre ce qu’on va porter le soir en concert. Si un porte du noir, l’autre va porter du blanc. Mais la plupart du temps nous n’en parlons pas, et c’est toujours assorti.

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