Adoption, passage en force ou échec?: Réforme des retraites en France: tout doit se jouer aujourd’hui au Parlement 

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Adoption, passage en force ou échec?Réforme des retraites en France: tout doit se jouer aujourd’hui au Parlement

Journée à très haut risque pour le gouvernement français d’Elisabeth Borne, qui doit décider jeudi sa stratégie pour faire adopter son impopulaire réforme des retraites. 

La première ministre française Elisabeth Borne à l’Assemblée nationale, le 14 mars 2023.

La première ministre française Elisabeth Borne à l’Assemblée nationale, le 14 mars 2023. 

AFP

Aller au vote au risque d’un rejet de l’impopulaire réforme des retraites par le Parlement, ou dégainer une arme constitutionnelle vue comme un passage en force: le gouvernement français se trouve jeudi face à un choix cornélien.

Adoption définitive 

Le Sénat français, dominé par la droite, devrait adopter sans encombre une seconde fois dans la matinée le très contesté projet de réforme, objet mercredi d’un accord lors d’une commission mixte entre élus des deux chambres du Parlement. Puis ce sera au tour de l’Assemblée nationale de se prononcer dans l’après-midi, après un baroud d’honneur des oppositions via une motion de rejet préalable.

Si la Première ministre Elisabeth Borne juge avoir une majorité certaine sur le texte, grâce aux voix de suffisamment de députés Les Républicains (LR, droite), elle demandera le vote. «On est raisonnablement allant», glisse une source gouvernementale, qui table sur l’effet d’entraînement du compromis trouvé entre la droite et les partisans d’Emmanuel Macron (centre). Un feu vert de l’Assemblée vaudrait adoption définitive par le Parlement, ce qui validerait sa stratégie de compromis et la conforterait à son poste de cheffe du gouvernement.

La gauche prépare cependant un recours auprès du Conseil constitutionnel, ce qui retardera la promulgation du texte, même si le cœur de la réforme, le recul de l’âge légal de départ de 62 à 64 ans, ne devrait pas être modifié. Les oppositions disposent d’autres cartouches comme le dépôt d’une motion de censure, ce qui aurait cependant peu de chances d’aboutir et pourrait apparaître comme une deuxième défaite.

Au forceps grâce à l’arme constitutionnelle 

Si elle craint trop de défections chez les élus LR voire dans le camp présidentiel, ou une marge trop faible, la cheffe du gouvernement peut avec Emmanuel Macron décider de déclencher l’article 49.3 de la Constitution permettant d’adopter un texte sans vote au Parlement.

«Jusqu’au dernier moment il y aura une incertitude, et on verra quelle décision il faut prendre», selon une source gouvernementale. Afin d’autoriser ce 49.3, une réunion exceptionnelle du Conseil des ministres pourra se tenir juste avant la séance de 15h à l’Assemblée. Elisabeth Borne a usé déjà à dix reprises du 49.3 à l’automne sur les budgets. 

Mais la procédure n’est pas sans danger. La cheffe du gouvernement s’exposerait à des motions de censure de l’alliance de gauche Nupes et du Rassemblement national (RN, extrême droite), qui pourraient être débattues durant le week-end ou en début de semaine prochaine. Leur rejet scellerait l’adoption définitive de la réforme.

Mais les votes risquent alors d’être serrés, certains élus de droite pouvant joindre leurs voix, voire signer une motion. «La Première ministre va sentir le vent du boulet», dit-on dans la majorité présidentielle, où l’on craint aussi que la capacité à mener des réformes à l’avenir soit grandement affaiblie. De plus, un recours au 49.3 risque de raviver la contestation dans la rue.

Le rejet, un désaveu 

La gauche, l’extrême droite et certains élus LR le souhaitent ardemment: que le projet de réforme soit mis aux voix à l’Assemblée et qu’il soit retoqué. «Tout le monde veut un moment de vérité» dans la majorité mais «oui, on peut perdre», dit un cadre du parti présidentiel Renaissance (centre).

La claque serait sévère pour l’ensemble du camp d’Emmanuel Macron, et spécialement Elisabeth Borne, qui s’escrime depuis des mois à trouver les voies de passage pour cette promesse de campagne du président français.

En théorie, le projet de réforme pourrait être à nouveau transmis et examiné entre Assemblée et Sénat, en vue de nouveaux votes d’ici au 26 mars, date couperet. Mais ce n’est pas l’option la plus probable, et le texte pourrait plutôt être retravaillé avec les partenaires sociaux, voire abandonné.

La Première ministre remettrait-elle sa démission? Emmanuel Macron pourrait-il être tenté de dissoudre l’Assemblée, afin qu’une majorité claire se dégage? Une nouvelle phase s’ouvrirait, lourde d’incertitudes pour le pouvoir. 

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(AFP)

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