Guerre en Ukraine  – Londres critiqué pour son inaction face aux flux douteux d’argent russe 

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Guerre en UkraineLondres critiqué pour son inaction face aux flux douteux d’argent russe

Inflexible face à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Boris Johnson se voit reprocher son inaction sur les flux d’argent russe douteux qui affluent depuis des années à Londres.

Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, le 23 février 2022.

Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, le 23 février 2022. 

REUTERS

Le Premier ministre britannique Boris Johnson promet une réponse «décisive» face à Moscou qu’il veut «frapper très fort»: le dirigeant conservateur fait preuve de fermeté depuis le début de la crise russo-ukrainienne, qui a débouché jeudi sur une offensive armée lancée par le président russe Vladimir Poutine. Dans le même temps, il se voit toutefois reprocher une approche trop timide face à l’argent russe d’origine douteuse qui infiltre les marchés financiers ou immobilier du Royaume-Uni, ou utilisé à des fins d’influence politique. 

«Londongrad»

Des milliardaires russes disposent d’importants avoirs et propriétés dans les quartiers huppés de Londres, parfois surnommé «Londongrad», et ONG comme responsables britanniques ont tiré la sonnette d’alarme. Certains comme Roman Abramovitch possèdent un club de football de Premier League (Chelsea), et leurs enfants fréquentent des écoles d’élite.

Mercredi, alors qu’il annonçait un renforcement de l’aide militaire britannique à Kiev et la préparation de nouvelles sanctions économiques contre Moscou, Boris Johnson signalait un autre report du très attendu projet de loi sur la criminalité économique, qui permettrait d’accroître la transparence sur l’actionnariat de sociétés britanniques détenues notamment par des oligarques russes. 

Traquer l'argent sale

«Nous devons stopper l’argent russe issu de la corruption à Londres et dans tout autre capitale financière», a-t-il déclaré au Parlement, insistant pour que New York, Paris et d’autres centres financiers participent à l’effort de sanctions. «Aucun pays ne fait plus que le Royaume-Uni pour s’attaquer à ce problème», a-t-il affirmé. 

Sanctions de Londres

Le Royaume-Uni a toutefois eu la main moins lourde que l’Union européenne en infligeant mardi un premier train de sanctions contre des intérêts russes dans le cadre de la crise russo-ukrainienne. Cinq banques et trois oligarques russes étaient ainsi dans le viseur britannique, alors que les Européens ont sanctionné 23 personnalités de premier plan, dont le ministre de la Défense, des banques et 351 députés. 

Tennis ou dîner 

Selon plusieurs études, le phénomène de «Londongrad» a été facilité par une abondante industrie de services incluant grandes banques, sociétés comptables, avocats, agents immobiliers et conseillers en relations publiques. Et le Parti conservateur de Boris Johnson, arrivé au pouvoir en 2019, a bénéficié des dons de riches donateurs, dont certains originaires de Russie.

«Il se peut que tout ce que ces gens veulent faire, c’est jouer au tennis avec Boris ou dîner avec lui», commente Thomas Mayne, expert sur la corruption en Russie et dans l’Asie centrale au centre de réflexion Chatham House, à propos des avantages pour lesquels certains de ces donateurs mettent la main au portefeuille. «Mais la question qui doit être posée est de savoir où se trouvent leurs vraies allégeances, et l’origine de leur argent», ajoute-t-il auprès de l’AFP. 

Fin des «visas en or»

Ce n’est que la semaine dernière que Londres a mis fin, pour raisons de sécurité, à ses «visas en or» réservés aux riches investisseurs, alors que les relations entre Londres et Moscou sont au plus bas depuis plusieurs années à la suite de l’empoisonnement sur le sol britannique d’ex-espions russes. Bénéficiaires de cette politique accommodante, un ancien membre du gouvernement de Poutine, Vladimir Chernukhin, et sa femme Lyubov, sont devenus depuis citoyens britanniques. 

Parti conservateur éclaboussé

Cette dernière a versé plus de 2 millions de livres sterling (environ 2,5 millions de francs) aux conservateurs depuis 2012, selon le journal «Sunday Times», afin de bénéficier d’un accès privilégié à Boris Johnson et d’autres personnalités de premier plan du gouvernement. «Comment les alliés peuvent-ils faire confiance au Premier ministre pour laver cet argent sale russe du Royaume-Uni quand il ne nettoie même pas son propre parti politique?», s’est interrogé Ian Blackford, chef de file du parti nationaliste écossais SNP à Westminster.

Les conservateurs assurent que ces dons répondent aux requis légaux, qu’ils sont déclarés en toute transparence et proviennent uniquement de citoyens britanniques ou de sociétés basées au Royaume-Uni.

(AFP)

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