FootballCommentaire: Young Boys est un champion au rabais
Les Bernois se sont assuré leur sixième titre en sept ans. Mais leur saison n’a rien de glorieuse.
- par
- Valentin Schnorhk
Young Boys est champion de Suisse 2023-24. On le dit vite. Et on pense à la suite. Il n’y a pas lieu d’en faire des tonnes, presque aucune leçon à tirer sur la marque que la formation bernoise laissera sur cette saison. Si ce n’est qu’elle participe de sa domination sur le football suisse, et qu’un sixième titre en sept ans ne peut pas être anecdotique non plus.
Très factuellement, très pragmatiquement, Young Boys n’a rien volé. Le total de points parle pour le club de la capitale. Mais on naviguera tout juste autour des deux unités par match. C’est faible. Pire que lors de chacun de ses précédents titres. Cela dit surtout que l’adversité n’a pas été au niveau pour saisir l’occasion qui se présentait: Lugano et Servette ont perdu le titre plus qu’YB ne l’a remporté.
C’est ce qu’il faut comprendre: YB est champion, parce que les autres l’ont naïvement laissé faire. Prenons les statistiques avancées: aux Expected Points, Servette (et même Saint-Gall) est devant. Young Boys a été plus clinique, c’est sans doute vrai. Il a eu plus de réussite pour faire tourner les matchs en sa faveur. Mais il n’a jamais montré assez pour revendiquer haut et fort ce titre.
En matière de jeu, on peut s’en prendre frontalement au futur champion. Dans le contenu produit, YB n’a jamais séduit. On connaissait l’identité bernoise, où l’intensité, le pressing, la supériorité physique, la capacité à étouffer l’adversaire et à aller très vite vers l’avant rendaient cette équipe presque injouable en Suisse.
Et cette saison? Un Young Boys au plan de jeu minimaliste, incapable de penser autrement son football qu’en adressant de longs ballons vers la surface ou de longs centres aériens, même si, parfois, certaines individualités (Ugrinic, Monteiro, Elia) ont donné un tantinet de bonheur à ceux qui voulaient voir un jeu un peu plus léché. L’observation tient aussi bien avec Raphaël Wicky, qu’avec Joël Magnin, qui a remplacé le premier pendant l’hiver.
On en vient à un autre point: la gestion de la saison et des trop nombreuses crises internes. La maison bernoise a vacillé. Elle n’avait pas habitué à ça. Difficile d’estimer que tout a été bien fait du côté de Christoph Spycher, Steve von Bergen et des autres décideurs.
La liste, non exhaustive, des «affaires»: Racioppi relégué sur le banc au profit de Von Ballmoos, parce que l’agent de celui-ci s’est fait entendre et que cela a entraîné des remous internes entre Wicky et sa direction; la gestion du cas Nsame, qui voulait rejoindre Servette et qui l’a fait savoir, alors que ses dirigeants n’ont pas voulu entrer en matière; la vente d’Amenda à l’hiver, tout en le gardant pendant six mois sans qu’il ne performe; les dissensions entre Wicky et ses supérieurs qui ont été notoires très tôt dans la saison. Entre autres. Tout cela n’était très digne du meilleur club du pays.
Bref, Young Boys est un champion de Suisse au rabais. Mais cela est plus gênant pour notre football que pour lui-même.