Eurovision: Jean-Marc Richard passe le micro

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EurovisionJean-Marc Richard: «Je serai en retrait, pas à la retraite»

L'animateur aura 65 ans en septembre prochain. Il arrête «La ligne de cœur» et commentera le concours de la chanson pour la dernière fois à Bâle.

Laurent Flückiger
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Laurent Flückiger
Le 17 mai, Jean-Marc Richard commentera sa 35e finale de l'Eurovision, dont 34 sur la RTS. Mais il reste au sein de la délégation suisse.

Le 17 mai, Jean-Marc Richard commentera sa 35e finale de l'Eurovision, dont 34 sur la RTS. Mais il reste au sein de la délégation suisse.

RTS/Anne KEARNEY

Jean-Marc Richard est un homme suroccupé: «La Ligne de cœur» tous les soirs, «Le Kiosque à musiques» tous les samedis, l'Eurovision dans une semaine et déjà les préparatifs pour la Fête fédérale de musique en 2026.  «Ça travaille en permanence chez moi, je pense constamment à ce que je vais faire et comment je vais le faire. Je dois être un peu hyperactif.»

Suroccupé et pourtant toujours disponible. Nous passons une bonne heure avec lui dans un établissement lausannois. Ce matin-là, il commande un thé noir. Il a arrêté le café il y a six ans. À ses débuts, quand il travaillait à Radio Acidule, il en buvait 25 tasses par jour. Après avoir commenté les matchs du LHC en soirée, il n'avait pas le temps de rentrer chez lui avant les matinales, explique-t-il.

Le 18 septembre prochain, qu'il le veuille ou non, Jean-Marc Richard, visage et voix connus de tous les Romands, aura 65 ans.

Jean-Marc Richard, en septembre, vous aurez l'âge de la retraite...

Oui, je serai un peu en retrait, pas à la retraite. Parce que je pense que quand on a acquis une certaine expérience, on peut encore apporter quelque chose. J'ai toujours dit que le jour où je serai «pensionné», je reviendrai à mes premières amours. Je n'ai jamais regretté les décisions que j'ai prises, mais le local me manque.

C'est-à-dire?

Il y a deux gros événements en 2026 et en 2027 que je vais garder: la fête fédérale des instruments à vent à Bienne, dont je fais partie du comité d'organisation pour la première fois, et la Fête fédérale de folklore à Fribourg. Je serai toujours à l'antenne de la RTS (ndlr.: en mandat extérieur), mais pas quotidiennement. Ce qui me permet de faire autre chose, dans une petite ou une grande radio, de faire le lien avec les gens. Mon grand rêve est de faire un talk-show avec les associations qui font des trucs incroyables.

Et l'Eurovision? Vous continuerez à le commenter? On rappelle que vous détenez le record d'antenne.

Quand j'ai arrêté «Les Zèbres», j'aurais pu continuer dix ans. «La ligne de cœur», je pourrais continuer dix ans (il arrête à la fin de l'année). Je n'ai jamais eu de lassitude pour rien. Pour l'Eurovision non plus, même si ça fera la 35e fois que je serai à l'antenne. J'avais dit un jour à Nicolas Tanner (le spécialiste qui le seconde): «Le jour où on gagne, je commente encore en Suisse et après, je laisse ma place.» Il pensait qu'on pouvait encore attendre un certain nombre d'années. (Il sourit.)

«L'Eurovision n'a jamais été ringard, il a toujours été décalé!»

Jean-Marc Richard

Je rappelle que pendant longtemps personne ne voulait commenter l'Eurovision et quand la Suisse n'allait pas en finale, les audiences, c'était la galère. On était resté croché sur cette image d'Eurovision ringard. Mais ça n'a jamais été ringard, ça a toujours été décalé! Alors, quand Nicolas est arrivé en 2007, ça m'a reboosté, je me suis dit qu'on pouvait arriver à convaincre les gens. Puis, au niveau suisse, des camps d'écriture ont été mis en place pour les artistes, tout un processus. À Bâle, c'est l'aboutissement de tout ça.

Vous garderez un pied dans la maison?

Oui. J'arrête les commentaires, mais je garde un rôle dans la délégation suisse. On a gagné, mais il va falloir continuer à travailler avec les artistes, continuer à essayer d'aller en finale. Je vais participer au choix des chansons, proposer des interprètes. On a réussi à glaner le public, mais on n'a pas encore tout à fait réussi à convaincre les artistes romands de participer à l'Eurovision.

Qui vous succédera au commentaire de l'Eurovision?

Il n'y a pas encore eu d'annonce officielle, mais ce sera quelqu'un de la radio, à l'interne. Victoria Turrian d'Option Musique commentera la finale avec Nicolas et moi. C'est peut-être l'occasion pour elle de voir si ça lui plaît ou pas... Elle serait très bien pour reprendre.

Quel est votre meilleur souvenir de l'Eurovision?

En 1993, on est à Millstreet, en Irlande, 1700 habitants, dans un manège réaménagé pour l'occasion. C'était un trou perdu: l'hôtel était à 40 kilomètres, il n'y avait aucune effervescence. Rien. Et je m'assieds sur les escaliers. Le matin, je m'étais fait deux sandwiches au saumon et il y a un mec qui vient à côté de moi, il commence à baragouiner en anglais, puis on se met à parler en français. Je lui propose de partager mes sandwiches. C'était Patrick Fiori. Ce climat, un peu confidentiel, c'était l'Eurovision. Un autre moment, tellement fort, c'est durant la guerre des Balkans. La Bosnie est sous les bombes, mais la délégation est là. Sans chef d'orchestre. Quand la personne qui doit annoncer les votes depuis Sarajevo apparaît à l'écran, toute la salle se lève. Je crois que c'est la seule fois que j'ai pleuré à l'Eurovision.

«Mon pire souvenir est l'édition de l'an dernier, l'ambiance entre les artistes»

Jean-Marc Richard

Et votre pire souvenir?

L'ambiance entre les artistes, l'an dernier. Il y a ceux qui avaient pris position contre la présence d'Israël, même s'ils l'avaient fait avec une certaine finesse. Mais aussi l'exclusion de Joost (Klein, le candidat néerlandais), qui était une très grosse erreur. Dans les coulisses, il y avait une vraie tension. Cette année, tout le monde reste un peu en retrait.

D'après vous, comment s'annonce l'Eurovision cette année?

Je pense qu'à Bâle, ils ne se sont pas tout à fait rendu compte de ce que représente l'Eurovision. Donc c'est la folie absolue. Mais ils assurent. La Suisse, petit pays, a voulu montrer qu'elle était dans les records.

Comparé à l'édition à Lausanne, au Théâtre de Beaulieu, que vous aviez commenté pour la première fois pour Radio Acidule?

C'est tellement symbolique de ce qu'était devenu l'Eurovision dans les années 80. Le show de Beaulieu était décalé du monde de la musique, avec notamment cette longue introduction. Aujourd'hui, on perdrait la moitié des téléspectateurs. Mais c'était conçu et construit autour de ce qu'on savait faire à l'époque. Et, en Suisse, on aimait faire de la télévision peinarde, qui valorise le son, l'image. C'était la captation d'un spectacle de scène. Aujourd'hui, on fait un show TV. On est dans deux mondes différents. Mais je ne suis pas d'accord pour dire que c'était ringard.

Réédition de la Bible de l'Eurovision

En 2017, Jean-Marc Richard s'associait à Nicolas Tanner et Mary Clapasson pour publier «La saga Eurovision», aux Éditions Favre. Plus de 400 pages passionnantes sur le concours de la chanson, des anecdotes, des interviews, des photos. Bref: une Bible pour tout fan de l'événement.

Le 27 mai, paraîtra une réédition de 1956 jusqu'à nos jours. «Lugano, Lausanne et Bâle, on aura les trois régions linguistiques», se réjouit Jean-Marc Richard, qui écrira les toutes dernières pages du bouquin avec ses coauteurs durant la 69e édition.

La couverture de la nouvelle édition, à paraître le 27 mai.

La couverture de la nouvelle édition, à paraître le 27 mai.

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