SessionLe Conseil des États balaie les mesures UDC pour faire baisser le prix de l’essence
Les sénateurs ont refusé à une large majorité lundi quatre motions UDC en ce sens lors d’un débat extraordinaire sur les mesures d’allègement en faveur de la population.
- par
- Christine Talos
Pas question de baisser le prix de l’essence pour venir en aide aux ménages touchés par la crise. Le Conseil des États a balayé à une très large majorité quatre motions UDC sur la question. Le parti avait demandé une session extraordinaire sur les moyens de soulager la classe moyenne. Il proposait notamment de réduire de 50% tous les impôts sur les huiles minérales, les carburants et les combustibles ou encore de relever à 6000 francs (au lieu de 3000) le montant des déductions pour les frais de déplacement des pendulaires.
Plusieurs centaines de francs en plus
«Les prix de l’essence et du diesel ont explosé. Un litre coûte aujourd’hui près de 2.40 francs», a souligné le sénateur Marco Chiesa (UDC/TI), également président du parti. De nombreuses personnes qui dépendent d’une voiture paient parfois plusieurs centaines de francs de plus pour leur mobilité. Cela concerne notamment les pendulaires, les ménages familiaux, la population rurale et l’artisanat, a-t-il relevé. Il relevait que 90 centimes par litre d’essence reviennent à l’État, en raison de différentes taxes. L’UDC demandait donc que la Confédération renonce temporairement à une partie de ces recettes. À limage de l’Allemagne, l’Italie ou la France.
«L’État ne peut pas protéger tout le monde, on ne vit pas dans une bulle protégée», s’est opposé Ruedi Noser (PLR/ZH). Et de rappeler que d’autres secteurs étaient touchés par l’inflation. «Va-t-il falloir des paquets d’aide pour tout le monde?» a-t-il lancé.
«Pas le temps de mettre la crise climatique entre parenthèses»
Pour les Verts, il faut aider les plus défavorisés. Mais les mesures UDC veulent arroser tout le monde, y compris ceux qui n’en ont pas besoin, a expliqué Adèle Thorens (Verts/VD). Or les personnes qui consomment le plus de carburant sont celles dont les revenus sont suffisamment hauts pour rouler dans des voitures lourdes et gourmandes en essence. «On va donc réduire les charges des ménages les plus aisés», a-t-elle insisté. Pas question en outre de favoriser l’industrie pétrolière au détriment du climat. «On n’a pas le temps de mettre la crise climatique entre parenthèses», a-t-elle insisté. Et de prôner d’autres mesures, comme accélérer la transition des vieux chauffages des bâtiments. «On pourrait aussi baisser la vitesse sur les autoroutes».
Pour le PS, réduire les prix de l’essence n’est pas la bonne solution non plus, d’autant que plus d’un quart de la population ne possède pas de voitures. Pour Carlo Sommaruga (PS/GE), président de l’ASLOCA, mieux vaudrait donner un coup de pouce aux locataires. En effet, les plus modestes consacrent déjà plus de 8% de leurs revenus aux charges de chauffage, a-t-il rappelé. Il vient d’ailleurs de déposer une motion pour leur venir en aide via une «allocation énergie annuelle». Une autre mesure efficace serait une aide directe, a poursuivi le Genevois. Et de rappeler le chèque fédéral (ndlr de 250 francs par adulte et 125 francs par enfant, sauf aux 20% des ménages les plus aisés) que le PS propose si l’inflation dépasse les 5%.
Faire face sur le long terme
Le grand argentier Ueli Maurer lui aussi refusait les motions UDC, son parti pourtant. «Nous avons une situation qui ne se terminera pas en quelques semaines ou mois. Nous devons y faire face sur le long terme.» Il n’est donc pas indiqué de prendre dès maintenant des mesures, selon lui. «Nous avons besoin d’une analyse globale, d’une vision d’ensemble, et nous devrons ensuite décider si quelque chose est nécessaire, et si oui, quoi», a-t-il expliqué. Et de conclure: «si l’État doit intervenir, il faudra qu’il se concentre sur les revenus les plus faibles».
Le sujet reviendra sur la table jeudi au National. Une session extraordinaire est également prévue sur le sujet.
Pas de mécanisme de régulation non plus
Dans la foulée, les sénateurs ont aussi refusé largement une motion de Charles Juillard (C/JU). Il demandait la création d’un mécanisme de régulation du prix des carburants et des combustibles en cas de crise. Il soulignait que la législation actuelle permet des allègements fiscaux pour les carburants utilisés dans l’agriculture, la sylviculture, la pêche ou le transport professionnel. Mais rien n’est prévu en cas de situation extraordinaire. Pour le Jurassien, la législation devait donc être révisée, ce qui aurait permis au Conseil fédéral de faire baisser immédiatement de 25 à 30 centimes le litre de carburant. En vain. Ueli Maurer a rétorqué que la Confédération n’avait pas besoin d’un tel mécanisme. «En avoir un inciterait à l’utiliser». En outre, Berne a prouvé, avec la pandémie, qu’il était possible d’agir rapidement si nécessaire.