GenèveTrois ans de prison pour viol requis contre Tariq Ramadan
Le procureur a tenté de démontrer mardi la culpabilité de l’islamologue suisse.
Syndrome de Stockholm, emprise, témoins indirects... le procureur genevois a tenté mardi de démontrer la culpabilité de Tariq Ramadan, jugé en appel pour des accusations de viol et contrainte sexuelle, dont il avait été acquitté il y a un an.
La plaignante, 58 ans, qui se fait appeler «Brigitte» pour se protéger des menaces, accuse l’islamologue suisse, 61 ans, de l’avoir soumise à des actes sexuels brutaux accompagnés de coups et d’insultes dans la chambre de l’hôtel genevois où il séjournait, la nuit du 28 octobre 2008.
Elle avait porté plainte dix ans après les faits.
Acquitté en 2023
Tariq Ramadan avait été acquitté le 24 mai 2023 par le Tribunal correctionnel de Genève, qui avait fait valoir l’absence de preuves, les témoignages contradictoires, y compris de psychiatres, et les «messages d’amour» envoyés par la plaignante après les faits.
Comme en première instance, le procureur genevois Adrian Holloway a réclamé, comme il l’avait annoncé à l’ouverture du procès lundi devant la chambre pénale d’appel et de révision du canton de Genève, une peine de trois ans de prison, dont la moitié ferme.
Date du jugement à établir
Le procès doit durer jusqu’à mercredi et le jugement sera rendu ultérieurement, à une date qui n’a pas encore été annoncée.
Les déclarations de la plaignante sont «constantes», a-t-il fait valoir. Et il y a les «témoins indirects»: quatre personnes à qui elle s’est confiée dans les jours suivants et une autre, environ un an plus tard.
Il s’est étonné aussi que le jugement de première instance ait balayé une «pierre angulaire» du dossier, à savoir les notes écrites par les deux psychiatres que «Brigitte» a consultés, le premier le lendemain de la nuit du 28 octobre, l’autre un mois après.
Pour le procureur, «ces notes fondent la culpabilité du prévenu».
Quant à la plaignante, «on peut (lui) reprocher de ne pas être allée tout de suite à l’hôpital ou voir un médecin... mais il n’en demeure pas moins qu’elle va voir un psychiatre dont les conclusions sont limpides: «viol», a-t-il fait observer.
Quant à savoir pourquoi elle décrit de manière imprécise les faits au moment de la plainte, en avril 2018, le procureur invoque la «dissociation dont elle souffrait», faisant encore référence aux notes des psychiatres.
Les messages d’amour «paradoxaux» qu’elle a envoyés à M. Ramadan par la suite, pendant un certain temps, ont aussi une explication selon le procureur: «le syndrome de Stockholm... comme une femme battue avec son mari».
«Avec cette nuit, on va passer de l’identification à l’emprise, après cela elle sera incapable de réagir, de digérer l’outrage. Elle s’applatit», assène-t-il. Cette «emprise» explique aussi, selon lui, qu’elle aura eu besoin de dix ans pour déposer plainte.
Le déclic? En 2017, «tout ressurgit quand une première plainte est déposée» en France contre l’intellectuel suisse, pour viol, explique le procureur, affirmant que la plaignante suisse «culpabilise» alors.
Quelques heures plus tôt, M. Ramadan avait lui reçu le soutien de son épouse, Iman, venue témoigner à la barre qu’elle reste «convaincue» de son innocence.