Énergies fossilesAlbert Rösti face aux juristes: centrales de réserve en sursis
Pour assurer la sécurité d’approvisionnement, le conseiller fédéral veut construire de nouvelles centrales. Un projet anticonstitutionnel, selon l’Office fédéral de la justice.
Afin de garantir la sécurité de l’approvisionnement en énergie, Albert Rösti prévoit de construire des centrales fossiles de réserve capables de fournir 400 mégawatts en cas d’urgence. Car les contrats avec les centrales de réserve existantes à Monthey (VS) et Birr (AG) échoient en 2026. Le chef du Département de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC), a même déjà lancé l'appel d'offres de plusieurs millions de francs pour ces centrales. Mais sans disposer d'une base légale propre pour leur exploitation, rapporte la «NZZ am Sonntag».
Projet anticonstitutionnel
Parallèlement à l'appel d'offres, le DETEC a aussi mis en route un projet de loi pour pouvoir financer et exploiter les centrales d'urgence à l'avenir. Des juristes de l’Office fédéral de la justice (OFJ) jugent aussi le projet comme étant anticonstitutionnel. Car selon la Constitution fédérale, «la Confédération ne peut ni exploiter elle-même des installations de production d'électricité, ni mettre au concours ou mandater la construction de nouvelles installations de production», écrit l’Office dans une prise de position consultée par le journal dominical.
Albert Rösti n'aurait pas encore répondu à ces objections. Mais, dans un procès-verbal de séance confidentiel d’avril dernier, le Bernois a déclaré que «le Conseil fédéral dans son ensemble ne partage pas l'avis de l'OFJ». Cela parce que «la garantie de la sécurité de l'approvisionnement en électricité correspond à un mandat constitutionnel».
Plainte annoncée par la Grève du climat
Alors que des parlementaires s’interrogent sur ces projets (lire encadré), la Grève du climat menace de porter plainte: «Il n'existe aucune base juridique pour la construction de centrales à énergie fossile. On se sent confirmé par l'évaluation de l'Office fédéral de la justice et on s'opposera à la construction de ces centrales par tous les moyens juridiques et politiques», affirme Jonas Kampuš, membre du mouvement.
Doutes jusqu’au Parlement
Des élus doutent aussi de la nécessité de centrales fossiles de cette taille. Pour le conseiller national Martin Bäumle (PVL/ZH), «il n’y a quasi pas de scénario qui montre un fort risque de black-out» , et donc «pas de grande urgence» à construire de telles centrales. Selon Aline Trede (Verte/BE), l'OFJ ne formule pas ses réserves à la légère. Si Albert Rösti veut maintenir son projet, il devra l’adapter et trouver une voie acceptable. Même Christian Imark (UDC/SO), président de la Commission de l'environnement et de l'énergie du National, s’interroge: «S'il y a des critiques justifiées sur la procédure, nous devrons peut-être trouver une autre voie.» Cela même si à titre personnel, il estime ces centrales nécessaires.