France«L’Origine du monde» de Courbet tagué, une autre œuvre volée
Le tableau, prêté au Centre Pompidou-Metz, était protégé par une vitre.
Un «acte criminel» perpétré par des «fanatiques féministes» pour certains, une action artistique pour d’autres: le tableau «L’Origine du monde» de Courbet (1866) a été tagué à la peinture rouge lundi au Centre Pompidou-Metz (est) et une autre œuvre a été dérobée.
L’œuvre de Courbet, qui représente un sexe féminin, était «protégée par une vitre», a précisé à l’AFP la direction de la communication du musée, indiquant que la police était sur place en fin d’après-midi pour procéder à des analyses.
Cette «action», organisée par l’artiste performeuse franco-luxembourgeoise Deborah de Robertis, était baptisée «On ne sépare pas la femme de l’artiste».
Deux femmes ont tagué «MeToo» sur «L’Origine du monde» ainsi que sur une œuvre de Valie Export, a précisé Mme de Robertis à l’AFP.
Au total, cinq œuvres seraient concernées, selon un message posté sur X (ex-Twitter) par la ministre française de la Culture Rachida Dati.
«Aux «activistes» qui pensent que l’art ne serait pas assez puissant pour porter un message par lui-même, il faut le redire: une œuvre n’est pas une pancarte qu’on pourrait colorier avec le message du jour, a-t-elle écrit. Nous continuerons à protéger les œuvres contre les nouveaux iconoclastes.»
«Geste de réappropriation»
Deux jeunes femmes, nées en 1986 et 1993 et sans antécédents judiciaires, ont été placées en garde à vue en début d’après-midi, a indiqué à l’AFP le procureur de la République de Metz, Yves Badorc.
L’enquête confiée au service interdépartemental de police judiciaire de Metz a été ouverte de deux chefs: «dégradation ou détérioration de biens culturels commis en réunion» et «vol d’un bien culturel en réunion», a précisé le magistrat.
Une troisième personne, qui n’a pas été interpellée, pourrait être à l’origine du vol d’une œuvre, selon M. Badorc.
L’oeuvre volée, une broderie rouge sur tissu d’Annette Messager, est baptisée «Je pense donc je suce».
Sollicitée sur ce point par l’AFP, Mme de Robertis a confirmé un «geste de réappropriation».
Le maire LR (Les Républicains, droite) de Metz, François Grosdidier, s’est dit «indigné et choqué» par la tentative de dégradation du tableau de Courbet, évoquant un «acte criminel contre une œuvre majeure de notre patrimoine par des militantes se revendiquant du mouvement #MeToo».
«Je condamne avec la plus grande vigueur ce nouvel attentat contre la culture, produit cette fois par des fanatiques féministes», a-t-il poursuivi, espérant que «les auteurs de cet acte seront sévèrement condamnés».
Exposée à proximité
Peint en 1866, «L’Origine du monde» est entré dans les collections du musée d’Orsay en 1995.
Sa commande à Courbet est attribuée à un diplomate ottoman, Khalil-Bey, figure flamboyante du Tout-Paris des années 1860, et le modèle serait Constance Quéniaux, ancienne danseuse de l’Opéra de Paris.
L’œuvre, mondialement connue, a changé plusieurs fois de mains et son dernier propriétaire privé a été le psychanalyste français Jacques Lacan.
Une photo de Deborah de Robertis, baptisée «Miroir de l’Origine du monde» est par ailleurs exposée à proximité de «L’Origine du monde» dans le cadre de l’exposition du Centre Pompidou-Metz dédiée au psychanalyste. On voit l’artiste poser, le sexe nu, sous l’œuvre de Courbet, une performance réalisée le 29 mai 2014 au musée d’Orsay.
Vandalisme
Deborah de Robertis avait été condamnée en 2020 à 2000 euros d’amende pour s’être montrée nue en 2018 à l’occasion de l’une de ses prestations devant la grotte du sanctuaire de Lourdes (sud-ouest).
Elle a aussi été plusieurs fois relaxée après des actions similaires, notamment en 2017 après avoir montré son sexe au musée du Louvre devant «La Joconde», à Paris.
D’autres œuvres ont fait l’objet d’actes de vandalisme ou de tentative de dégradations ces derniers temps. Samedi, deux militants du collectif Riposte alimentaire, qui défend une alimentation durable pour tous, ont été interpellés après avoir jeté de la poudre orange dans la galerie des glaces du Château de Versailles.
Ce collectif (anciennement Dernière rénovation) a déjà revendiqué un jet de soupe sur la vitre qui protège «La Joconde» au Louvre en janvier, puis sur un tableau de Claude Monet, «Le Printemps», en février au musée des Beaux-Arts de Lyon.