Europe de l'EstLa Russie frappe le rail ukrainien
Outre de vouloir «paralyser» les approvisionnements militaires, «il s’agit là de mesures classiques avant une offensive», indique un haut responsable ukrainien.
La Russie a intensifié ses frappes sur le réseau ferroviaire ukrainien pour «paralyser» les approvisionnements militaires, notamment en matériels occidentaux, en vue d’une nouvelle offensive, a déclaré vendredi un haut responsable sécuritaire ukrainien.
L’infrastructure ferroviaire est particulièrement vitale en Ukraine, aussi bien pour le transport passager et le commerce que pour l’armée, car depuis le début de l’invasion russe en février 2022, tout le trafic aérien y est paralysé.
«Il s’agit là de mesures classiques avant une offensive», a déclaré sous couvert d’anonymat une source haut placée dans le système sécuritaire ukrainien interrogée par l’AFP sur ces attaques. Le but «est de paralyser les livraisons, le transport des cargaisons militaires», a-t-elle ajouté.
Le réseau des chemins de fer était régulièrement visé par des bombardements russes ces deux dernières années. Des frappes ont notamment visé des gares à l’instar de celle de Kramatorsk, dans l’Est, où des dizaines de personnes, essentiellement des civils tentant de fuir les combats, avaient été tués en avril 2022.
Mais ces dernières semaines, une recrudescence des bombardements ciblant les infrastructures ferroviaires a été constatée. Dans la seule journée de jeudi, des frappes ont touché des infrastructures ferroviaires dans trois régions ukrainiennes.
Dans la région de Donetsk (est), divisée par la ligne de front, trois employés de la société de chemins de fer, Ukrzaliznytsia, ont été tués dans une attaque contre un site ferroviaire. Le même jour, dix civils ont été blessées dans une frappe de missile contre la gare de Balaklia, dans la région de Kharkiv (nord-est), et des infrastructures ont été endommagées à Smila (région de Tcherkassy, centre).
Un bombardement massif contre des sites ferroviaires à Dnipro et sa région (centre-est) avait tué une employée de chemins de fer et en avait blessé sept autres le 19 avril. Une semaine plus tôt, la gare de Soumy (nord) avait été légèrement touchée par une frappe à Soumy (nord-est).
L’armée russe a quant à elle revendiqué vendredi avoir frappé un «train avec des armements occidentaux et des équipements militaires» dans la localité d’Oudachné, dans la région de Donetsk ainsi que des «troupes et équipements» militaires à Balaklia.
Si elle n’a pas donné de dates, ces affirmations semblent correspondre aux frappes évoquées la veille par les autorités ukrainiennes.
Depuis mars, la Russie a multiplié les frappes visant les infrastructures ukrainiennes, notamment le réseau électrique et plus récemment ferroviaire.
Selon Kiev, Moscou prépare une nouvelle offensive d’ampleur pour tenter d’élargir la zone sous contrôle russe. La Russie a notamment détruit une multitude de sites énergétiques, entraînant des coupures de courant majeures, en particulier dans le nord-est.
Les frappes sur les chemins de fer interviennent en outre au moment où les États-Unis ont, après des mois de paralysie à cause de rivalités politiques internes, repris leur aide militaire à l’Ukraine.
Les armements occidentaux donnés à l’Ukraine, notamment des munitions pour l’artillerie et la défense, sont livrés dans le plus grand secret depuis les pays voisins, en particulier la Pologne.
Le chef du transport passager d’Ukrzaliznytsia, Oleksandr Pertsovsky a indiqué jeudi à l’AFP avoir constaté «une hausse des attaques sur l’infrastructure ferroviaire».
«Nous constatons que les frappes visent la logistique ferroviaire, et touchent essentiellement des sites civils», a-t-il dit. «Ils mènent des frappes de manière aveugle sur des gares, c’est une manière très primitive de faire».
Affaiblie par une contre-offensive infructueuse à l’été 2023 et la paralysie des mois durant de l’aide militaire américaine, les forces ukrainiennes, en manque d’hommes et de munitions, sont sous pression sur une large partie du front, notamment dans l’Est.
Période «très difficile»
Et la situation devrait empirer autour de la mi-mai et début juin, qui sera une «période difficile», avait prévenu lundi le chef du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov. Une analyse partagé par des responsables occidentaux qui pronostiquent que les trois mois à venir vont être «très difficiles» pour les forces terrestres de Kiev.