Guerre en UkraineL'armée suisse veut encore plus d'argent et plus vite
La commission du Conseil des États veut un fonds spécial de 10 milliards de francs.
- par
- Eric Felley
Le dossier du financement de l'armée rebondit une fois de plus à Berne. La Commission de politique de sécurité du Conseil des États a communiqué jeudi un ensemble de décisions, qui vont dans le sens d'un financement plus rapide de la modernisation de l'armée suisse.
En premier lieu, la Commission revient sur une décision prise en décembre dernier par les Chambres fédérales, qui avait provoqué indirectement un problème de liquidités dans le ménage de l'armée. Le Parlement avait adopté l’arrêté fédéral sur le plafond des dépenses de l’armée pour la période 2025 à 2028. Celui-ci stipulait que son budget devait atteindre le 1% du PIB du pays et cet objectif devait être atteint pour 2030.
Or, dans le contexte tendu des finances fédérales, le Parlement avait repoussé cette date à 2035, notamment grâce au vote du Centre. Aujourd'hui, la commission des États propose que les Chambres se prononcent à nouveau sur cette question et reviennent à l'objectif de 2030 pour un montant total de 29,8 milliards.
Un fonds hybride pour l'armée et l'Ukraine
La commission du Conseil des États fait également une proposition inédite, soutenue par le Centre et la gauche, visant à doter l'armée de moyens supplémentaires. Elle demande au Conseil fédéral de créer «un fonds temporaire régi par une loi spéciale et permettant de financer l’ensemble des besoins financiers supplémentaires à partir de 2025 de 10,1 milliards de francs pour la mise à niveau de l’armement de l’armée jusqu’en 2030».
L'originalité de cette démarche est que dans cette opération figure également une contribution suisse de 5 milliards de francs pour le soutien à la reconstruction de l'Ukraine. L'ensemble de ce fonds ne serait pas soumis au frein à l'endettement et serait autorisé à «s’endetter temporairement».
La majorité défend l'idée de ce fonds hybride: «Les deux problématiques ont en effet pour origine commune la dégradation de la situation sécuritaire en Europe à la suite de la guerre en Ukraine. De plus, une telle solution est à ses yeux la seule qui soit capable de trouver une majorité politique». Sous-entendu dans les deux Chambres.
Une minorité de la commission critique ce mélange des genres. Elle estime aussi que la situation sécuritaire en Europe, «si mauvaise soit-elle, ne justifie pas une comptabilisation extraordinaire de ces dépenses».
660 millions pour la défense sol-air
Enfin, la commission demande d'étoffer le programme d’armement 2024, par l’ajout d’un crédit d’engagement de 660 millions de francs pour l’achat de moyens de défense sol-air de moyenne portée. «La majorité est en effet d’avis qu’il est urgent, au vu de l’évolution de la situation internationale et des lacunes de l’armée dans ce domaine».