BruxellesUne réunion avec Zemmour, Orban ou Farage interdite et stoppée
Des autorités bruxelloises ont voulu mettre fin à une réunion de représentants nationalistes. Eric Zemmour a dénoncé une «dictature».
Les autorités bruxelloises ont ordonné mardi l’arrêt d’une réunion controversée de représentants de la droite nationaliste, dont le Français Eric Zemmour et le Britannique Nigel Farage, organisée à quelques semaines des élections européennes.
Une décision vivement dénoncée à l’intérieur de la salle, où plusieurs centaines de personnes dont de nombreux eurodéputés nationalistes et conservateurs eurosceptiques participaient depuis le matin au rassemblement.
«On est vraiment dans le registre du communisme à l’ancienne, en gros si tu n’es pas d’accord avec moi, tu dois être interdit», a fustigé Nigel Farage, champion du Brexit.
Après déjà deux déprogrammations ces derniers jours dans des lieux censés héberger l’événement, la «National Conservatism Conference» (NatCon) a été bannie dans une troisième salle, mardi à la mi-journée, dans la commune bruxelloise de Saint-Josse.
Le bourgmestre de Saint-Josse, Emir Kir, a annoncé sur Facebook avoir pris un arrêté d’interdiction «pour garantir la sécurité publique». «L’extrême droite n’est pas la bienvenue», a ajouté l’élu.
Cordon d'agents
Nigel Farage comptait, avec l’ancienne ministre britannique Suella Braverman, parmi les orateurs de la première des deux journées prévues pour cette réunion.
Devaient également monter à la tribune Eric Zemmour, président du parti Reconquête! et le Premier ministre hongrois Viktor Orban, annoncé comme tête d’affiche mercredi.
Vers 15h30, entouré de caméras, le polémiste français s’est présenté devant la porte de la salle de conférence, dont les policiers lui ont bloqué l’accès, avant de dénoncer une «dictature».
Un cordon d’agents des forces de l’ordre bloquait l’entrée, mais les autorités ont finalement renoncé à exiger le départ des participants déjà à l’intérieur.
Viktor Orban a déploré une atteinte à la liberté d’expression.
«La dernière fois qu’ils ont voulu me faire taire en envoyant la police, c’était en 1988 avec les Communistes», a réagi le dirigeant nationaliste hongrois sur X, en allusion à l’époque soviétique.
Une manifestation à l’appel d’un collectif d’associations baptisé «Coordination antifasciste de Belgique» était annoncée pour la fin de la journée devant la salle.
«Pris de court»
«Nous prenons toutes les mesures opérationnelles nécessaires pour éviter tout trouble à l’ordre public, sur la voie publique», a déclaré à l’AFP une porte-parole de la police locale.
La «NatCon» devait initialement être organisée dans une salle de réception du quartier européen située sur la commune de Bruxelles, mais l’idée a été abandonnée vendredi par les organisateurs après les réticences exprimées par le bourgmestre Philippe Close.
Une deuxième annulation a été annoncée lundi par la commune voisine d’Etterbeek, qui a fait valoir que l’hôtel Sofitel avait été mal informé de la nature de l’événement.
Emir Kir a dit avoir été «pris de court» lorsque la réunion a finalement été déplacée à Saint-Josse, non loin du quartier européen, par le think tank pro-Orban Mathias Corvinus Collegium (MCC), coorganisateur de l’événement.
«Inacceptable» pour le Premier ministre belge
Le Premier ministre belge Alexander De Croo a jugé mardi «inacceptable» l’interdiction à Bruxelles d’une réunion de la droite nationaliste, y voyant une atteinte à la liberté d’expression à quelques semaines des élections européennes.
«L’autonomie communale est une pierre angulaire de notre démocratie, mais ne peut jamais l’emporter sur la Constitution belge, qui garantit la liberté d’expression et de réunion pacifique depuis 1830», a souligné le dirigeant libéral, dans un message en anglais sur le réseau X.
Influence grandissante
À moins de deux mois du renouvellement du Parlement européen (par un vote dans les 27 pays membres prévu entre le 6 et le 9 juin), ce rassemblement nationaliste et eurosceptique intervient sur fond d’influence grandissante de cette famille politique dans de nombreux États européens.
Ces forces se partagent, au Parlement, en deux groupes politiques; d’un côté, les Conservateurs et réformistes européens (ECR) et de l’autre, Identité et démocratie (ID).
S’ils ont en commun le discours anti-immigration, les deux groupes sont traversés par des tensions liées notamment au positionnement face à Moscou dans la guerre en Ukraine.
Mais certains experts prédisent que l’un d’eux pourrait, au lendemain du 9 juin, ravir la place de 3e force politique du Parlement de Strasbourg derrière la droite pro-européenne (PPE) et les socialistes.