CommentairePrimes maladie: il est un peu court le Conseil fédéral
Deux mois avant le vote, le Gouvernement dit non aux initiatives. Mais cela ne suffira pas.
- par
- Eric Felley
Ce vendredi, Elisabeth Baume-Schneider a présenté la position du Conseil fédéral concernant les deux initiatives qui visent à réduire la charge des frais de santé sur les ménages helvétiques. L'une, socialiste, veut limiter les primes à 10 % du revenu. L'autre, du Centre, veut mettre un frein à la hausse des coûts avec un mécanisme lié à l'économie.
Lors des débats au Parlement, l'opposition du Conseil fédéral à ces deux propositions était connue. On est surpris ici de la précocité de sa prise de position, plus de deux mois avant la date des votations du 9 juin, alors que la campagne n'a pas vraiment commencé. Ce matin, on a senti la volonté d'Elisabeth Baume-Schneider de faire vite son travail, lisant la plupart du temps des notes bien préparées. Mais sans grande conviction.
L'impasse du système
Pour le Conseil fédéral, l'initiative sur les primes ne va pas, parce que ce sont les cantons qui devraient d'abord prendre leurs responsabilités, et elle n'aborde pas directement les coûts de la santé. Mais, justement, l'initiative sur les coûts ne va pas non plus, parce qu'elle veut réduire les coûts. Et ça, c'est mauvais pour le commerce.
Ce positionnement du Conseil fédéral résume tout à fait l'impasse dans laquelle se trouve le système de la santé en Suisse face à l'explosion des primes, qui accablent chaque année un peu plus les ménages de la classe moyenne. Le peuple est fatigué de ce double langage politique qui, d'un côté, promet de prendre les choses en main, et de l'autre, s'en montre incapable.
Tous les acteurs veulent de la croissance
Le frein à la hausse des coûts est probablement la meilleure piste, mais là, tous les acteurs de la santé s'en méfient. Qui va devoir freiner? Les hôpitaux, les généralistes, les pharmaciens, les physios, les psy, les labos, les assureurs-maladie, la recherche pharmaceutique, les vendeurs de seringues ou de hanches?
Tous ces secteurs économiques veulent de la croissance, donc il n'est pas question de ralentir la marche des affaires. Et puis, le Conseil fédéral donne les arguments qui vont avec: la population vieillissante consomme de plus en plus de soins, tandis que de nouveaux traitements sont prometteurs, même s'ils coûtent des montants astronomiques à six, voire sept chiffres par année.
Plus comme ça!
D'ici au 9 juin, la campagne sera pour le moins controversée, parce que dans la santé, chacun cherche à tirer la couverture à soi. Son chiffre d'affaires atteint aujourd'hui les 90 milliards de francs. À l'autre bout, les assurés et les patients paient le prix fort pour l'un des meilleurs systèmes de santé au monde, assurément l'un des plus chers.
Après le vote en faveur de la 13ᵉ rente AVS le 3 mars dernier, tout est possible. La population pourrait donner un nouveau signal contre le Conseil fédéral et la majorité du Parlement, en glissant un double oui dans les urnes le 9 juin pour dire: «Ça ne peut plus continuer comme ça!».