La Suisse est trop dure avec les militants du climat

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L'ONU critiqueLa Suisse est trop dure avec les militants du climat

Cinq Rapporteurs de l'ONU ont écrit au Conseil fédéral pour dénoncer des violences policières.

Eric Felley
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Eric Felley
La police zurichoise à l'œuvre lors de manifestations d'octobre 2021 par Extinction Rebellion.

La police zurichoise à l'œuvre lors de manifestations d'octobre 2021 par Extinction Rebellion.

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Ce mardi 2 avril, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme a rendu public un courrier adressé le 29 janvier dernier au Conseil fédéral. Il concerne le traitement judiciaire réservé en Suisse à des centaines de militants du climat, qui avaient manifesté à Zurich en juin 2020 et octobre 2021.

Pas moins de cinq Rapporteurs* des Nations-Unies se sont penchés sur ces événements et la façon dont les manifestants pacifistes ont été traités par la police et la justice. Et le résultat n'est pas tout à fait à l'honneur de la démocratie helvétique, qui a ratifié en 1992 le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Pacte II de l'ONU).

Opérations policières contestables

Les défenseurs des personnes, qui ont fait appel devant les instances onusiennes, ont communiqué ce mardi le contenu du courrier envoyé au Gouvernement helvétique. Celui-ci «met en question la proportionnalité des opérations policières et des poursuites à l'encontre de participants à des manifestations pour le climat à Zurich».

Les défenseurs rappellent que lors des rassemblements d'octobre 2021: «La police avait réagi avec un engagement massif, verrouillant les rues concernées pour interpeler l’ensemble des personnes présentes. Des dizaines de participants ont ainsi subi jusqu'à 48 heures de garde-à-vue, des fouilles à nu et des relevés d'ADN et/ou d'empreintes digitales. Les centaines de personnes identifiées ont ensuite été poursuivies par le Ministère Public pour contrainte. Ce délit, qui entraîne une inscription au casier judiciaire, n'avait encore jamais été reproché en Suisse à de simples manifestants».

Protéger les droits humains

Dans leur lettre au Conseil fédéral, les Rapporteurs* expriment leurs «préoccupations concernant des manquements aux obligations de protéger ces défenseurs des droits humains et de l'environnement au cours de rassemblements pacifiques». Ils critiquent aussi l'acharnement des autorités de poursuite en rappelant que «les magistrats du parquet doivent exercer leurs fonctions conformément à la loi, avec équité, de manière cohérente et diligente».

En attendant la réponse du Conseil fédéral

Le Conseil fédéral avait 60 jours pour répondre aux Rapporteurs de l'ONU, notamment aux deux points ci-dessous:

- Veuillez fournir des informations sur les fondements factuels et juridiques invoqués pour justifier l'arrestation, la détention, ainsi que le relevé d'empreintes digitales, le prélèvement des échantillons d'ADN et l'examen rectal. Expliquez comment ces mesures sont compatibles avec vos obligations internationales.

- Veuillez indiquer quelles mesures ont été prises pour que les individus ainsi que la société civile et les défenseurs des droits humains et de l'environnement surtout celles et ceux qui œuvrent par des moyens pacifiques pour la protection de l'environnement, puissent travailler dans un environnement favorable et mener leurs activités légitimes, notamment le droit de manifester pacifiquement, sans crainte de représailles, de harcèlement, ou de criminalisation de toute sorte.

Il n'existe pas, pour l'heure, de réponse connue du Conseil fédéral.

Un rappel bienvenu des règles

Pour Sabrina Huber, membre de l'équipe juridique qui a coordonné l'appel aux Rapporteurs* de l'ONU, cette lettre «est un rappel bienvenu des règles établies pour protéger la société civile et garantir sa participation dans les processus politiques. Avec cette lettre, les Rapporteurs rappellent aux autorités fédérales et cantonales leur responsabilité dans la préservation d'une société démocratique et ouverte».

Pour Me Stephanie Motz, l'avocate zurichoise qui a rédigé la requête: «Cette lettre montre que, du point de vue des droits de l'homme, il est extrêmement problématique de poursuivre pénalement des manifestants pacifiques. Les Rapporteurs spéciaux mettent également l'accent sur les excès de la police lors des arrestations, qui ont violé les droits constitutionnels et humains. Les procédures pénales engagées contre des manifestants qui, rappelons-le, défendent l'avenir de tous et non des intérêts particuliers, doivent être abandonnées».

Les Rapporteurs de l'ONU

*Les cinq coauteurs du rapport envoyé le 29 janvier au Conseil fédéral sont:

  • David R. Boyd Rapporteur spécial chargé d'examiner la question des obligations relatives aux droits de l'homme se rapportant aux moyens de bénéficier d'un environnement sûr, propre, sain et durable

  • Irene Khan Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression

  • Clément Nyaletsossi Voule Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d'association

  • Mary Lawlor Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme

  • Margaret Satterthwaite Rapporteuse spéciale sur l'indépendance des juges et des avocats

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