FranceMacron avec des gants de boxe: un cliché qui s’installe chez les politiques français
L'image du président français en train de cogner fait beaucoup causer. Mais ce style de photo n'est pas nouveau, chez nos voisins.
La mode chez les politiques français semble désormais de se faire photographier avec des gants de boxe, en posture de combat, et le président Emmanuel Macron en fait la preuve au risque d’être accusé de puiser dans les «codes virilistes», comme son homologue russe Vladimir Poutine.
Sur Instagram, sa photographe officielle Soazig de La Moissonnière a publié mercredi des photos très commentées du président en noir et blanc, les muscles saillants, s’attaquant avec vigueur à un sac de frappe.
Des photos qui suivent celles de l’ex-ministre de la Santé et ancien porte-parole du gouvernement Olivier Véran, qui racontait au «Figaro» sa nouvelle vie de député et de médecin les gants aux poings, dans une salle d’entraînement.
Mais le boxeur politique le plus connu des Français reste l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, qui ne manque pas de rappeler sa passion pour la discipline.
En 2016, alors maire du Havre, il étale sa passion pour le noble art dans un documentaire, «Edouard, mon pote de droite», qui a contribué à sa notoriété nationale.
Propulsé un an plus tard chef du gouvernement, où son prédécesseur socialiste Manuel Valls s’était aussi épris de ce sport et l’avait fait savoir, M. Philippe disait avoir appris de la boxe anglaise «ce qu’(il faisait) aujourd’hui, en maîtrisant l’angoisse qu’on peut avoir face à des situations angoissantes.»
«La boxe est assez compatible avec l’exercice de la force de l’Etat», analyse auprès de l’AFP le spécialiste de la communication politique Philippe Moreau-Chevrolet. «C’est un sport violent, mais avec des règles, comme la politique. C’est aussi l’image très théâtralisée, comme c’est souvent le cas avec Emmanuel Macron, du héros qui bat la souffrance.»
Poutine, Trudeau
«Emmanuel Macron est un technocrate qui s’essaye au style populiste, en essayant de répondre à Vladimir Poutine sur son terrain», poursuit Philippe Moreau-Chevrolet. La communication politique du président russe repose pour beaucoup sur ces clichés où on le voit exercer sa force physique dans plusieurs domaines sportifs, notamment en boxe.
Sur le réseau social X, la députée écologiste Sandrine Rousseau s’est agacée des photographies du président: «Ces codes virilistes utilisés jusqu’à l’overdose. Quelle misère du politique. Quelle défaite du progressisme. Et quelle indigence de la communication politique».
Chez les femmes politiques, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France et ancienne candidate de droite à la présidence, a été la première à chausser les gants, en pleine campagne des élections régionales en 2015, photographiée pendant son entraînement.
«Mon équipe ne voulait pas, elle jugeait que cela faisait trop violent. Moi je n’étais pas d’accord. Même si c’est vécu comme un sport original pour une femme, cela donne une image de combattante», admettait-elle.
Elle a été suivie par Rachida Dati, aujourd’hui ministre de la Culture, dont le coach louait en 2021 son «vrai mental de boxeur» qui «ne lâche pas».
Outre-Atlantique, le combat remporté en 2012 par Justin Trudeau sur un député conservateur lors d’une rencontre caritative avait, selon certains experts, contribué à son image et à son accession au poste de Premier ministre du Canada en 2015.
Communication politique
«Cette utilisation du sport à des fins de communication politique n’est pas nouvelle, rappelle Michaël Attali, historien du sport à l’université Rennes-II, qui rappelle que Valéry Giscard d’Estaing, président de 1974 à 1981, s’est souvent mis en scène en train de skier ou sur un terrain de football. Loin du ring toutefois.
En 1988, l’ex-chef de l’extrême droite Jean-Marie Le Pen posait déjà dans sa résidence proche de Paris, torse nu et gants aux poings, le regard rieur.
L’attrait des politiques pour la boxe rejoint celui du grand public: de 26.000 adhérents à la Fédération française en 2021, ils sont passés à plus de 60.000 en 2023. Et l’image de ce sport dont les grands champions étaient issus des classes populaire (Carpentier, Cerdan, Bénichou, Mormeck...) s’est aussi transformée, devenant de plus en plus prisée des classes aisées, à mesure que les salles ont fleuri à Paris et dans les grandes villes.