Les gérants d’un bar russe incarcérés pour «extrémisme» LGBT+

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OuralLes gérants d’un bar russe incarcérés pour «extrémisme» LGBT+

Le directeur artistique et l’administrateur de l'établissement risquent jusqu’à dix ans de prison.

Un tribunal Russe, ici à Moscou.

Un tribunal Russe, ici à Moscou.

AFP

Les gérants d’un bar en Russie ont été placés mercredi en détention provisoire pour «extrémisme» LGBT+ et risquent jusqu’à dix ans de prison, une première affaire pénale pour ce motif en pleine répression des minorités sexuelles.

«Il s’agit de la première affaire pénale de ce type en Russie après la décision de la Cour suprême de classer (sous l’étiquette) extrémiste le mouvement LGBT», s’est félicitée Ekaterina Mizoulina, une militante défendant les «valeurs traditionnelles» prônées par Vladimir Poutine.

Famille et religion

Le président russe, qui vient d’être reconduit à la tête de son pays pour six ans, promeut de longue date «la famille» et la religion face à un Occident décrit comme «décadent», voire «sataniste».

Et depuis l’attaque de grande ampleur contre l’Ukraine, déclenchée fin février 2022, les autorités russes répriment parallèlement de plus en plus fortement les minorités sexuelles.

En novembre 2023, dans ce contexte, la Cour suprême russe a banni le «mouvement international LGBT» pour «extrémisme», une formulation floue mais ouvrant la porte à de lourdes peines de prison.

Descentes et intimidations

Les descentes de police et les intimidations dans des bars et des clubs ouverts aux LGBT+ se sont par la suite multipliées en Russie, ces dernières semaines, après cette décision de la Cour suprême.

C’est sur la base de cette interdiction qu’un tribunal d’Orenbourg a placé mercredi en détention provisoire pour deux mois le directeur artistique et l’administratrice du bar «Pose», dans cette même ville de l’Oural.

Selon l’accusation, citée dans un communiqué du tribunal, ces «personnes ayant une orientation sexuelle non traditionnelle, (...) soutiennent également les opinions et les activités de l’association publique internationale LGBT interdite dans notre pays».

Ils risquent jusqu’à dix ans de prison, d’après les autorités.

Descente musclée

Le 9 mars, des policiers ont effectué en pleine nuit une descente dans le bar «Pose», a affirmé le média indépendant Mediazona, qui a relayé une vidéo de la scène montrant des personnes allongées sur le sol, face contre terre, les mains sur la tête, entourées de policiers.

Sur les réseaux sociaux, cet établissement d’Orenbourg, près de la frontière avec le Kazakhstan, dit accueillir «une programmation avec des spectacles», sans donner plus de détails.

Mardi, évoquant cette affaire, la cheffe de la branche russe de l’ONG Amnesty International, Natalia Zviaguina, a dénoncé l’ouverture en Russie de «la première enquête pour "extrémisme"» en lien avec la communauté LGBT+.

«Ce que les personnes LGBTI et les défenseurs des droits humains craignaient depuis la fin de l’année dernière s’est finalement concrétisé», a-t-elle déploré dans un communiqué.

Droits radicalement limités

Ces dernières années, les droits des minorités sexuelles ont été radicalement limités sous l’impulsion de Vladimir Poutine, qui, avec l’Église orthodoxe, assure vouloir éliminer de la sphère publique des comportements jugés importés d’Occident.

Plusieurs Russes ont été condamnés ces dernières semaines à des amendes pour avoir par exemple mis en ligne des photos comportant des drapeaux arc-en-ciel ou encore, dans le cas de deux femmes, d’avoir diffusé en ligne une vidéo de leur baiser.

Depuis 2013, une loi en Russie interdit la «propagande» de «relations sexuelles non traditionnelles» à l’adresse des mineurs.

Dans la foulée d’un tour de vis général dans la société après l’assaut russe contre l’Ukraine, cette législation a été considérablement élargie fin 2022 pour interdire désormais toute forme de «propagande» LGBT+ dans les médias, sur internet, dans les livres et dans les films.

En juillet 2023, les députés russes avaient également voté une loi interdisant notamment aux personnes transgenres les opérations chirurgicales et les thérapies hormonales.

(AFP)

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