France«Bébé secoué»: un père et un grand-père devant la justice
Les deux hommes étaient les seuls présents le soir de la mort du nourrisson. Ils nient toutes violences ou négligences. Que s'est-il vraiment passé?
Qui a infligé des violences fatales à la petite Louna, décédée en mars 2017 à Paris, à l’âge de deux mois, du syndrome du «bébé secoué»? Pour les enquêteurs, le coupable est soit son père, soit son grand-père, mais les deux hommes, dont le procès s’est ouvert lundi, nient toute violence ou maladresse.
Sébastien D., 35 ans, et son père Didier D., 61 ans – qui hébergeait chez lui le couple et le nourrisson – sont les seuls adultes à avoir gardé seuls Louna dans la soirée du 27 février 2017. Ils comparaissent libres devant la cour d’assises de Paris pour violences par ascendant sur mineur de 15 ans ayant entraîné la mort sans intention de la donner, et encourent 30 ans de réclusion.
C’est la mère, Sandrine R. – partie civile au procès – qui avait appelé les secours ce soir-là, peu avant 23H00, constatant l’état préoccupant de sa fille alors qu’elle venait de rentrer du travail.
Hospitalisée en urgence, Louna souffrait notamment d’une fracture du crâne et d’un hématome sous-dural. Des lésions typiques du «syndrome du bébé secoué», selon les experts. Elle est morte à l’hôpital après six jours de coma.
Ce 27 février, le bébé avait été gardé en fin d’après-midi et en soirée par son père, en l’absence de tout autre adulte. D’après les deux parents, le grand-père a également passé quelques minutes seul avec Louna ce même soir, peu de temps avant que la mère ne s’inquiète et donne l’alerte.
«L’un de vous deux fait une erreur»
Le père, décrit comme un «papa poule» par la mère, semblait «sous le choc» lors de son arrivée aux urgences, selon le personnel médical. A l’inverse, le grand-père, d’un tempérament colérique voire violent selon son ex-compagne, aurait tenté de dissuader les parents d’appeler les secours.
Pour une enquêtrice de la brigade des mineurs, interrogée par la cour, il est peu probable que les accusés puissent avoir participé tous les deux aux violences. «Je pense qu’au moment où ça se passe, le coupable est seul avec Louna», a-t-elle souligné.
Mais les aveux, dans de tels cas, sont extrêmement difficiles à formuler pour les auteurs, car ils «entraînent un effondrement total de la famille», selon elle.
Dans les dossiers de «bébés secoués», a-t-elle poursuivi, les violences émanent souvent d’un adulte fatigué et excédé par les pleurs de l’enfant. Or Louna, selon tous les témoignages recueillis, était une enfant très calme.
Ou parfois, a souligné la policière entendue à la barre, l’enfant victime n’est «pas particulièrement difficile à garder», mais est confronté à un adulte violent. Or Louna semblait une enfant «choyée et câlinée».
Lundi après-midi, ni la mère, ni le père, ni le grand-père n’ont pu retenir leurs larmes lorsque la cour a diffusé l’enregistrement de l’appel aux pompiers, où on entend les pleurs du bébé.
La présidente tend une perche aux accusés: «Si j’entendais les cris de ma fille agonisante, ça me donnerait peut-être un peu de courage pour parler. N’importe qui réagirait après ça».
Mais père et grand-père maintiennent leurs dénégations. «L’un de vous deux fait une monumentale erreur, plus au niveau humain que pénal», soupire la magistrate.
L’interrogatoire sur les faits est prévu mercredi, et le verdict est attendu vendredi.