Élections européennesLe parti d’extrême droite RN est largement favori en France
Dimanche à Marseille, Jordan Bardella a lancé le coup d'envoi de sa campagne lors d'un meeting géant.
À cent jours des élections européennes, le parti d’extrême droite Rassemblement national (RN) est donné largement favori en France, emmené par sa jeune tête de liste Jordan Bardella, qui a donné dimanche le coup d’envoi de sa campagne.
Jordan Bardella, 28 ans, a choisi la deuxième ville de France, Marseille (sud-est), pour son premier meeting géant.
«Ce que nos dirigeants et l’Union européenne ont provoqué main dans la main, c’est le grand effacement de la France», a-t-il fustigé devant 5 000 personnes.
«Un grand effacement qui se traduit par le recul de la France chez elle mais également en Europe et dans le monde, par le délabrement de l’Etat, par la dislocation du pays», a-t-il poursuivi, en visant «le grand effaceur, Emmanuel Macron».
La figure de l’extrême droite en France, Marine Le Pen, avait ouvert le meeting après une longue déambulation avec le candidat dans la salle, sous une musique assourdissante et une nuée de drapeaux bleu-blanc-rouge.
Elle a fustigé le «cynisme» du président français, «en état de siège» et «qui croit pouvoir trouver le salut politique dans des postures guerrières qui ont stupéfié les Français», en allusion à ses récents propos sur l’envoi possible de troupes en Ukraine.
Le RN est en tête de tous les sondages, crédité de 28% à 30% des suffrages pour le scrutin du 9 juin.
«Parler vrai»
Arrivé en tête des élections européennes de 2019 avec 23,34% des voix, Jordan Bardella a ensuite méthodiquement investi le paysage politique et médiatique, porté par ses talents de débatteur.
Il s’est imposé comme la carte jeune du RN, grâce notamment à sa stratégie TikTok.
«Il a un parcours inspirant: il vient d’un milieu défavorisé, (...) il ne parle pas comme les bourgeois», souligne Louison, 17 ans, venue de Fresnes, en région parisienne.
«Il a une aisance, un franc parler, un parler vrai: il remet les gens à leur place», décrypte de son côté Lucas, 22 ans qui ne souhaitait pas également donner son patronyme.
Le scrutin du 9 juin doit parachever l’ascension fulgurante de Jordan Bardella, avec une double condition: »arriver en tête et avec un score supérieur à celui de 2019», résume l’un de ses proches.
Une ambition que les sondeurs et les experts jugent raisonnable.
«Il n’y pas d’autre option que la victoire», a martelé dimanche Jordan Bardella, en affirmant que le 9 juin devait être le «jour un de l’alternance».
«Nationaliser» le scrutin
Les stratèges du RN s’autorisent, en privé, à viser la barre des 30% et espèrent surclasser d’au moins dix points le parti du président Macron, avec lequel ils avaient fait jeu quasi-égal en 2019.
En assumant de «nationaliser» le scrutin pour en faire des «élections de mi-mandat» contre l’exécutif, ces européennes doivent être le marche-pied à une quatrième candidature de Marine Le Pen à la présidentielle de 2027.
Selon l’institut de sondages BVA, un tiers des Français entend utiliser son bulletin de vote aux européennes pour «exprimer (son) opposition à la politique actuelle».
Mais certains s’inquiètent d’un statut de favori qui pourrait démobiliser l’électorat – un talon d’Achille historique du RN, qui l’avait notamment empêché de remporter la moindre région aux élections régionales de 2021, au mépris des pronostics.
Le meeting marseillais est l’occasion d’éprouver un nouveau slogan : «La France revient», sous-titré «L’Europe revit», clin d’œil à la formule de Ronald Reagan «America is back».
Jordan Bardella a déjà dévoilé jeudi une «stratégie tricolore» – comme les feux de circulation – faisant le tri entre les politiques communautaires qu’il «approuve» (en vert, par exemple Erasmus), celles pour lesquels il réclame de «nouvelles conditions» (orange, comme pour Schengen) et des «lignes rouges», notamment l’immigration.
Mais il l’assure : «Pas de «Frexit», ni public, ni caché», se disant non pas «contre l’Europe», mais «contre l’Union européenne».
L’un de ses concurrents, l’eurodéputé Raphaël Glucksmann, qui porte la liste socialiste, lui a répondu dimanche en qualifiant les membres du RN de «patriotes de pacotille (...) au service de Vladimir Poutine».
Quelque 600 manifestants ont défilé dimanche à Marseille pour «marquer leur opposition» au RN.