Conflit Israël-Hamas«Parasites!»: la colère monte contre les ultra-orthodoxes
En pleine guerre et à l’heure de la mobilisation générale, la colère monte contre les ultra-orthodoxes, protégés de Benjamin Netanyahu qui refusent d’envoyer leurs enfants à l’armée pour ne pas y perdre leur «pureté» religieuse.
Le sujet a pris de l’ampleur après plusieurs manifestations ces derniers jours et secoue la fragile coalition du premier ministre Benjamin Netanyahu, sommé d’agir au nom de «l’équité sociale» dans le pays. «Bande de feignasses!», «Parasites!»: dans le centre de Jérusalem, quelques jeunes Israéliens se sont lâchés lundi face à un petit groupe d’une vingtaine d’ultra-orthodoxes en tenue traditionnelle venus narguer leur manifestation en priant, dansant et chantant à tue-tête: «Plutôt mourir que d’aller à l’armée!»
A une vingtaine de mètres de là, près d’un millier de personnes, drapeaux israéliens en main, étaient rassemblées pour exiger du gouvernement qu’il oblige «enfin» les haredim («Ceux qui craignent Dieu») à faire leur service militaire. Parmi eux, de nombreux soldats réservistes. Peu après le 7 octobre, Oren Shvill est ainsi venu retrouver son unité. «C’est comme ça, quand vous êtes un Israélien normal. Et toute la société doit contribuer», assène-t-il.
C’est au moment de la création de l’Etat d’Israël que les haredim étudiant à plein temps dans les yeshivot (instituts d’études talmudiques) ont été exemptés de service militaire. A l’époque, il s’agissait de permettre à une élite de 400 jeunes de préserver le monde des études des textes sacrés en grande partie décimé pendant la Shoah.
«Trouver un accord»
Mais les haredim sont aujourd’hui 1,3 million. Et les effectifs gonflent: l’an dernier, 66'000 haredim âgés de 18 à 26 ans ont été exemptés de service militaire. La plupart des haredim réclament le maintien de cette exemption pour tous les étudiants, jugeant l’armée incompatible avec leur système de valeurs, où seule l’autorité de Dieu prévaut. Et Netanyahu est aux petits soins pour eux, les deux grands partis ultra-orthodoxes, Shas et Judaïsme unifié de la Torah, étant membres de son gouvernement qu’ils peuvent faire tomber à tout moment.
Le débat a rebondi avec le 7 octobre. Puis quand l’armée a annoncé vouloir, pour avoir plus de troupes à disposition, allonger sa durée et celle de l’engagement des réservistes. Il a commencé cette semaine à secouer le gouvernement: mercredi, le ministre de la Défense, Yoav Gallant, a semblé défier son Premier ministre en annonçant une réforme du service militaire visant à inclure les haredim, et exigé que l’ensemble du gouvernement la soutienne. Netanyahu a alors annoncé son intention de «trouver un accord» pour intégrer les haredim dans l’armée, sans faire imploser la coalition et provoquer des élections «en pleine guerre» qui «bloqueraient tout», a-t-il souligné.
Pas un monde homogène
Les haredim vivent et se marient à l’intérieur de leurs communautés, craignent de voir leurs enfants perdre leur «pureté» religieuse et s’éloigner de leurs valeurs religieuses et traditionnelle en se confrontant au reste de la société à l’armée. Mais ce n’est pas un monde homogène: selon un chercheur en religions de Jérusalem, «20 à 30%» des haredim se sont rapprochés du reste de la société depuis 30 ans en travaillant en entreprise, via le service civil ou des activités sociales. Parmi eux, un peu plus d’un millier s’engagent dans l’armée chaque année, au risque d’être mis au ban de leurs communautés. Il y a eu plus de demandes après le 7 octobre, mais pas d’intégration massive.
L’armée ne se presse pas pour les enrôler. »Ce ne sont pas de bons combattants, et nous n’avons pas le temps, en pleine guerre, de prendre des mois pour former des gens sans éducation» autre que religieuse, glisse un ancien haut gradé. Nombre d’observateurs mettent en garde contre une obligation soudaine et générale, qui sera refusée et risque de mettre le feu au gouvernement ou aux bastions des haredim.