Jeu vidéo«Final Fantasy VII Rebirth»: faire un bon remake, «c’est très délicat»
Né en 1997, le jeu revient développé en trois parties. La deuxième sort le jeudi 29 février.
«C’est un mythe moderne» qui revient: comme Bartosz Glowacki, beaucoup de fans attendent de pied ferme la sortie jeudi de «Final Fantasy VII Rebirth», qui joue avec les limites du remake dans le jeu vidéo.
«Les communautés de gamers sont si enthousiastes, c’est de la folie. Moi-même, je suis tellement excité!», confie à l’AFP le Polonais de 38 ans. Comme tant d’autres, il a découvert la série Final Fantasy en 1997 avec son 7ᵉ opus, le premier à sortir en Europe et encore le plus populaire.
«Final Fantasy VII Rebirth» est le 2ᵉ volet de sa réadaptation en trilogie par l’éditeur Square Enix, qui a sorti le grand jeu dans les rues de la capitale japonaise, avec des écrans géants sur le carrefour hyper fréquenté de Shibuya diffusant des bouts du trailer, ainsi qu’un partenariat avec la Tokyo Tower.
Ce jeu de rôles (RPG) suit les pérégrinations de Cloud, Aerith, Tifa, Barret et Red XIII, membres d’un groupe écoterroriste s’opposant à la multinationale Shinra, qui pompe l’énergie de la planète, et au mystérieux Séphiroth.
De quoi plaire au public du XXIe siècle, une fois graphismes et gameplay dépoussiérés, assure Bartosz Glowacki: «C’est l’histoire du pouvoir absolu d’une entreprise qui ne se soucie pas de son impact écologique. C’est une histoire d’expériences scientifiques débridées menant à un désastre. C’est on ne peut plus actuel!»
Nostalgie et rentabilité
Mais adapter un titre qui s’est écoulé à 14,4 millions d’exemplaires n’est pas si simple, suscitant chez les joueurs des craintes de voir le monument dénaturé.
«Refaire le jeu original est une chose, mais refaire la version légendaire et fantasmée d’un jeu dont les gens pensent se souvenir en est une autre», met en garde Nicky Heijmen, chercheur spécialiste des jeux vidéo à l’Université des sciences appliquées d’Amsterdam.
Capitaliser sur la nostalgie
Resident Evil, Zelda, Pokemon... Ces dernières années, de nombreux studios se sont lancés dans des rééditions de titres anciens, simplement remis au goût du jour technologique ou complètement repensés. Ils capitalisent sur la «nostalgie forte» qu’exercent de vieux jeux sur «les enfants de l’époque qui gagnent aujourd’hui leur vie», explique Nicky Heijmen.
Ces fans très actifs en ligne permettent de faire «beaucoup moins de marketing», dont les frais représentent traditionnellement «a minima 45%» des coûts de production, affirme Anna Bressan, cofondatrice de Red Studio et secrétaire générale de Women In Games France.
La phase de recherche en pré-production est aussi «considérablement réduite», ajoute-t-elle, si bien que les remakes représentent «souvent un investissement rentable pour les studios».
Attachement émotionnel
Mais faire un bon remake, «c’est très délicat», estime Anna Bressan: il faut «trouver l’équilibre entre satisfaire les attentes des fans nostalgiques et apporter de nouvelles idées créatives».
Sur ce point, le premier volet sorti en 2020 avait surpris: au lieu de coller au scénario originel, les scénaristes avaient amené les héros à se battre contre leur propre «destin», bouleversant l’histoire originale.
Ça ne passe pas avec les purs et durs
«Ca ne passe pas avec certains fans purs et durs», admet Alexandre Pichon, joueur français de 37 ans, confronté à ce public via sa chaîne TikTok consacrée à la saga, FinalFantasyGeek, qui prévient qu'«il y aura des déçus».
Des réactions épidermiques proportionnelles au fort attachement émotionnel des joueurs. «Ma génération a grandi avec cet opus», rappelle-t-il. «Moi-même, c’est une histoire qui m’a forgé» par les «valeurs qu’elle m’a transmises», «même la musique du jeu me renvoie directement à des moments de ma vie!»
Meurt-elle ou pas?
Sur internet, où les fans semblent convaincus par la version d’essai mise en ligne avant la sortie, le débat se cristallise sur une question: les scénaristes conserveront-ils la mort d’un protagoniste clef? Pour beaucoup, cette scène émouvante constitue l’essence même du jeu.
Et perdre cette essence, c’est «non seulement risquer de voir le titre mal accueilli, mais aussi porter atteinte à l’héritage de la franchise», prévient Nicky Heijmen.
«Moi, j’espère être surpris par l’histoire et qu’ils prendront des risques», affirme Alexandre Pichon, «Le jeu, on a beau l’aimer, il ne nous appartient pas!»