BerneLa folle histoire du téléphone volé de Benjamin Roduit
Le Valaisan s'est fait subtiliser son portable à Berne. Il a fini en Algérie, après avoir passé par le Centre de Boudry.
- par
- Eric Felley
À Berne, les parlementaires ont souvent des trains à prendre dans la précipitation. C'est ce qui est arrivé à Benjamin Roduit le 27 septembre dernier, nous raconte-t-il aujourd'hui que cette affaire est derrière lui. Ce mercredi-là, il était attendu à Genève pour l'émission «Infrarouge» avec d'autres élus pour un débat sur les élections fédérales.
Après avoir procédé aux derniers votes au Conseil national, il a foncé à la gare avec sa trottinette, puis traversé la foule dense du hall pour arriver à l'heure sur le quai. Une fois assis dans le train avec ses collègues, il a fouillé dans son manteau pour prendre son téléphone. Il n'était plus là.
D'abord, il a pensé l'avoir oublié à sa place de travail. Empruntant le téléphone d'un de ses compagnons de voyage, il a appelé le Service du Parlement et ses voisins du National. Leurs recherches n'ont hélas rien donné. Le train avait démarré depuis une demi-heure: «J'ai commencé à ruminer, admet-il, c'est là qu'on voit que sans téléphone, on est comme un indien dans la ville».
Le voleur appelle sa femme
Après une heure, il a décidé d'appeler sa femme pour l'avertir de la situation. À sa grande surprise, sa femme avait reçu de sa part un appel d'urgence venant de son téléphone et elle avait commencé à s'inquiéter sérieusement. Le voleur avait appuyé sur la touche «urgence», qui relie directement les téléphones des deux époux. Benjamin Roduit comprend alors que son iPhone a été volé. Il contacte aussitôt le service IT du Parlement, qui parvient à le localiser d'abord dans le parc de la Kleine Schanze, non loin de la gare de Berne.
Le conseiller national avertit également la police fédérale (Fedpol), qui ne peut pas faire grand-chose pour lui, car elle s'occupe uniquement de la protection des personnes. Mais le service IT du Parlement est très efficace, il réussit rapidement à bloquer l'accès aux données présentes dans son téléphone. Il faut préciser que le Valaisan y stocke tous ses dossiers, qu'il partage avec son ordinateur.
À Boudry
Entretemps, l'iPhone volé a déjà fait du chemin. Et là, nouvelle surprise de taille, il est localisé au Centre fédéral pour requérants d'asile de Boudry... Benjamin Roduit contacte alors la police neuchâteloise pour qu'elle tente de récupérer l'appareil. Mais celle-ci lui répond qu'elle n'a pas les compétences pour intervenir ainsi dans le centre. Le conseiller national doit d'abord déposer plainte dans le canton de Berne, où le vol a eu lieu.
Dans la soirée, Benjamin Roduit participe à l'émission «Infrarouge». Les parlementaires présents lui prêtent volontiers leurs téléphones pour qu'il puisse rester en contact avec ses proches. Le lendemain, son IPhone part en voyage. Il est localisé à Neuchâtel à 12 heures, à Lausanne à 12 h 30 puis à la gare d'Annemasse à 15 heures. Personne ne peut intervenir. Pendant ce temps, le service IT du Parlement a récupéré toutes ses données et les a effacées de l'appareil.
Son téléphone est à Alger
Depuis, Benjamin Roduit a fait le deuil de son iPhone et a recommencé sa vie avec un autre. Mais ce n'était pas fini. Le 13 octobre, en début de soirée, sa femme reçoit un message lui indiquant que son appareil volé a été retrouvé dans un quartier d'Alger, utilisé par un certain Ben Sadi. Elle est invitée à cliquer sur une icône pour en savoir plus.
«Elle n'aurait pas dû», se souvient Benjamin Roduit. Peu après, il se fait hacker sa Mastercard pour 10 francs et sa femme reçoit de nouveaux messages hautement suspects en vue de lui soutirer davantage d'argent. Heureusement, il peut compter ce soir-là sur un Valaisan qui travaille pour le service IT du Parlement: «À partir de l'ordinateur, on a modifié tous les mots de passe et on a tout bloqué. On en a eu jusqu'à deux heures du matin, car en face, ils étaient très compétents aussi».
Une filière organisée
Depuis, plus de nouvelles de l'Algérie. Benjamin Roduit tire quelques leçons de ces événements. D'une part, il regrette que les polices cantonales ne soient pas mieux coordonnées pour traiter ce genre de cas, en particulier pour un parlementaire qui détient des données sensibles. Il est persuadé que le sort de son téléphone ne relève pas d'un simple vol, mais s'intègre dans les activités d'une filière organisée. Une enquête plus approfondie aurait dû être faite, notamment concernant le centre de Boudry.
Mais, aux dernières nouvelles, courant janvier, la plainte qu'il a déposée devant la police bernoise n'a pas eu de suite dans ce sens.