États-UnisTrump, un «barbare contre les barbares» prêt à se battre
L'électorat blanc évangélique soutient massivement le républicain, vu comme un rempart «désigné par Dieu».
Ex-propriétaire de casinos, marié trois fois et confronté à de multiples allégations d’inconduite sexuelle au fil des ans, Donald Trump est un modèle improbable pour les chrétiens évangéliques des États-Unis.
Et pourtant, un très grand nombre de ces fervents croyants pensent non seulement qu’il constitue la meilleure option pour la présidence en novembre prochain, mais aussi qu’il a été désigné par Dieu pour empêcher l’Amérique de sombrer dans la damnation.
Une plutôt belle image pour un homme qui passe ses dimanches sur les terrains de golf. Et il bénéficiera de tout l’intérêt des évangéliques jeudi, lorsqu’il s’adressera à un groupe de radiodiffuseurs religieux.
Soutien massif en 2016 et 2020
En 2015, lorsque Donald Trump s’est lancé dans la course à la présidence, il n’avait apparemment pas grand-chose à offrir à la droite religieuse du pays.
Mais au fil du temps, il s’est assuré ce que beaucoup considéraient comme un soutien intéressé et prudent, en proposant de nommer des juges anti-avortement à la Cour suprême, une chance de se débarrasser de la plus grosse épine pour les chrétiens de droite.
Lorsque les Américains se sont rendus aux urnes en novembre 2016, 77% des évangéliques blancs ont voté Trump, selon l’institut Pew Research. Un soutien qui est passé à 84% lors de l’élection de 2020.
Cependant, le droit fédéral à l’avortement ayant été annulé lorsque la Cour suprême – où Donald Trump a nommé trois juges conservateurs – a invalidé l’arrêt Roe vs Wade en 2022, que voit encore ce bloc électoral dans un homme qui semble mal à l’aise lorsque les gens prient, et qui a hésité lorsqu’on lui a demandé de citer son verset préféré de la Bible?
Une peur, une anxiété
Selon Tim Alberta, qui a beaucoup écrit sur la droite évangélique et son soutien à M. Trump, cette communauté craint de se retrouver en état de siège mortel dans un pays qui est beaucoup moins blanc, beaucoup moins religieux et beaucoup plus tolérant à l’égard des différents modes de vie qu’au cours des décennies passées.
«Si vous considérez le fait que les guerres culturelles ont basculé si brutalement en leur défaveur et que le pays est en train de changer de manière si spectaculaire en si peu de temps, vous commencez à comprendre pourquoi il y a cette peur, cette anxiété», a-t-il mis en avant lors d’une série d’interviews visant à promouvoir son livre «The Kingdom, the Power, and the Glory» (Le Royaume, la Puissance et la Gloire).
«Si vous croyez que les Barbares sont à nos portes, alors vous vous dites: +Peut-être avons-nous besoin d’un Barbare pour nous protéger+. C’est en résumé la relation des évangéliques avec Donald Trump», estime-t-il.
Pour cette communauté, qui ne représente que 14,5% de la population mais 28% des électeurs, le fait que l’ancien magnat de l’immobilier ne soit pas religieux n’a pas d’importance. Ils ont le sentiment qu’il est de leur côté.
Pourtant non-religieux
«Je peux dire, d’après toutes les personnes que je rencontre et avec lesquelles je parle, et d’après mon expérience personnelle, même dans ma propre famille qui compte des démocrates de longue date, que M. Trump a cet attrait», relève Troy Miller, président et directeur général de la National Religious Broadcasters, qui a invité M. Trump à s’adresser à l’organisme jeudi.
«Les gens ont l’impression qu’il les comprend. Même si certains aspects de sa vie ne correspondent pas à leur mode de vie ou à leur moralité, ils ont l’impression qu’il les comprend», a-t-il déclaré à USA Today.
Pour un observateur extérieur, il peut paraître étonnant que le non-religieux Donald Trump soit de loin préféré à des chrétiens pratiquants – Joe Biden est un fervent catholique mais, selon Pew Research, il n’attire que 14% de soutien parmi les évangéliques blancs.
Même ceux qui appartiennent à la mouvance évangélique du côté républicain sont perdants dans les face-à-face avec M. Trump: le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, et le sénateur de Caroline du Sud Tim Scott ont tous deux échoué dans le processus des primaires du parti et se rangent désormais derrière l’ex-président.
«Prêt à se battre»
Pour M. Alberta, ce soutien trouve ses racines dans un nationalisme chrétien qui a confondu les notions bibliques de paradis avec l’idée même d’Amérique.
«Il y a des millions de personnes dans ce pays qui croient vraiment, au plus profond de leurs os, que l’Amérique (..) entretient une relation spéciale avec Dieu», a-t-il déclaré. «Par conséquent, se battre pour l’Amérique, c’est se battre pour Dieu».
«Et ce type, Donald Trump, qui ne partage aucune de vos valeurs... est prêt à partir en guerre pour vous. Il est prêt à se battre pour vous», a-t-il ajouté. «En fait, je dirais même qu’il est prêt à se battre pour vous comme aucun bon chrétien ne le ferait jamais.»