Angoulême (F)Esclave d’un trafic de drogue, il a vécu deux ans dans une cave
Le garçon de 18 ans comparaissait lundi pour trafic de stupéfiants, mais aussi pour avoir résisté violemment et outragé six policiers lors de son interpellation.
Les policiers l’ont découvert en démantelant des points de deal près d’Angoulême, dans le sud-ouest de la France: un jeune de 18 ans vivait depuis deux ans dans une cave où il veillait sur du cannabis et de l’argent liquide, comme il l’a expliqué au tribunal correctionnel.
Ce garçon comparaissait lundi pour trafic de stupéfiants, mais aussi pour avoir résisté violemment et outragé six policiers lors de son interpellation. Il a été condamné à douze mois de sursis probatoire renforcé.
Originaire de la ville de Dzaoudzi sur l’île française de Mayotte, dans l’océan Indien, il a été envoyé en métropole il y a cinq ans par sa mère qui rêvait pour lui d’un avenir meilleur et notamment d’un travail, comme l’a rapporté «La Charente Libre».
Durant trois ans, il a vécu dans l’appartement de sa sœur, à Soyaux. L’agglomération d’Angoulême abrite en effet une forte communauté mahoraise. Mais à l’issue d’une dispute, il s’est retrouvé à la rue.
«J’étais en galère», a-t-il expliqué à la barre. Sans toit, il a été recueilli par des dealers qui lui ont proposé de vivre dans cette cave pour garder du cannabis.
100 euros par mois
«Je n’ai pas eu le choix», a t-il expliqué au tribunal En l’arrêtant, dans la cave, les policiers ont découvert près d’un kilo de résine de cannabis et 2140 euros en petites coupures.
Paniqué, le jeune homme s’est rebellé, a frappé à la tête un policier et les fonctionnaires affirment avoir dû recourir à trois reprises à un taser pour le maîtriser.
Pour accomplir cette tâche de «nourrice», ce jeune Mahorais était payé 100 euros par mois. Il recevait aussi un peu de nourriture et quelques grammes de cannabis pour sa consommation personnelle, a t-il expliqué aux enquêteurs. Il lui arrivait aussi de vendre un peu de résine dans Angoulême pour pouvoir s’acheter à manger.
Malgré des «conditions de vie indignes», dixit la procureure Anne Medioni, le jeune homme n’était pas totalement désinséré.
Il a arrêté sa scolarité avant le baccalauréat, mais récemment, via la mission locale, il avait intégré une école de la deuxième chance, ce qui lui a permis d’obtenir un stage dans un magasin de bricolage.
Il y travaillait de 6h à midi depuis le début du mois, puis rejoignait sa cave l’après-midi pour veiller sur le cannabis qui alimentait un point de deal tout proche, à Soyaux.
Toilette dans la rivière
C’est donc dans cette cave que le garçon passait une grande partie de ses journées. Sans eau ni électricité. Il sortait parfois pour se laver »dans la rivière», a-t-il dit à l’audience. Mais aussi pour recharger son téléphone dans une maison abandonnée a-t-on appris d’une source proche de l’enquête.
Ce «four» a été démantelé la semaine dernière avec plusieurs interpellations à la clé de jeunes de la communauté mahoraise.
En garde à vue et durant toute la procédure, il n’a pas voulu donner le nom des dealers qui l’ont logé dans cette cave, par peur de représailles.
«Vous avez été exploité par ces personnes pour pas grand-chose», lui a fait remarquer le président du tribunal Ancelin Nouaille. «Le tribunal est persuadé que vous avez déjà été remplacé. Aujourd’hui, en protégeant ces personnes, vous donnez raison à cette exploitation.»
Pour le magistrat, le sursis probatoire renforcé dont il a bénéficié est «une main vigilante» qui lui est tendue. L’intéressé, lui, a répondu qu’il voulait «se débrouiller, avoir (s)a maison et travailler». Il est ressorti libre.