Depuis sa prison, il est resté moqueur et optimiste jusqu'à la fin

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Mort de NavalnyDepuis sa prison, il est resté moqueur et optimiste jusqu'à la fin

Navalny racontait son quotidien dans sa prison de l’Arctique, à travers des messages diffusés sur les réseaux sociaux.

Alexeï Navalny n'a jamais cessé de faire preuve d'humour et d'optimisme.

Alexeï Navalny n'a jamais cessé de faire preuve d'humour et d'optimisme.

AFP

Le principal opposant russe, Alexeï Navalny, a passé ses derniers jours isolé dans une prison de l’Arctique. Via des messages passés à ses avocats et diffusés par son équipe sur les réseaux sociaux, il racontait son quotidien avec humour et optimisme.

Voici ce que le charismatique militant anticorruption, mort vendredi selon les autorités, disait de sa vie de bagnard au-delà du cercle polaire :

«La nuit, puis le soir, puis à nouveau la nuit»

Le 26 décembre, Navalny a posté de sa nouvelle colonie pénitentiaire de Kharp son premier message, après n’avoir donné aucune nouvelle pendant des semaines en raison de son transfert à partir de son ancienne prison de la région de Vladimir, plus proche de Moscou.

«Je suis votre nouveau grand-père gel», ironisait-il, se comparant à l’équivalent du père Noël dans le folklore russe. «J’ai un touloup, une ouchanka et j’aurai bientôt des valenko», ajoutait-il, évoquant les traditionnels manteaux, chapeaux et bottes d’hiver en fourrure.

«Je vis maintenant au-delà du cercle polaire (...) mais je ne dis pas «ho-ho-ho» mais plutôt «oh-oh-oh» quand je regarde par la fenêtre, où c’est d’abord la nuit, puis le soir, puis à nouveau la nuit», racontait l’opposant. Il se disait fatigué d’un voyage de 20 jours depuis son ancienne prison mais ajoutait :

«Ne vous inquiétez pas pour moi, tout va bien»

Jusqu'à -32°C dans la cellule

Quelques semaines plus tard, après une période de quarantaine, Navalny a donné plus de détails sur ses conditions de vie. «L’idée selon laquelle Poutine était (suffisamment) satisfait de m’avoir placé dans une caserne du Grand Nord pour qu’ils cessent de me mettre à l’isolement était... naïve», déclarait l’opposant.

Navalny a passé plus de 300 jours à l’isolement, une punition pour des violations que lui imputent les autorités carcérales mais que le militant voit comme une vengeance. Cette fois, les gardiens lui ont reproché de s’être mal présenté à eux. Résultat, «sept jours à l’isolement».

Autorisé à sortir pour une promenade quotidienne dans l’obscurité totale à 6h30 du matin, Navalny s’est «promis qu’il sortirait par n’importe quel temps». Sa cellule, quant à elle, mesure «onze pas d’un mur à l’autre». Les températures peuvent descendre jusqu’à -32°C. «Même par une telle température, on peut marcher plus d’une demi-heure, à condition d’avoir le temps de faire repousser son nez, ses oreilles et ses doigts», ironisait-il encore le 9 janvier.

Réveil à cinq heures

Alexeï Navalny tournait aussi en ridicule les routines dans sa prison. Le 22 janvier, il a ainsi raconté que les gardiens réveillaient tout le monde à cinq heures pour l’hymne national russe. «Et, juste après cela, la deuxième chanson la plus importante du pays : Je suis russe» du chanteur Shaman, la nouvelle star des grands concerts «patriotiques» organisés par le Kremlin.

«Imaginez la scène : (région de) Iamalo-Nénétsie, nuit polaire, dans une colonie pénitentiaire, le prisonnier Navalny, qui purge une peine de 19 ans et que la propagande du Kremlin réprimande depuis des années pour avoir participé à des marches russes, s’exerce à chanter «Je suis Russe», se moquait l’opposant.

«Envoyez-moi de l’argent»

A une audience au tribunal le 15 février – à la veille de sa mort -, Alexeï Navalny est apparu via vidéo de bonne humeur, en train de plaisanter aux dépens du juge au sujet d’une série d’amendes qui lui avaient été infligées.

Les dernières plaisanteries de Navalny, la veille de sa mort.

La vidéo

Son dernier message est un «je t'aime»

Le dernier message de M. Navalny, diffusé le jour de la Saint-Valentin, était dédié à sa femme, Ioulia. «Toi et moi, nous avons tout, comme dans la chanson : des villes, des lumières d’aérodromes, des tempêtes de neige bleues et des milliers de kilomètres qui nous séparent», a-t-il déclaré, citant une chanson populaire de l’ère soviétique.

«Mais je sens que tu es près de moi à chaque seconde et je t’aime de plus en plus», disait-il. Vendredi, Ioulia Navalnaïa a appelé à «punir» Vladimir Poutine et son régime pour la mort de son mari.

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