Grande-BretagneLa première ministre éclair Liz Truss créée son parti
Celle qui n'est restée que 49 jours en poste créée un mouvement ultraconservateurs, les PopCons.
- par
- Michel Pralong
Malgré un échec retentissant comme Première ministre britannique l’an dernier, Liz Truss n’a pas quitté l’arène et lance un nouveau mouvement politique pour pousser les conservateurs à embrasser des idées encore plus à droite.
Liz Truss n’a fait qu’un passage éclair de 49 jours au pouvoir avant d’être évincée par son propre parti en octobre 2022, après la présentation d’un projet de budget qui a fait paniquer les marchés financiers.
Mais loin de se laisser décourager, elle a su rester présente dans le jeu politique, au grand dam de son successeur Rishi Sunak, largement distancé par l’opposition travailliste dans les sondages pour les élections législatives qui doivent se tenir d’ici à janvier 2025. Depuis son éviction, elle a régulièrement exhorté le gouvernement à réduire les impôts, à revenir sur certaines mesures pour atteindre la neutralité carbone, et à repousser l’âge de départ à la retraite.
Elle parle de l'«État nounou»
«Un gouvernement conservateur ne devrait pas chercher à étendre «l’État nounou», a-t-elle encore écrit sur X la semaine dernière au sujet du projet d’interdiction progressive du tabac au Royaume-Uni.
Elle lance mardi un nouveau mouvement au sein des Tories, déjà divisés en de nombreuses factions: les «Popular Conservatives», ou «PopCons», un groupe qui a reçu l’appui de quelques Brexiters durs et défenseurs du marché libre.
Au moment où les Tories s’apprêtent à rédiger leur programme en vue des prochaines élections, ce groupe va tenter de peser en faveur de politiques fiscales et migratoires plus strictes. De quoi rajouter des difficultés à Rishi Sunak, qui peine déjà à maintenir un équilibre entre les centristes et l’aile droite de son parti.
«Le travail de sape de Mme Truss à l’encontre de son successeur est inhabituel mais pas sans précédent», estime auprès de l’AFP le politologue Tim Bale, de l’université Queen Mary de Londres, citant les tentatives de Margaret Thatcher de contrecarrer John Major dans les années 1990.
Lors de leur première réunion à Londres, les «PopCons» devraient appeler le gouvernement à s’émanciper de la Convention européenne des droits de l’Homme ou à abroger la loi sur l’égalité, sur fond de «guerres culturelles» contre le militantisme progressiste. Ils n’appelleront pas cependant à écarter de la direction du parti Rishi Sunak, cinquième leader conservateur depuis le vote du Brexit en 2016, à l’approche des élections.
Impopulaire chez les conservateurs
Difficile toutefois de savoir combien d’élus grossiront les rangs de son mouvement, tant Liz Truss reste impopulaire au sein du parti conservateur.
L’ex-Première ministre est aussi très mal perçue par les Britanniques, qui la tiennent en partie responsable de la crise du coût de la vie traversée par le pays. Une enquête réalisée par l’institut de sondage Savanta en janvier lui a attribué une côoe de popularité nette de -54, la pire de toutes les personnalités politiques interrogées.
«Ce qui est intéressant avec elle, c’est que la plupart des politiciens impopulaires ont une certaine capacité à rebondir une fois qu’ils ont quitté leurs fonctions, mais ce n’est pas le cas de Mme Truss», relève le directeur de la recherche politique de l’institut, Chris Hopkins.
Restaurer sa réputation
David Jeffery, professeur spécialiste de la politique britannique à l’université de Liverpool, doute que Mme Truss «se voile la face au point de croire qu’elle a une autre chance d’accéder» au 10, Downing Street. Il pense plutôt que son objectif est d’influencer la future direction du parti conservateur, tout en essayant de restaurer sa propre réputation: «Il s’agit certainement de façonner le parti et ensuite peut-être d’obtenir un poste correct» une fois le parti revenu dans l’opposition.
Une source proche de Liz Truss confirme que cette dernière a «des idées bien arrêtées sur la future direction du parti et du pays», et que l’ancienne cheffe de gouvernement chercherait, dans un premier temps, à se faire réélire comme députée lors des prochaines élections.