Droite-gaucheNantermod et Maillard se clashent sur la 13e rente AVS
Le débat entre leurs deux visions totalement opposées a tourné à un dialogue musclé.
- par
- Eric Felley
Le duel entre Pierre-Yves Maillard (PS/VD) et Philipe Nantermod (PLR/VS) était attendu quelque part durant cette campagne sur l'initiative pour une 13e rente AVS en votation le 3 mars. Il a eu lieu mardi soir lors de l'émission «Forum» sur la RTS, avec pour invitée également Béatrice Métraux pour l'AVIVO, et Christelle Schultz pour la Fédération des entreprises romandes.
Mais ce sont surtout les deux hommes qui ont croisé le fer durant une quarantaine de minutes sur les finances de l'AVS, les rentes versées à l'étranger, le rôle des prestations complémentaires ou encore le conflit générationnel que générerait cette initiative.
Douze rentes, pas treize
Sur la question générationnelle, Philippe Nantermod a lancé : «Il y a un conflit générationnel parce que les gens qui sont à la retraite aujourd'hui ont cotisé pour douze rentes, pas pour treize. S'ils avaient voulu cotiser pour treize, il aurait fallu payer un douzième de plus de cotisation. Une fois de plus, on demande à une génération, à ma génération entre autres, de cotiser plus pour l'AVS...»
Cette approche a fait bondir Pierre-Yves Maillard: «Je vais parler de la situation que je connais dans ma famille, ma mère a commencé à travailler à 15 ans.(...) C'est une génération de personnes qui ont cotisé, qui ont élevé leurs enfants, qui ont payé les études de leurs enfants, qui gardent leurs petits-enfants aujourd'hui, pour que leurs propres enfants puissent travailler les deux, qui fournissent huit milliards de gardes d'enfants gratuitement... Monter les générations les unes contre les autres comme vous le faites, c'est juste indigne...»
Des rentes à l'étranger
Philippe Nantermod a soulevé le problème des rentes versées à l'étranger «Si vous avez la plus petite rente AVS aujourd'hui au Portugal, vous touchez plus que le salaire moyen portugais. Vous voulez verser une 13e rente à des gens qui vivent à l'étranger, c'est quand même une rente sur trois, 800 000 rentes... Mais vous allez prendre de l'argent à des gens en Suisse, qui ont déjà de la peine à joindre les deux bouts...»
Pierre-Yves Maillard lui a rétorqué: «Vous avez évoqué, en imitant l'UDC un peu grossièrement, les rentes à l'étranger. J'aimerais dire que justement, les 800 000 personnes qui sont à l'étranger font économiser entre un et deux milliards de francs à l'AVS en Suisse, parce qu'elles n'ont pas droit aux prestations complémentaires.»
L'argent sur les arbres
Philippe Nantermod a fait un calcul sur les conséquences financières de la 13e rente: «Ce sont 5 milliards de francs qui devront être portés par 5 millions d'actifs, c'est mille francs par année et par actif à payer, pour une famille, c'est 2000 francs ». Pierre-Yves Maillard l'a interrompu: «Il y a la part patronale...» Philippe Nantermod a repris: «La part patronale, vous savez M. Maillard, quand les charges sociales augmentent, c'est le pain qui augmente. (...) Il n'y a qu'à gauche qu'on croit qu'il y a de l'argent magique qui pousse sur les arbres...»
De la solidarité nationale
Après cette attaque, Pierre-Yves Maillard a pris de la hauteur et tapé du poing sur la table: «Ça fait 75 ans que l'AVS existe. À l'époque, c'était une petite minorité, aujourd'hui ce sont les mêmes qui disent toujours la même chose: ah, il n'y aura pas d'argent. Et ça fait 75 ans qu'on se trompe. Les opposants à l'AVS disaient en 1947 que dans vingt ans l'AVS serait en faillite, 20 ans après, on doublait les rentes. Les ancêtres de M. Nantermod avaient une tout autre approche de la solidarité nationale». «Mais on a augmenté les cotisations», a corrigé Philippe Nantermod, en insistant: «Quand vous avez une baignoire qui fuit..., quand vous avez une baignoire qui fuit, M. Maillard, augmenter la taille du robinet évidemment et vous résolvez le problème pour un petit moment...»
Quelques perles ont émaillé le débat, notamment sur les nouveaux seuils de fortune pour les prestations complémentaires: «Écoutez-moi religieusement, a dit Pierre-Yves Maillard, ce n'est pas parce qu'on a une fortune, qu'on est riche». Enfin, Phillipe Nantermod a traité Pierre-Yves Maillard de «rentier de l'État de Vaud». «Non, je ne touche pas ma rente, comme ça vous le savez», a répliqué l'élu socialiste.