CommentaireLes paysans suisses sont-ils à ce point mal aimés?
Crise du monde agricole: les faîtières de l'agriculture suisse ont fixé cinq revendications, dont celle du respect.
- par
- Eric Felley
Face à la colère des mouvements d'agriculteurs allemands et français, les agriculteurs suisses sont dans le doute: faut-il les rejoindre et comment ?Lundi, l'Union suisse des paysans (USP), Agora et les Chambres romandes d’agriculture ont tenu une réunion et publié une pétition commune faisant valoir leurs revendications.
La première d'entre elle fait état du manque de reconnaissance de la profession, du «dénigrement» ressenti ou du «manque de reconnaissance sociale». Dans le communiqué, il est dit: «les familles paysannes reçoivent plus souvent des coups de bâton, en particulier sur les réseaux sociaux, que des fleurs».
Autonomie et moratoire
Les autres revendications sont plus terre-à-terre. Elles exigent le maintien des moyens que la Confédération attribue à la branche jusqu'en 2029, moins de paperasses fédérales, plus d'autonomie régionale, 5 à 10% d'augmentation des prix à la production et une forme de moratoire sur les mesures environnementales.
Ces revendications ne sont pas vraiment nouvelles. La plupart sont du ressort du Parlement à Berne, où le monde paysan traditionnel y reçoit rarement des «coups de bâton», tant il y est bien implanté. «Moins il y a d’agriculteurs en Suisse, plus ils sont nombreux à siéger», a ironisé «Le Temps» après les élections d'octobre dernier, qui ont renforcé encore l'influence de la branche. Un conseiller national sur dix vient de ce milieu, qui ne représente pourtant que 2,3% de la population active.
Paysans entendus
Lors de la session de décembre, le lobby paysan a pu maintenir le niveau des paiements directs en faisant refuser la coupe de 2,2% (55 millions de francs) prévue par le Conseil fédéral. Le Parlement a aussi décidé l'introduction de contributions fédérales (30%) pour réduire les primes pour les assurances récoltes. Il a décidé aussi de reporter d'une année l'exigence de consacrer 3,5 pour cent de surfaces pour la biodiversité dans les grandes cultures.
Comme on le voit, les demandes des paysans trouvent assez facilement une majorité à Berne. Mais ils ne sont tout de même pas seuls au monde. L'agriculture en général fait l'objet d'un débat constant et critique sur son fonctionnement et son évolution. Cela englobe ce que le pays a de plus cher: ses sols, son eau, ses forêts, ses paysages, son air et sa nourriture.
Un métier dur...
Dans ce contexte, les paysans se sentent parfois incompris ou abandonnés dans leur travail, régi par un nombre de règles de plus en plus complexes. À cela s'ajoute qu'ils ne roulent pas sur l'or avec un revenu annuel moyen national de 56 100 francs, soit 4 675 francs par mois. Mais tout cela ne semble pas encore constitutif d'un «dénigrement» systématique du monde agricole. Au contraire, la Suisse aime sa paysannerie, un métier dur qui n'est pas à la portée de tout le monde, tant s'en faut.