FranceUn Complément d'enquête sur Bardella fait fulminer le RN
L'émission dévoilerait des messages haineux du président du parti. France Télévisions la maintient malgré les menaces de poursuite.
Le Rassemblement national est vent debout contre la diffusion jeudi soir d’un «Complément d’enquête» sur son président Jordan Bardella, dénonçant «une manipulation grossière». France Télévisions maintient la diffusion de l’émission, malgré les menaces de poursuites.
Intitulé «Jordan Bardella: le grand remplaçant», le reportage, se basant sur quatre sources, dont trois anonymes, affirme que la tête de liste du RN pour les européennes aurait utilisé de 2015 à 2017 un compte Twitter sous un pseudonyme pour diffuser des messages racistes, homophobes ou pour insulter des journalistes.
«Complément de rien»
«Cette émission devrait être rebaptisée complément de rien, parce qu’ils arrivent à la faire à partir de rien», s’est emporté sur franceinfo le député et porte-parole du RN Sébastien Odoul, dénonçant «une manipulation grossière» visant à «discréditer notre liste pour les européennes».
Dès la diffusion mercredi soir d’un teaser de l’émission sur les réseaux sociaux, Victor Chabert, attaché de presse du parti, a contesté avec force l’attribution de ce compte anonyme à Jordan Bardella, qui caracole en tête des sondages pour le scrutin du 9 juin.
«Vous diffusez un tweet mensonger, sans même employer le conditionnel et sans préciser le démenti de Jordan Bardella qui réfute formellement être l’auteur de ces publications», a-t-il écrit sur X, annonçant des poursuites et une mise en demeure adressée «par huissier à France Télévisions». Il a précisé à l’AFP que le RN a entrepris ces démarches non pas pour empêcher la diffusion de l’émission, mais bien celle de «l’extrait sur le faux compte qui est complètement mensonger». Il a ajouté que le parti n’avait pas déposé de référé.
Pour sa part, France Télévisions a indiqué à l’AFP maintenir la diffusion du «Complément d’enquête» sur France 2 à 22 h 35. «Cela ne change rien, c’est classique», précise-t-on au sein du groupe. «Les sources de Pierre-Stéphane Fort, le journaliste ayant mené l’enquête, sont formelles», a souligné pour sa part sur X le présentateur du magazine d’investigation, Tristan Waleckx. Le reportage est consacré au jeune président du RN, âgé de 28 ans, à l’ascension politique éclair.
Un compte anonyme pour parler plus librement
«Complément d’enquête» mentionne un compte Twitter que Jordan Bardella aurait utilisé sous le pseudonyme de RepNat du Gaito. L’un des tweets mis en avant par l’émission montre une photo de la piscine de Créteil avec la mention «La mer noire», en allusion à la présence de nombreuses personnes de couleur dans le bassin.
Un ancien membre du RN, Eric Richermoz, affirme face caméra que Jordan Bardella avait un tel compte comme les autres membres «d’un petit groupe appelé NatRep» (Nationalistes Républicains, NDLR) qui utilisaient des profils anonymes «pour parler plus librement que le compte officiel».
Contacté par l’AFP, l’ex-numéro 2 du FN Florian Philippot, interrogé dans le reportage, assure «ne pas être en mesure de confirmer» que le président du RN se soit effectivement caché derrière ce profil. Il rejette, en revanche, les accusations du Rassemblement national qui attribue le compte RepNat du Gaito à l’un de ses «anciens assistants». «C’est un mensonge grossier qui montre une certaine fébrilité», assure-t-il.
Dans l’émission, que l’AFP a pu visionner, Jordan Bardella dément lui-même avoir tweeté sous cette fausse identité: «Je suis désolé de vous décevoir, mais je n’ai qu’un seul compte Twitter», a-t-il répondu mardi à France 2.
Peu présent au Parlement européen
Ce «Complément d’enquête» relate notamment le début de la carrière politique de Jordan Bardella, avec une interview de l’ancien journaliste Pascal Humeau qui lui a donné des cours pour s’exprimer dans les médias. «C’était une coquille vide. En termes de fond, il était plutôt limité», assure ce spécialiste de média training. Il raconte avoir appris au président du RN à sourire et à dire «bonjour avec enthousiasme».
Les équipes de «Complément d’enquête» se sont aussi rendues au Parlement européen à Strasbourg pour enquêter sur les activités de l’eurodéputé. «Je ne l’ai jamais vu», affirment le socialiste luxembourgeois Marc Angel et la nationaliste galicienne Ana Miranda, qui siègent tous deux avec lui à la Commission des pétitions.