Guerre en UkraineDeux avions tactiques au tapis, une claque pour l’aviation russe
Les deux appareils très importants ont été détruit pour l’un, sérieusement endommagé pour l’autre. Ces pertes pourraient au moins retarder de futures frappes de Moscou.

La destruction d'un A-50 pourrait «au moins retarder de futures frappes» russes.
AFPL’avion militaire russe A-50 de détection, surveillance et commandement aéroporté, que l’Ukraine a affirmé, lundi, avoir abattu, est un outil majeur de reconnaissance dont l’aviation russe ne dispose qu’en nombre limité et dont la perte accentue encore les faiblesses.
L’appareil a été détruit tandis qu’un avion de commandement Il-22 était gravement endommagé. «Ce ne sont pas des appareils ordinaires», a salué Natalia Gumenyuk, la porte-parole des forces de défense du sud de l’Ukraine. L’A-50 était «les yeux de l’ennemi», a-t-elle ajouté, espérant que sa destruction pourrait «au moins retarder de futures frappes».
L’A-50 est l’équivalent de l’avion de reconnaissance AWACS, des forces de l’OTAN. Tous deux sont aisément reconnaissables au vaste radar sphérique qui trône sur leur fuselage. Selon les chiffres de la société de renseignement britannique privée Janes, les Russes en possèdent dix de modèle ancien et sept plus modernes (A-50U), récemment rénovés et en service.
Dix cibles interceptées en même temps
Le modèle abattu n’a pas été précisé, mais plusieurs observateurs suggèrent qu’il s’agissait de sa version moderne. «Le travail d’un A-50 est de localiser, d’identifier et de suivre les appareils amis et ennemis et de coordonner les mouvements amis», explique Gareth Jennings, expert aéronautique chez Janes.
Un équipage de dix hommes dans la cabine principale peut «suivre 50 cibles et guider l’interception de dix d’entre elles simultanément», poursuit-il. «Certaines sources suggèrent que l’A50-U peut suivre 100 cibles ou fournir des informations de traçage sur 300.»
«Ils ont du mal avec le ciblage»
La Russie a affirmé à maintes reprises disposer de la suprématie aérienne au-dessus de l’Ukraine, mais celle-ci n’a jamais été totale. À ne regarder que les chiffres, le déséquilibre était pourtant impressionnant en faveur des Russes, au début de la guerre: 132 bombardiers contre zéro côté ukrainien, 832 chasseurs contre 86, 358 avions de transport contre 63, selon les chiffres de Janes à l’époque. Mais cette supériorité théorique n’a jamais véritablement pesé.
Ainsi, la Russie n’a pu faire précéder ses opérations au sol de frappes massives, comme c’est l’usage dans la plupart des conflits de haute intensité. En partie, mais pas uniquement, faute de maîtrise du renseignement aérien.
Des centaines de millions l'unité
«C’est une des grosses faiblesses des Russes. Ils ont du mal avec le ciblage et l’ISR (Renseignement, surveillance, reconnaissance)», explique Léo Péria-Peigné, de l’Institut français des relations internationales, à Paris. «Perdre un dixième de leurs capacités, c’est un gros problème», ajoute-t-il, décrivant un élément «rare, précieux et très difficilement remplaçable».
Lundi, la Russie a aussi perdu un Il-22, servant de poste de commandement aéroporté. L’appareil a réussi à se poser à Anapa, dans le sud-ouest de la Russie, mais, affirme Kiev, il n’est pas réparable.
Une double perte qui grève encore le budget militaire russe. «Ces éléments sont chers – des centaines de millions de dollars l’unité», relève Ivan Klyszcz, du Centre international pour la défense et la sécurité, en Estonie. Leur destruction souligne «les limites de l’industrie de défense russe, tant la production et la livraison de ces systèmes avancés demandent du temps et un investissement massif».
Une frappe amie en cause?
Reste l’humiliation, l’aspect symbolique. Certains comptes russes spécialisés évoquent, sur les réseaux sociaux, une «frappe amie de la défense antiaérienne» russe, relève l’Institut américain pour l’étude de la guerre. Si cela était avéré, ce serait «un échec calamiteux» pour l’armée russe. Lundi, des sources militaires européennes semblaient accréditer cette thèse, notant que les deux avions russes étaient, au moment de la frappe, «hors de portée» des forces ukrainiennes.