Les objecteurs de conscience israéliens font profil bas

Publié

Conflit Israël-GazaLes objecteurs de conscience israéliens font profil bas

Alors que cela fait plus de cent jours que le conflit a débuté entre Israël et Gaza, certains Israéliens ne veulent pas y participer.

Certains Israéliens ne veulent pas être enrôlés dans ce conflit.

Certains Israéliens ne veulent pas être enrôlés dans ce conflit.

AFP

Dans un café de Tel-Aviv, Sofia Orr, 17 ans, discute de son refus du service militaire avec Nave Shabtay Levin, militant pacifiste: ils parlent à voix basse, craignant d’être entendus au moment où Israël poursuit sa guerre contre le Hamas palestinien dans la bande de Gaza.

Ils se savent ultra-minoritaires dans un pays traumatisé par les attaques du 7 octobre du mouvement islamiste palestinien, qui ont entraîné, côté israélien, la mort d’environ 1140 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l’AFP à partir de données officielles.

Selon un sondage de l’institut Midgam publié le 14 janvier dans l’hebdomadaire de droite «Makor Rishon», 92% des Israéliens juifs soutiennent une poursuite des combats jusqu’à l’effondrement du Hamas à Gaza.

«C’est courageux de refuser»

Pour son refus, Sofia Orr risque la mise aux arrêts. En Israël, la conscription est obligatoire pour la majorité des Israéliens, hommes et femmes, à partir de 18 ans, avec des exceptions pour raisons religieuses ou médicales, mais jamais politiques.

«C’est courageux de refuser» de servir, «encore plus en temps de guerre», lui répond Nave Shabtay Levin, 20 ans, qui a passé 115 jours derrière les barreaux pour son refus l’an dernier, avant la guerre de Gaza. «Ma conscience ne m’autorise pas à m’engager», explique à l’AFP Sofia Orr qui regrette que «l’on combatte le feu par le feu.»

En décembre, Tal Mitnick, 18 ans, est devenu le premier mis aux arrêts depuis le début de la guerre, pour trente jours, pour avoir refusé de prendre part à ce qu’il a décrit comme «une guerre de vengeance», selon Mesarvot («Nous refusons»» en hébreu).

«Nous sommes une minorité»

Ce collectif d’objecteurs de conscience n’a depuis rendu public aucun autre cas même si plusieurs de ses membres ont affirmé qu’ils l’imiteraient.

«Nous sommes une minorité» à s’opposer à la guerre, «c’est vrai, mais nous existons et le reste du monde doit le savoir», insiste Cindy, 65 ans, venue participer samedi à une petite manifestation vite dispersée à Tel-Aviv.

Comme Cindy, de nombreuses personnes interrogées par l’AFP à cette manifestation n’ont pas voulu donner leur nom de famille. «C’est dur d’exprimer son opinion contre la guerre», explique Moran, 37 ans, une pancarte «Oui à la paix, non à la guerre» accrochée à son vélo.

Face à la rhétorique martiale des responsables israéliens de tous horizons politiques, les objecteurs de conscience expliquent passer pour des «traîtres» et affirment recevoir des menaces de mort. La peine infligée à Tal Mitnick (30 jours), est plus dure que celles généralement prononcées avant la guerre contre les objecteurs de conscience politiques, habituellement 10 jours de prison, prolongés s’ils continuent de refuser.

Pas de commentaire de l'armée

Sollicitée, l’armée a refusé de commenter ou de donner des chiffres. Elle peut se targuer du soutien de la population face aux critiques à l’étranger sur le bilan de la guerre à Gaza contre le Hamas qui, selon le mouvement islamiste palestinien, a fait 24'100 morts, majoritairement des femmes, des adolescents et des enfants. Elle accuse le Hamas de combattre en se servant de sa population comme bouclier humain, ce que le mouvement palestinien réfute.

«Il n’y a pas un soldat, un officier, un pilote ou un artilleur qui a dit «ça va trop loin, je ne veux pas continuer à participer à ce massacre»», a récemment regretté l’éditorialiste Gideon Levy, qui a dénoncé un «aveuglement moral» dans le quotidien de gauche Haaretz.

Sofia Orr explique avoir partagé la «colère» de ses concitoyens le 7 octobre, après les attaques sanglantes du Hamas. Elle connaissait une des 364 personnes tuées à la rave-party Tribe of Nova. Mais elle ajoute avoir immédiatement redouté «les horreurs» qui accompagneraient des opérations militaires de représailles. «L’extrême violence appelle l’extrême violence», dit-elle.

afp

Ton opinion