Valais: le père incestueux était complice du curé pervers

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Abus dans l'ÉgliseValais: le père incestueux était complice du curé pervers

En octobre, le pape renvoyait un prêtre pour pédophilie. Il agissait avec son ancien amant devenu enseignant.

Eric Felley
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Eric Felley
Le prêtre et le père enseignant ont abusé des enfants durant de longues années.

Le prêtre et le père enseignant ont abusé des enfants durant de longues années.

Getty Images

Le 7 octobre dernier, les autorités du diocèse de Sion avaient été informées qu'un de ses curés avait été déchu de son statut de prêtre. Selon la formule consacrée, le pape François avait décidé son «retour à l'état laïque». Pour l’Église catholique valaisanne, c’était la première fois qu’une telle sanction était prise pour un prêtre accusé d’actes pédophiles.

Quelques éléments de faits avaient été divulgués concernant les victimes, deux enfants en bas âge d'une même famille, dont le prêtre était proche de la fin des années 70 au début des années 90, alors qu'il était en charge de la paroisse de Plan-Conthey. Aujourd'hui, l'enquête du Ministère public valaisan et de la police, révélée par «Le Nouvelliste» de samedi, donne un éclairage choquant et révoltant sur ce qui s'est vraiment passé.

L'ami de la famille

L'enquête a montré que durant sa jeunesse, le futur prêtre entretenait des relations intimes avec un autre homme, qui allait choisir la carrière d'enseignant en Valais. Cependant, ce dernier s'est finalement marié et a fondé une famille, dans laquelle sont venus un garçon et une fille concernés par les faits. Mais le curé est resté proche de son ancien amant, en se transformant en «ami de la famille», passant des week-ends et des vacances avec elle.

C'est dans ce contexte, qu'il a abusé et violé les enfants dès l'âge de 3 ans et durant plus d'une dizaine d'années. Le pire est que le père a participé lui-même à ces méfaits en se rendant coupable d'inceste. De son côté, la mère semble ne pas avoir réalisé ce qui se passait sous son toit et dans le lit de ses enfants durant cette période.

Dans la chambre...

L’ordonnance pénale, citée par le quotidien valaisan, relate une scène immonde: «Le prêtre est entré dans la pièce avec le papa et le petit frère. Le géniteur s’est assis au pied du lit dans lequel sa fillette était allongée. Son petit frère se tenait à côté du lit et devait observer comment le curé pénétrait la fille. Lorsque l’homme d’Église a eu fini, il a demandé au garçonnet d’avoir également des relations sexuelles avec sa sœur».

Les deux victimes, qui sont aujourd'hui adultes, ont longtemps refoulé ces agressions terribles, qui ont eu toutefois des séquelles psychologiques graves comme la dépression et des envies suicidaires. Ce n'est qu'en 2017 que l'homme a pu mettre des mots sur ces faits lors d'une psychothérapie.

«Diabolique»

Récemment, le père abuseur a écrit à son fils un courrier cité par le quotidien valaisan : «J’ai abusé de toi, de ma chair et de mon sang. Le curé a maintenant obtenu ce qu’il voulait: je viens de m’en prendre à toi. Je vois encore son sourire diabolique».

Des faits prescrits ?

En 2018, une enquête canonique a été ouverte à la suite d'une dénonciation contre le prêtre. En 2019, c'est l'évêque de Sion, Jean-Marie Lovey, qui a déposé une plainte pénale contre le curé auprès du Ministère public valaisan. Les faits rapportés aujourd'hui résultent de l'enquête qui a suivi, mais l'ordonnance pénale a rendu un non-lieu en raison de la prescription. Le prêtre et l'enseignant, tous deux à la retraite, ne seront donc pas poursuivis. Selon le diocèse, le prêtre doit toutefois indemniser les victimes.

Cette prescription interpelle, car les Suisses ont voté en 2008 en faveur de l'imprescriptibilité des crimes pédophilies. La loi ad hoc est entrée en vigueur en 2013. Toutefois, l'imprescriptibilité «est applicable si l’action pénale ou la peine n’était pas prescrite le 30 novembre 2008 en vertu du droit applicable à cette date». Or, à cette date, le délai était de 15 ans, ce qui implique que les faits survenus avant le 30 novembre 1993 demeurent quand même prescrits.

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