CommentaireBonne année et santé, Monsieur le président!
Dès le 1er de l'An, Alain Berset redeviendra un citoyen ordinaire. Enfin, presque.
- par
- Eric Felley
Ce soir à minuit, Alain Berset ne sera plus conseiller fédéral. À Berne, il a participé à sa dernière session, où il a été ovationné de longues minutes pour son discours d'adieu empreint d'émotion. Même ses adversaires à droite de l'hémicycle l'ont fait, alors qu'ils lui ont mené la vie dure pendant ces dernières années.
Mais lors de cette session, il y a eu un petit couac. Le président du Centre, Gerhard Pfister, a publié sur X et commenté une photo sur laquelle l'on voit Alain Berset tout sourire, une coupe de champagne à la main. Nouveau scandale? Le Zougois a ironisé en qualifiant sa pose comme celle «d'un oligarque russe», provoquant des commentaires faciles.
En réalité, cette photo a été prise le 29 novembre par une journaliste de «L'Illustré» dans l'avion qui emmenait Alain Berset et son équipe à la COP 28 à Dubaï. Si le président tient une coupe de champagne, ce n'est pas parce que le pouvoir lui est monté à la tête, mais parce qu'il fête l'anniversaire d'un de ses proches collaborateurs.
Dans ce contexte, on n'y trouve pas grand-chose à redire, mais Gerhard Pfister n'a pas manqué cette occasion de faire une dernière fois du Berset «bashing». Dans son message, il ironise aussi sur ses relations avec le groupe Ringier, avec lequel il a eu des contacts durant la pandémie. Il en a résulté des fuites vers les médias, les «Coronaleaks», qui ont mis la Berne fédérale sens dessus dessous, sans parvenir à mettre en cause pénalement Alain Berset.
Un communicateur hors pair
Une chose est certaine, le Fribougeois volant va manquer aux médias de ce pays. Il a été un communicateur hors pair, assurant une présence médiatique comme rarement l'a fait un conseiller fédéral. En particulier durant la période du Covid-19, où il a été poussé dans ses ultimes retranchements.
Ses diverses histoires personnelles ont fait le beurre des taux d'audience. En 2019, il a été victime du chantage d'une ancienne maîtresse, affaire dans laquelle il avait voyagé en Allemagne avec une voiture de fonction lors d'un dimanche de votation en 2012.
On lui a reproché d'avoir abusé de son pouvoir dans l'opposition fructueuse de sa famille à l'installation d'une antenne 5G de Swisscom sur sa commune de Belfaux.
En juillet 2022, alors qu'il vole seul à bord d'un petit avion, il est forcé d'atterrir par l'armée de l'air française, car il survolait une zone militaire. Ce fut la goutte de trop en Suisse alémanique, où le «Tages-Anzeiger» appelait à sa démission: «Il est temps pour Alain Berset de changer de job».
Sécurité et retraite
Mais il attendra la fin de son mandat pour partir dans les temps. Dès demain, Alain Berset redeviendra donc un citoyen comme les autres, enfin presque. Durant une année, sa sécurité est encore assurée comme s'il était en fonction. Ensuite, s'il se sent menacé, il peut demander de l'aide au Service fédéral de sécurité, qui lui indiquera les précautions à prendre.
Pour sa retraite, Alain Berset va percevoir à vie, selon le règlement du Conseil fédéral, la moitié de son salaire actuel, soit 234 138 francs par an, ou 19 511 francs par mois. Cependant, s'il trouve un travail rémunérateur et que ce revenu, ajouté à sa rente, dépasse le salaire d'un conseiller fédéral en fonction, sa rente sera réduite à hauteur de la différence.
Alain Berset va rejoindre la vingtaine d'anciens magistrats pour qui la Confédération verse chaque année un montant d'environ 5 millions de francs. Dans les multiples interviews qu'il a donnés ces dernières semaines, il n'a pipé mot sur les contours de sa reconversion. Il faudra bien s'attendre à le voir rebondir quelque part. En ces temps troublés, ce n'est pas le travail qui manque pour un humaniste de sa trempe.
En attendant, bonne année et santé, Monsieur le président!