JuraJugement pour une haie trop coupée
Cinq ans de procédure pour une coupe drastique ont débouché sur un partage des frais.
![Vincent Donzé](https://media.lematin.ch/4/image/2023/10/25/751d7ea0-c3b6-4a27-8383-dcc473c55bb5.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=crop&w=400&h=400&rect=0%2C0%2C2048%2C1536&fp-x=0.5&fp-y=0.5&crop=focalpoint&s=5391b0d5c1ef3f2e4412468145cfbd47)
En découpant considérablement une haie après l'achat d'une parcelle à l'écart du village de Grandfontaine (JU), des riverains se sont attiré les foudres d'une voisine, montée jusqu'au Tribunal fédéral pour la défense de la nature.
La maison familiale prévue dans cette parcelle située en zone à bâtir avait reçu un préavis favorable de la commune. La coupe effectuée le long d'un chemin bitumé facilitait son accès. Mais pour la voisine, c'était un «massacre».
«Pourquoi choisir une parcelle aussi bucolique et arborisée si c’est pour la détruire, alors que la zone à bâtir de la commune est surdimensionnée?», s’interrogeait l'opposante.
Charmes et noisetiers
Sur une parcelle triangulaire bordée d’une haie sur deux côtés, avec charmes et noisetiers, le permis de construire était assorti d’une condition: la conservation d’une arborisation pour «limiter la présence visuelle» d’une place bitumée devant la future villa familiale.
Dans ce dossier, tout était question d'appréciation. Selon l’Office fédéral de l’environnement, «la parcelle litigieuse abrite un grand nombre de vieux arbres âgés à grand potentiel de cavités naturelles propices à la nidification de la chouette chevêche, espèce rare et menacée».
Dépourvue de cavité
Pour l’Office cantonal de l’environnement, par contre, «il s’agit d’une haie monospécifique composée exclusivement de charmes» et dépourvue de cavité.
Les conditions du permis de construire ont-elles été respectées? Dans un arrêt rendu le mois dernier, la Cour administrative a répondu par la négative, en invitant les propriétaires à remettre leur haie en état.
Rabattre les branches
Une fois renforcée, la haie pourra retrouver une structure esthétique et une nouvelle intensité. Comme la rapporté «Le Quotidien Jurassien», les juges conseillent de rabattre les branches subsistantes, de tailler les troncs et de remplacer les essences taillées ou détruites par des plans typiques, de manière à retrouver un cordon boisé.
L'opposante qui s'est battue pendant cinq ans est mal récompensée: la moitié des frais judiciaires sont à sa charge. Explication: comme elle demandait également la révocation du permis de construire, elle a perdu sur ce point. Pour la Cour administrative, le permis est valable, c'est son application qui est fautive et doit être corrigée.
Les haies constituent des biotopes
La Loi fédérale sur la protection de la nature (LPN) prévoit que «la disparition d’espèces animales et végétales indigènes doit être prévenue par le maintien d’un espace vital suffisamment étendu». Avec les rives, les marais ou les bosquets, les haies constituent des biotopes qu’il y a lieu de protéger «tout particulièrement». Aux yeux du Tribunal cantonal, les haies situées à l’intérieur d’une zone à bâtir ne sont pas protégées.
À Grandfontaine, lors de la dernière assemblée, les citoyens ont accepté une première dépense préliminaire de 22'000 francs pour amener davantage de verdure dans la zone bâtie du village.
Selon le maire, le macadam est trop présent en comparaison avec la verdure. Le projet réalisé en collaboration avec la Haute école de gestion Arc consiste à mettre sur pied des ateliers participatifs pour définir des secteurs à aménager au niveau paysager.