Paul Giamatti en interview: «Personne dans ma famille ne m’a découragé à faire ce métier»

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interviewPaul Giamatti: «Personne dans ma famille ne m’a découragé à faire ce métier»

L'acteur américain incarne un prof de lycée privé frustré et sarcastique dans «Winter Break». Une comédie acerbe et tendre qui marque ses retrouvailles avec le réalisateur de «Sideways».

Miguel Cid, Londres
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Miguel Cid, Londres
Dans «Winter Break», Paul Giamatti, 56 ans, incarne Paul Hunham, un prof d’histoire ancienne frustré, sarcastique et misanthrope détesté de ses élèves nés avec une cuillère d’argent dans la bouche.

Dans «Winter Break», Paul Giamatti, 56 ans, incarne Paul Hunham, un prof d’histoire ancienne frustré, sarcastique et misanthrope détesté de ses élèves nés avec une cuillère d’argent dans la bouche.

Universal Studios

Beaucoup ont découvert Paul Giamatti à l’écran en 2004 dans «Sideways», l’irrésistible road-trip de deux amis désabusés en proie à la crise de la quarantaine sur une route des vins californienne. Un succès critique et commercial où le comédien américain jouait un prof déprimé et écrivain raté face à son pote acteur sur le retour.

Il retrouve aujourd’hui le cinéaste Alexander Payne, qui l’avait alors dirigé, dans «Winter Break», en salle le 13 décembre. Une comédie acerbe et tendre campée dans un lycée privé du Massachusetts à l’aube des années 1970. L’acteur de 56 ans incarne Paul Hunham, un prof d’histoire ancienne frustré, sarcastique et misanthrope détesté de ses élèves nés avec une cuillère d’argent dans la bouche. Sommé de rester sur le campus à Noël pour s’occuper de ceux qui n’ont nulle part où aller, il finit par se retrouver seul avec Angus (Dominic Sessa), un étudiant insubordonné avec il va tisser des liens. Ils sont accompagnés de Mary, la cuisinière du lycée (Da’Vine Joy Randolph), qui vient de perdre son fils au Vietnam.

Paul Giamatti est nommé au Golden Globe du Meilleur acteur dans un film musical ou une comédie pour son rôle dans «Winter Break». Entretien.

Comment c’était de retrouver le réalisateur Alexander Payne presque vingt ans après «Sideways»?

Nous nous sommes vus assez souvent depuis, mais c’est vrai que nous n’avions plus tourné ensemble. C’est le meilleur réalisateur avec qui j’ai travaillé et c’est un plaisir de bosser ensemble. Avec lui, j’ai l’impression que tout se passe parfaitement bien. Il instille une ambiance fun et relax, intime aussi, et s’intéresse à chacun sur le plateau. C’était génial.

Vous êtes-vous inspiré d’un de vos profs en particulier pour jouer ce personnage?

Quand j’ai lu le scénario, j’ai immédiatement pensé à un prof de biologie que j’avais à 15 ans et qui lui ressemblait beaucoup. Il était dur, sarcastique et très rigoureux, mais je l’aimais bien. Je sentais que c’était un gars décent dans le fond. Il m’a beaucoup inspiré, oui.

La bande-annonce de «Winter Break».

Vous avez aussi fait des études dans un lycée privé. Quels souvenirs en gardez-vous?

Oui, j’ai fréquenté un de ces établissements juste dix ans après l’époque dans laquelle se déroule le film. Ces gars y enseignaient toujours. Ils ne partaient jamais, même si beaucoup d’entre eux le souhaitaient. Je n’étais pas pensionnaire. J’allais juste y étudier la journée ce qui m’a donné une drôle de perspective. Je ne peux pas imaginer vivre dans un de ces endroits et devoir supporter ces gars tout le temps, ce serait terrible. Mais bon, j’y ai reçu une bonne éducation. Une meilleure éducation qu’à l’université, en fait. Certains de ces profs auraient dû enseigner à l’uni, ce qui les frustrait. Mon personnage est frustré. Il n’a pas de doctorat, aucun diplôme universitaire. Ces gars sont frustrés intellectuellement.

Vous venez d’une famille de profs. Est-ce que cela a aussi déteint sur votre personnage?

C’est vrai, mon père était prof d’uni. Ma mère enseignait dans un lycée. J’avais un grand-père prof d’uni lui aussi et d’autres grands-parents qui étaient tous enseignants au lycée. Je pense que tout ça était inconscient. Quand j’ai regardé le film et que mon personnage s’amuse de sa propre vivacité d’esprit alors que les gens autour de lui ne trouvent pas ça drôle, cela m’a rappelé un collègue de mon père. Je n’étais même pas conscient que je l’imitais. Mais je m’inspirais sans le savoir d’un souvenir de ce gars qui était si content de lui quand il faisait de l’esprit.

«Ce n’est que la deuxième fois que je bosse avec quelqu’un qui n’avait pas tourné de film auparavant et les deux expériences ont été géniales»

Paul Giamatti, comédien

Comment votre famille a-t-elle réagi quand vous lui avez annoncé que vous alliez être acteur après vos études à l’université de Yale?

Je pense que ça n’a surpris personne. Mon père est mort très jeune, donc je pense que c’est une des raisons pour lesquelles je me suis dit que je devais faire ce qui me passionnait. Il ne m’a jamais réellement vu jouer la comédie. Mais tous les autres n’avaient pas de problème avec mon choix de carrière. Ma mère était prof de lycée, mais elle avait une sensibilité artistique et nous emmenait voir des pièces de théâtre. Personne dans ma famille ne m’a découragé à faire ce métier.

Trouvez-vous du plaisir à jouer avec des acteurs novices? Dans ce film, vous donnez la réplique à Dominic Sessa, qui n’avait aucune expérience devant la caméra et est épatant.

Ce n’est que la deuxième fois que je bosse avec quelqu’un qui n’avait pas tourné de film auparavant et les deux expériences ont été géniales. J’ai vu la vidéo de l’audition de Dominic et ses scènes étaient bonnes. Mais ensuite, il a commencé à parler de son père et est devenu incroyable. Il a un visage formidable et on dirait qu’il sort des années 1970. Il y avait chez lui quelque chose d’envoûtant. Je me suis dit qu’on pourrait lui faire incorporer son vécu dans son jeu, ce qui a été facile. Il a un sens inné de la comédie et apprend très vite. C’était charmant de l’entendre défendre son personnage d’une façon que j’ai un peu oubliée. Je suis devenu un pro blasé!

Quel regard portez-vous sur l’Amérique des années 1970 par rapport à celle d’aujourd’hui?

Un regard nostalgique. Quand j’étais gosse, c’était chouette de vivre dans cette décennie. C’est intéressant, Henry Kissinger vient de mourir. Il était un symbole de cette époque. Si l’on y réfléchit, c’était une époque menaçante à sa propre façon. Elle avait certaines similarités avec la nôtre qui font qu’elle trouve une résonance aujourd’hui.

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