BerneUne commune va voter pour sauver les cloches de vaches
Une initiative pour conserver cette tradition, contestée à cause du bruit, est présentée ce soir à Aarwangen.
De belles vaches qui paissent dans une herbe grasse et verte, leur cloche tintant doucement au rythme de leurs lentes déambulations. Quoi de plus suisse?
Mais cette image d’Épinal et surtout sa bande-son ne plaisent pas à tout le monde et à Aarwangen (BE), une plainte a été déposée au début de l’année à cause du «tapage» nocturne d’un troupeau d’une quinzaine de vaches et de leurs cloches, qui passe la nuit dans un champ à côté d’une zone résidentielle. Deux couples vivant dans des appartements mitoyens du champ ont demandé aux autorités d’intervenir et de veiller à ce que l’agriculteur retire les cloches à ses vaches la nuit.
«Ma première réaction quand j’ai eu connaissance de cette plainte, c'était un certain étonnement,» a déclaré à l’AFP le maire de la petite commune de 4800 habitants, Niklaus Lundsgaard-Hansen, qui habite lui-même à proximité du champ en question. «Je n’étais pas conscient que les vaches font beaucoup de bruit, mais j’ai constaté que ça peut déranger des personnes.»
La réaction a été vive et massive en faveur d’un vote de la population locale pour sauver les cloches. Les tenants de la tradition ont recueilli 1099 signatures, à peine moins d’un quart de la population totale. «C’est énorme», a déclaré le maire. Lundi, l’initiative est officiellement présentée aux électeurs lors d’une assemblée municipale. Le vote populaire est prévu pour juin prochain.
Transhumance inscrite au patrimoine culturel
Si les cloches servaient autrefois à retrouver les bêtes dans les alpages, leur utilité a diminué avec l’émergence des traceurs GPS. Mais elles sont restées un puissant symbole d’une vie rurale idyllique et la semaine dernière, l’Unesco a classé la transhumance dans les alpages suisses au patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Mais avec de nombreux citadins recherchant la tranquillité à la campagne, le charme folklorique s’émousse parfois. Aarwangen est loin d’être un cas isolé. Un nombre croissant de plaintes ont été déposées ces dernières années contre les cloches des vaches, mais aussi celles des clochers, qui sonnent tous les quarts d’heure dans de nombreuses communes de Suisse.
Ces plaintes réveillent aussi la peur d’une perte d’identité dans un pays où un quart de la population est étrangère. «Il s’agit de notre tradition», explique à l’AFP Andreas Baumann, neurologue à l’origine de la défense des cloches. «Voulons-nous préserver ce que nos ancêtres ont créé, ou est-ce que nous le mettons simplement dans un musée ?», interroge t-il, et d’affirmer que «les cloches font partie de l’ADN des Suisses et ici, à Aarwangen, nous voulons les préserver.»
Un couple dérangé par le bruit va partir
Le bourg compte encore 19 fermes en activité. Sur les deux couples qui ont déposé plainte, l’un a décidé de la retirer tandis que l’autre envisage de quitter le village, a indiqué le maire.
Quel que soit le résultat du vote populaire, les vaches pourraient se voir retirer leur cloche la nuit si les autorités estiment qu’elles dépassent les niveaux de bruit acceptables. Une décision judiciaire est attendue prochainement.
Rolf Rohrbach, qui dirige une ferme d’élevage à proximité, aime cette tradition. «Quand je dors, j’aime ça» le son des cloches, dit-il. «Je sais que mes vaches sont à la maison.»