Info ou intox?Le virus de la désinformation médicale
Une étude de la Fondation Descartes a cherché à comprendre le comportement des Français face aux fake news sur les réseaux sociaux.
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La Fondation Descartes a étudié la corrélation entre les croyances et les comportements d'informations des Français pour comprendre le lien entre fake news et le refus d'un vaccin ou d'un renoncement médical. (image d'illustration)
AFPLa pandémie du Covid-19 a fait ressurgir le problème des infox (NDLR : fake news) autour de la santé et des remèdes pour se soigner. Bien que le phénomène ne soit pas nouveau, les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, WhatsApp) et YouTube ont propagé une désinformation importante.
Une étude menée par la Fondation Descartes a interrogé 4 000 français et les résultats sont quelque peu inquiétants.
Croyances et comportements
La Fondation Descartes a été créé en 2019 pour lutter contre la désinformation et étudier les fake news. Le directeur de la fondation et auteur de l'étude, Laurent Cordonier a cherché à « identifier les croyances et les comportements d'informations des Français ».
Dans cette étude, les participants ont été confrontés à différentes affirmations concernant des remèdes pour combattre des maladies, des cancers et autres croyances. Les résultats montrent que dans certains cas, ils leur étaient difficile de dire si ces affirmations étaient vraies ou fausses. L'exemple flagrant dans l'image ci-dessous avec la consommation de citron congelé pour combattre le diabète ou des tumeurs.
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Graphique tiré de l'étude, qui montre les croyances des participants concernant certains remèdes.
Fondations DescartesPour Laurent Cordonier, cité par « L'Express » : « les fausses informations, quelles qu’elles soient, polarisent le débat public et fragilisent nos démocraties. Quand cela touche aux questions médicales, cela entraîne aussi des risques pour la santé ».
Ces fausses informations ont proliféré comme le choléra sur les réseaux sociaux, sur YouTube et par messagerie instantanée (WhatsApp, Telegram) pendant la pandémie et continue aujourd'hui.
Suite aux réponses des participants, les chercheurs en sont venus à une conclusion : les personnes qui s'informent principalement via les réseaux sociaux, YouTube et les messageries instantanées auront tendances à avoir un niveau de connaissance en moyenne plus faible en santé. Pareil pour celles qui font plus confiance à ces canaux d'informations qu'aux organismes de santé et aux médias généralistes.
Les personnes qui vont s'informer auprès de leur médecin ou des médias agréés auront de meilleures connaissances en santé.
Celles qui ont un fonctionnement de pensée plus analytique qu'intuitif auront également de meilleures connaissances sur les sujets de santé. Elles feront moins confiance à tout ce qui apparaît sur les réseaux sociaux et autres sources qui ne proviennent pas de l'OMS, des médias ou de spécialistes de la santé. En d'autres termes : un esprit analytique aura une meilleure protection face aux fake news.
Médecine alternative et New Age
Un autre aspect de l'étude était de voir le raisonnement des participants ayant tendance à se tourner vers des médecines alternatives (80 % des sondés disent y avoir recours), ou qui ont des croyances paranormales et New Age (NDLR : croyance ésotérique autour des énergies et de la possibilité d'interagir entre la matière et le corps, d'entrer en connexion avec l'univers).
Les personnes plus propices à se tourner vers ce type d'alternatives médicales auront une sensibilité élevée pour les croyances complotistes et de moins bonnes connaissances en santé. Ces personnes auront aussi une confiance plus faible envers des autorités sanitaires, du gouvernement et des médias. Leur confiance envers les informations relayées sur les réseaux sociaux sera plus élevée.
L'étude a comparé les participants avec un médecin traitant et ceux qui n'en ont pas. De manière générale, ceux qui disposent d'un médecin traitant sont 12 % à avoir refusé de se vacciner contre la Covid-19, contre 30 % chez les personnes qui n'en ont pas.
«Lutter contre la désinformation»
Les résultats de l'étude mettent en exergue que s'informer par les réseaux sociaux, YouTube et par les messageries instantanées ont un impact négatif sur les connaissances en matière de santé. Cela pourrait également augmenter le risque de refus de se faire vacciner et de prendre un traitement prescrit.
C'est le même constat pour ceux sensiblement marqués par les thérapies alternatives et par l'ésotérisme. Ces pratiques favorisent « l'adoption de conceptions sur la santé en porte-à-faux avec le savoir scientifique », conclut l'auteur de l'étude Laurent Cordonier.
Que faire alors ? Pour Laurent Cordonier: un « effort particulier devrait donc être entrepris pour lutter contre la désinformation médicale sur les réseaux sociaux et les sites de vidéos en ligne ». Il encourage ainsi à diffuser des contenus « de santé de qualités conformes à la connaissance scientifique » actuelle. Il met également en garde sur l'essor des thérapies alternatives et de l'ésotérisme en France, qui pourraient alimenter cette désinformation.